Tiré d‘un roman de Patricia Highsmith, publié sous un pseudonyme en 1952, le film nous replonge dans les années cinquante aux Etats-Unis, époque du Mac Carthysme florissant où la chasse aux sorcières communistes n’oubliait pas d’y associer les homosexuel(le)s. Mais ce décor d’époque, si prégnant soit-il, n’est qu’un contexte ou un prétexte pour nous raconter une histoire d’amour à la force intemporelle.
Le film nous décrit le douloureux chemin de la passion contre l’intolérance, chemin que parcourent deux femmes dont la rencontre ne peut que dépasser les conventions sociales qui séparent une jeune vendeuse et une bourgeoise, mariée et mère. Et tout commence par ce regard répété derrière une vitre de voiture embuée de pluie qui plonge la jeune vendeuse dans une sensation d’irréel du monde trivial qui l’entoure, dans une sorte de détachement spirituel (ne s’appelle-t-elle pas Thérése ?) Puis vient la rencontre des deux femmes, et le film nous prend alors dans un vertige des regards. Entre la limpidité du regard de Rooney Mara, en Audrey Hepburn réincarnée et la profondeur du regard lourd de Cate Blanchet se tisse une histoire d’amour où les mots deviennent fades dans la subtilité de cette relation qui unit ces deux femmes.
Et quand vient cet instant lumineux où la passion se fait chair, tout a déjà été ressenti dans cette folle passion, avec ces quelques gestes timides et ces regards si magnifiquement captés par la caméra. Alors tout peut arriver, et les péripéties dramatiques du film ne nous détachent pas de cette sensation d’un monde irréel, où l’amour est la seule réalité à vivre.
Un hymne à l’amour pour tous …
Gérard Poitou
“Carol” un film de Todd Haynes 1 h 58
Avec Cate Blanchett, Rooney Mara (Prix d’interprétation féminine Cannes 2015)