La critique unanime le dit, “Whiplash”, c’est le “Full metal jacket” (voir ci-dessous) de la musique jazz: même bordée d’insultes postillonnantes, mêmes humiliations individuelles, mêmes sévices physiques, même terrorisme collectif, même sadisme du maitre, avec l’objectif ou l’excuse de conduire l’élève au dépassement de soi et donc à la maitrise absolue de son art…
Mais ce qui est (peut-être) vrai pour les militaires, devient vite grotesque appliqué à la musique. Bien sûr la musique demande des efforts parfois surhumains pour accéder à la virtuosité de l’instrument, mais pourquoi nier qu’il y a aussi de la passion, du plaisir de jouer et souvent du génie, l’apprentissage ne se mesure pas qu’à l’aune de la dextérité d’exécution, sous le regard de quelques professeurs, gardiens du dogme.
Et puis on atteint le sommet du niais scénaristique, quand notre jeune batteur immature s’amourache de la marchande de pop-corn du cinéma (où il va avec son père…), à laquelle il déclare, après l’avoir invitée à manger une pizza, qu’il ne peut l’aimer car il n’aime que sa batterie…
Dommage, car le film ne manque pas de génie dans son esthétique et sa direction d’acteurs, ce qui le rend insupportable c’est ce point de vue du narrateur sur la relation maitre/élève tel que la raconte le film: en fabriquant un conte de fée où le jeune batteur-esclave finit par se surpasser, sous les yeux satisfaits de son maitre, dans un solo de batterie d’anthologie, on passe à coté d’un sujet sans doute plus fort et plus passionnant sur la perversion du rapport d’autorité, la soumission et le dépassement de soi (traité finalement avec plus de subtilité dans un film comme “Black Swan”)
C’est la différence entre Stanley Kubrick et Damien Chazelle. Dommage…
Gérard Poitou
“Whiplash” de Damien Chazelle 1 h 47
avec Miles Tller, JK Simmons
Extrait de Full Metal Jacket (Stanley Kubrick)
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