François Ier, roi ligérien par excellence, est monté sur le trône de France le 1 janvier 1515. Il y a tout juste 500 ans. C’est alors un jeune homme de vingt ans et quatre mois, un beau cavalier, un bel athlète dirait-on de nos jours, un géant de près de deux mètres à la large de carrure qui plait beaucoup aux dames et ne se prive pas d’en profiter. Il a la taille et la prestance d’un héros. Le 14 septembre 1515, la victoire qu’il remporte à Marignan va l’installer dans ce rôle pour des siècles. Sur le champ de bataille, le jeune roi a montré qu’il avait la bravoure généreuse, ce qui lui vaut l’adoration du peuple et l’amour de la noblesse au point que dix ans plus tard le 24 février 1525, le désastre de Pavie ne parvient pas à ternir son image.
A sa naissance il est duc d’Angoulême et non dauphin de France. Proche cousin du roi mais pas son héritier. Il faut la mort de Charles VIII puis de Louis XII, tous deux sans héritier mâle pour qu’enfin la couronne lui revienne à la plus grande joie de sa mère, Louise de Savoie, qui, veuve très tôt, l’a élevé seule avec l’espoir de plus en plus affiché d’en faire un roi.
Lorsqu’il arrive au pouvoir, le seizième siècle en ses débuts ressemble beaucoup à notre 21ème siècle. Même si en histoire, les parallèles sont hasardeux et souvent déconseillés dans, le cas qui nous occupe, force est de pointer les similitudes. Comme aujourd’hui l’occident connait une révolution des communications et de l’information.. L’imprimerie vient d’entrer dans les mœurs et l’Amérique a été découverte, Colomb, Amerigo Vespucci et bientôt Jacques Cartier. L’espace, l’horizon se sont élargis avec en ricochet des approches nouvelles dans l’art, la politique, la médecine, l’astronomie, la philosophie et la médecine.
Cette ébullition généralisée et la poudre à canon ne font pas disparaitre d’un coup la chevalerie qui a dicté sa loi au Moyen-Age. Présent, passé et avenir vont se fondre dans le règne de François 1er. Il en sortira une France nouvelle, pas encore une nation, pour cela il faudra attendre 1789, mais un état qui compte sur la scène européenne, une puissance dont le roi est le maître absolu.
Dans cette première moitié du seizième siècle trois monarques s’affrontent, trois jeunes ambitieux, En 1515 ils sont dans la fleur de leur jeunesse. L’Espagnol Charles Quint a six ans de moins que François Ier, l ’Anglais Henri VIII trois ans de plus que lui. Tous trois sont placés au carrefour de la destinée de leur peuple et t être conduits à s’affronter
L’el dorado italien
Au début du règne de François Ier, le château de Blois est l’une des résidences royales favorites
De 1494 à 1559, quatre rois de France, Charles VIII, Louis XII, François Ier et Henri II, s’en vont guerroyer en Italie, y perdre beaucoup de plumes et en gagner quelques unes.
Charles VIII d’abord qui hérite de son grand-père Charles VII et de son père Louis XI d’un royaume cohérent et fortement organisé. Marié à Anne de Bretagne il programme l’arrivée de la Bretagne dans le giron royal. Les grands féodaux se tiennent tranquilles. Donc pour pratiquer la guerre, sport favori des seigneurs de l’époque, « ils avaient le goût de la guerre beaucoup plus que l’entente de la politique », écrit un de leurs contemporains comme son successeur Louis XII, il revendique le royaume de Naples et le duché de Milan qui leur revenaient de droit par héritage. François Ier marche sur leurs traces au maximum de sa hauteur Ils font la guerre, mot qui n’a pas le même sens qu’aujourd’hui comme le mot politique d’ailleurs.
Dans sa marche vers cet el dorado, en plus de Charles Quint François Ier trouve sous les pas de son cheval une épine de taille, son cousin, le connétable de Bourbon. Ce dernier possède en suzerain, c’est-à-dire en vrai patron l’équivalent d’un tiers du royaume. C’est inacceptable. Le roi le fait savoir et sa mère Louise de Savoie, nommée régente tandis qu’il guerroie intente un procès féodal qui finira par faire passer Bourbon à l’ennemi.
L’épopée revue par nos contemporains
Dès 1515 une épopée s’ est mise en marche dont l’histoire s’est emparée, façon légende, siècle après siècle. 500 ans plus tard les historiens actuels y apportent leur touche avec leurs longues vues de 2015.
Max Gallo ©Richard Schroeder
Max Gallo d’abord. Ce faiseur de livres a opté pour un développé chronologique. C’est efficace et précis, une bonne entrée en matière, une approche documentée de ce règne fastueux. Il s’attarde sur le roi bâtisseur, continuateur de ses prédécesseurs à Blois et Amboise, mais aussi initiateur de Chambord et Fontainebleau qui éblouissent Charles Quint qui y passe comme à Orléans alors que d’Espagne il se rend en Flandre.
Jack Lang ©Wikipedia
Jack Lang ensuite, qui, maire de Blois, homme de culture n’a pu s’empêcher « d’écrire un essai qui se lise aussi comme une biographie politique. Avec, pour fil conducteur, l’inspiration sans cesse puisée au cœur d’une Italie rêvée, admirée, convoitée ». En homme qui a partagé les plus hautes sphères du pouvoir, Jack Lang montre, sous ce monarque, la modernisation de l’Etat, la réorganisation des finances, le renforcement de l’autorité monarchique « avec des emprunts constants au-delà des Alpes » et il conclut « L’Amérique de François 1er, c’est l’Italie ».
Franck Ferrand enfin pour qui François 1er est un « roi de chimères ». Ilécrit en homme de radio et de télévision qui connait le pouvoir du sensationnel et le goût actuel pour ce qui écorne et déstabilise. Il déboulonne la statue, c’est son parti-pris. Il en fait une marionnette aux mains des femmes, sa mère, sa sœur, ses maîtresses. C’est un procureur excessif aveuglé par sa propre époque. Il oublie ce que rappelle fort justement Jean Giono dans « Le désastre de Pavie ». François 1er était de son époque comme tous ceux qui l’entouraient, comme tous ceux qui jouent alors dans cette grande partie européenne, Français, Anglais, Allemands , Italiens, Espagnols. Ce sont des hommes qui ont les intérêts d’alors et ne les voient pas comme ceux du XXIème siècle. A travers le filtre de l’histoire élevée au rang de science exacte ces derniers s’étonnent que leurs ancêtres n’aient pas été à la hauteur de leurs déductions et de leurs aspirations.
Françoise Cariès.
« François Ier ». Max Gallo
Editions XO 382 pages 19,90 euros
« François Ier » Jack Lang
Tempus 480 pages 10,5 euros
« François 1er Roi de chimères » Franck Ferrand
Flammarion 236 pages 19,9 euros
« Le désastre de Pavie » Jean Giono
Livre paru en 1963 à la NRF, réédité en collection folio