Une loge aménagée, un ours blanc, un fauteuil. Comme chez le psy, vous vous installez et c’est vous qui faites le travail. Drôle d’expérience de spectacle vivant. Je suisse (or not) existe-t-il vraiment ?
Un ours vous regarde et vous écoute parler, comme chez le psy. Photo Marika Brusorio
Par Bernard Cassat
Ils sont tout de même étonnants, ces artistes suisses. Même plus qu’étonnants, très curieux. L’autre soir, pour « Bande originale », on avait trois acteurs muets déguisés en marionnettes qui ne bougeaient pas, ne parlaient pas mais projetaient leurs pensées en sous-titre sur le décor. Là, dans « Je suisse (or not) », Camilla Parini, du collectif Treppenwitz, vous accueille dans une loge déguisée en ours polaire. Sous son épais costume elle ne parle pas, bien sûr, mais vous met dans les mains un volume de photos/petits textes que vous feuilletez pendant qu’elle opine vaguement du museau. Elle répond par oui ou non à vos questions d’un hochement de tête, mais pas plus. Tout est raconté par les mots écrits et les images, et les quelques moments de télé qu’elle lance de ses grosses griffes maladroites.
Une drôle de place dans la société
On suit donc son enfance de petite fille très introvertie qui n’arrive pas à trouver sa place. Documents vrais ou inventés, peu importe. L’album raconte aussi la satisfaction d’un costume d’ours polaire qu’elle reçoit un jour dans une boite rouge. Qui lui a donné, au fond, une place sociale et géographique, dans une grotte du glacier du Rhône. Elle s’y sent elle-même, bien que le glacier fonde à vue d’œil.
L’expérience « théâtrale » s’arrête là, dans cette loge, en spectateur unique. L’entrevue a duré une vingtaine de minutes. Et l’ours polaire prend un autre spectateur après vous. Que s’est-il passé pendant ces 20 minutes ? Chacun les vivra comme il le sent, mais l’expérience est un peu folle. La relation n’est bien sûr pas celle de comédien-spectateur. On se demande au fond ce qui la définit. Le spectateur n’est pas voyeur, il est plus moteur de l’entrevue, pourtant très guidée par l’album photos/textes. Que ça dise un malaise, sans doute. Mais au-delà ?

La famille de l’ours. Photo Camilla Parini.
Là encore, l’idée de départ est assez excitante. La performance de la réalisation l’est moins. On aurait souhaité plus de destruction, de déconstruction, du théâtre, de la scène, de la relation créée par le spectacle vivant. Ça reste une tentative étonnante mais un peu frustrante, comme une communication difficile qui n’arrive pas à s’établir…
« Je suisse (or not) »
Toute la journée de vendredi 14 mars
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