Quand la préfecture organise un coup de com’ sur la sécurité pour la Ville d’Orléans

Face à « l’augmentation des incivilités et des comportements délinquants », la préfecture d’Orléans a orchestré une soirée de contrôles ciblés dans les commerces du centre-ville. Une démonstration d’unité nouvelle entre la préfète Sophie Brocas et le maire Serge Grouard, présent pour l’occasion, après une année 2024 marquée par des tensions.

La préfecture et la municipalité d’Orléans ont annoncé une augmentation des patrouilles nocturnes ces prochains jours. Photo Magcentre


Par Mael Petit.


Il est 21h à la préfecture de région un mercredi de décembre. C’est le grand soir pour une opération de contrôles ciblés dans les commerces nocturnes d’Orléans. Un dispositif impressionnant réunit agents des douanes, policiers nationaux, contrôleurs de l’Urssaf et de l’inspection du travail, et tutti quanti… Tout le monde est sur le pont, en surnombre nous confie-t-on, pour une sortie coup de poing dans les rues d’Orléans.

La préfecture veut marquer les esprits, la préfète Sophie Brocas en tête, en mettre plein la vue, d’autant qu’elle est accompagnée par le maire Serge Grouard et son adjoint, expert en sécurité, Florent Montillot. Mais elle a aussi pour l’occasion invité l’intégralité de la presse locale pour diffuser dès le lendemain, à la première heure, des images de ce « coup de force » dans le centre-ville d’Orléans, rue de Bourgogne. Les cibles, ce sont les voisins de quartier à quelques mètres de la préfecture, éventuels catalyseurs de délinquance. Sans surprise, le premier suspect opère dans le fameux milieu nébuleux de la chicha et la retransmission de match de foot, pour des individus identifiés comme potentiels buveurs d’alcool susceptibles de troubler l’ordre public une fois dans la rue. Une opération #l’Etatvousprotège dans le pur style tourangeau. Le dispositif est impressionnant et les scènes en auraient jeté même davantage si elles avaient été captées par les caméras de la télé, malheureusement absentes pour l’occasion, pour un reportage parfait à diffuser l’aprem sur un canal de la TNT.

Chiffres de la délinquance relativement stables

Une heure plus tôt, dans les salons de la préfecture, Sophie Brocas avait convié Serge Grouard pour la signature d’un plan de lutte contre la délinquance auquel étaient associés la procureure d’Orléans et le directeur interdépartemental de la police nationale. Un plan décrit comme « sur-mesure » articulé autour d’une présence accrue des forces de sécurité sur le terrain, notamment la nuit. Mais aussi un renforcement de la lutte contre l’immigration irrégulière, contre le proxénétisme, le trafic de stupéfiants et donc l’augmentation des contrôles de commerces de nuit qui participent activement, selon les signataires du soir, à la multiplication des incivilités – et de fait à la délinquance – constatée ces dernières semaines dans le cœur de ville. « Les chiffres de la délinquance sont à peu près stables, tempère pourtant Sophie Brocas. Mais il est vrai que des événements récents ont pu perturber la quiétude de certains quartiers ». Au regard des chiffres, certains ont du mal à comprendre l’urgence, mais c’est surtout la médiatisation de faits divers ces derniers mois qui ont motivé les troupes. L’initiative s’explique également pour « anticiper » la demande du ministère de l’Intérieur sur la réalisation de « plans d’action départementaux de restauration de la sécurité du quotidien » sur la base d’une coopération des acteurs locaux.

Aux côtés de la préfète de région, Serge Grouard, légèrement en retrait, n’en manque pas une miette et se réjouit de ce nouveau tour de vis sécuritaire à l’approche des fêtes de fin d’année. La sécurité, c’est son dada, et il le rappelle d’ailleurs en évoquant « ses excellents résultats » depuis qu’il est en poste. Il en veut pour preuve la bonne figuration de sa ville dans « le top des classements » en matière de sécurité. Oui mais voilà. Ses efforts seraient mis en péril et ce même si les chiffres ne l’indiquent pas encore. La nuit, au coin des rues, à l’ombre de l’éclairage public rallumé depuis octobre dernier en raison d’un sentiment d’insécurité, le mal n’est jamais loin et rongerait la quiétude des quartiers. « On sent à nouveau des tensions au centre-ville dont il faut mettre un coup d’arrêt », prévient-il. Ces tensions sur l’espace public trouveraient notamment leurs sources dans le trafic de stupéfiants et la consommation d’alcool. En revanche, si l’immigration est évoquée, aucun ne s’attarde sur le sujet. Surtout pas le maire d’Orléans qui semble avoir mis de côté ses saillies grouardesque sur le sujet.

La désinformation des médias

Et pour cause, au cours de cette opération, Sophie Brocas et Serge Grouard affichent une entente cordiale. Qu’il semble bien loin le feuilleton printanier de « la colline du crack » qui avait vu l’édile et la préfète se chamailler par communiqué et lettre interposés au sujet de l’afflux de migrants dans le Loiret pour préparer les Jeux olympiques de Paris. Plus mesuré, Serge Grouard estime désormais que leur présence n’est que « facteur de tension » sans forcément la lier directement à cette prétendue montée de la délinquance. Et gare à ceux qui lui feraient dire l’inverse. En effet, certaines mauvaises langues lui avaient attribué des déclarations établissant un lien entre l’arrivée de ces migrants à Orléans et la délinquance. Las de constater dans la presse un nombre incalculable de « déformations de ses propos » notamment lorsqu’il s’exprime aux micros de médias nationaux, le maire s’agace… à raison ? « On va les retrouver dans la ville parce qu’il n’y a pas de logement donc résultat des courses, j’ai des habitants qui ont peur parce qu’il y a des rixes, il y a des bagarres », s’insurgeait-il à la radio début octobre. Le tout avant de qualifier de « réalité » la corrélation entre délinquance et la présence de migrants et sans-abris venus depuis la capitale.

Mais ce mercredi soir, Serge Grouard avait décidé de réserver pour une date ultérieure ses meilleures punchlines pour la jouer sobre aux côtés de la préfète. Posture similaire pour cette dernière, qui se refuse d’alimenter le sujet. Il faut dire qu’après une année 2024 aux relations plutôt fraiches, ce rendez-vous nocturne était l’occasion de réchauffer les relations. D’autres mauvaises langues susurraient d’ailleurs que cette soirée de démonstration avait été organisée pour satisfaire une insistance municipale. Cela expliquerait peut-être mieux la raison de cette scène nocturne d’ampleur à laquelle était conviée toute la presse.


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Commentaires

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  1. Très bon article, vraiment. Elle écrit plus des livres, Sophie Brocas ? C’est dommage, c’était trop bien.

  2. Wouah ça fait peur ! avec en plus les photos on se croirait dans un polar mais non c’est de la téléréalité (sauf qu’il n’y avait pas de télé dommage) et que c’est Orléans une ville vraiment pas insécure et surtout deux promoteurs de “la peur sur la ville” un peu has been.
    Mais heureusement la reporter de Mag était là pour filmer l’ambiance.
    Question : de quelle couleur était l’écharpe de Montillot ?

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