Pédopsychiatrie et dialogue des cultures : un premier colloque pour Bourges 2028

Le premier colloque sur la transculturalité, organisé en région Centre-Val de Loire, s’est tenu le 6 décembre à l’Institut national des sciences appliquées sous l’égide du Centre hospitalier George Sand et de la Ville de Bourges. À cette occasion, un don de protections périnatales traditionnelles maliennes, présentées lors de la journée d’étude, a été effectué au Muséum d’histoire naturelle de Bourges.



Par Alexandra Adam.


La Capitale européenne de la culture 2028 a rempli l’amphithéâtre de l’INSA vendredi 6 décembre 2024 pour son premier colloque sur la transculturalité. Professionnels de la santé, du social et du médico-social ont répondu favorablement à l’invitation du docteur Aminata Tembely, psychiatre de l’enfant et de l’adolescent à l’hôpital George Sand, pour échanger sur les rites et les objets traditionnels des enfants de migrants qui contribuent au processus d’acculturation en facilitant la transmission et l’initiation aux origines ainsi qu’à l’acceptation du nouvel environnement.

« C’est la première journée dédiée à la transculturalité à Bourges et la première en région avec une liste d’attente de 150 personnes, a salué Magali Bessard, première maire-adjointe déléguée à la santé et à l’égalité femmes/hommes lors de l’ouverture du colloque. À Bourges, nous avons la chance d’avoir une consultation transculturelle assurée par le centre hospitalier George Sand. Tous les hôpitaux n’en sont pas dotés et de ce point de vue, nous sommes en avance ».

Ce dispositif a vu le jour en 2019 au cœur du centre hospitalier spécialisé en psychiatrie. La consultation de pédopsychiatrie transculturelle dure environ deux heures, soit deux fois plus longtemps qu’une consultation classique. Les professionnels se relaient pour en assurer une chaque mois. « Sa mise en place a suscité beaucoup d’intérêt dans le service et au-delà », explique le docteur Aminata Tembely, cheffe du pôle médico-psychologique, qui préparait ce colloque et cette exposition depuis 2021.

La journée d’étude a commencé par l’intervention de son amie, le docteur Marie-Rose Moro, pédopsychiatre et professeure de psychologie de l’enfant et adolescent venue de la Sorbonne Université de Paris, avec la question : « À qui appartiennent les enfants ? ». À l’aide de son expérience clinique, elle a invité les participants à repenser la position de soignant en faisant appel à des notions d’anthropologie et de psychanalyse.

« La question transculturelle est utile à la pédopsychiatrie, a-t-elle expliqué. Elle propose une méthodologie qui invite à se laisser affecter par le savoir des familles pour apprendre à faire autrement et co-construire avec elles des solutions adaptées à leurs besoins ».

Permettre le dialogue des cultures

L’humilité du praticien qui accepte de comprendre la culture du patient offre un espace d’écoute pour créer une relation de confiance et instaurer un dialogue avec sa famille. Ce cadre permet de poser les questions suivantes : Comment se métisse-t-on ? Que garde-t-on de sa culture d’origine ? Que doit-on prendre en arrivant dans un nouveau pays ? Comment se transforme-t-on ?

« C’est ce travail qui permet le métissage, assure Marie-Rose Moro. L’institution doit faire preuve de bienveillance pour permettre à deux mondes de se rencontrer et de dialoguer. Nous devons faire l’hypothèse que ce que l’autre demande, même si nous ne le comprenons pas, a un sens et que, parce qu’il en ressent le besoin, c’est bon pour lui ».

Pour accompagner les familles migrantes, l’approche transculturelle en psychiatrie aide ainsi à contextualiser les pratiques culturelles pour éviter de poser des diagnostics erronés à partir de jugements ou de représentations. « Le risque est de psychiatriser une situation qui n’en est pas une », rappelle la spécialiste.

Pour soutenir la construction identitaire des enfants migrants

Moustapha Doucoure, tradipraticien, et le docteur Baba Koumaré, professeur émérite en psychiatrie à la faculté de médecine du Mali, ont fait le déplacement pour l’occasion. Leur intervention a permis de passer en revue les différentes protections traditionnelles qui accompagnent les enfants de l’Afrique de l’Ouest depuis leur naissance et jusqu’à leur entrée dans l’âge adulte.


Des colliers ou des ceintures qui ont des rôles précis comme la prévention des maladies physiques, psychiques ou spirituelles et qui permettent de renforcer leurs défenses immunitaires. « Ces objets et ces symboles traditionnels, qui font partie du monde des enfants de migrants, contribuent au processus d’acculturation en facilitant le partage, la transmission et l’initiation aux origines », a dévoilé Baba Koumaré. C’est parfois le seul objet du pays d’origine qui résiste au voyage.

Ces protections infantiles maternelles maliennes vont désormais rejoindre les collections du Muséum d’histoire naturelle de Bourges dont le rôle est de « collecter et conserver le patrimoine immatériel » à travers la sauvegarde des histoires et des récits des objets qu’il protège, a rappelé son directeur, Sébastien Minchin.

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