Mercredi matin, à l’Institut, Isabella Vasilotta et le jury du concours ont proclamé les noms des trois finalistes qui se produiront en concert le 2 novembre au Théâtre d’Orléans. Cette annonce fait suite à deux soirées de demi-finales passionnantes.
Misora Ozaki, Leo Gevisser, Svetlana Andreeva, les trois finalistes du Concours. Photo JDB
Par Jean-Dominique Burtin.
Quel plaisir que ce concours teinté de sérénité et doublé d’un accueil si chaleureux du public. Ce lundi soir, Misora Ozaki ouvre la soirée des premières demi-finales avec une douce Estampe de Debussy (Pagodes). Lui succèdent les plans et arrière-plans de trois mouvements de Petrouchka, de Stravinsky.
Tout est alors surgissements et apparitions précédant une véhémente intensité dans l’interprétation de Dusapin (Piano works n°3 Black Letters). Enfin, la pianiste japonaise se pose tel un oiseau sur les premières notes d’Archipel IV, de Boucourechliev. Misora Ozaki : « Avec le parfum des multiples instruments et les dissonances des nouveaux langages, notre ADN vibre ».
Une tension dramatique saisissante
Saisissante et envoûtante, Svetlana Andreeva se penche quant à elle sur les Litanies de l’ombre, de Thierry Escaich. Force est de mesurer, avec ce récital extrêmement personnel, que chaque candidat laisse sa marque au concours et parfois une flamme à nulle autre pareille. De Svetlana Andreeva, nous aimerons, notamment, l’œuvre pour piano et électronique d’Olga Bochikhina, Musica Sacra II. D’une exceptionnelle tension dramatique est, de fait, le programme de l’artiste ukrainienne, à la fois processionnel, dansant, et d’une profondeur éblouissante. Voici une marche de battements de cœur et de battements de peur évoquant souffrance, pureté de la renaissance à l’instant où le clavier semble s’évanouir dans un souffle.
« Une perception religieuse, mystique ou mythologique »
Svetlana Andreeva, qui interprète aussi Escaich, Szymanowski, Galina Ustvolskaya et Olivier Messiaen : « Le concept du programme réunit des œuvres enracinées dans une perception religieuse mystique ou mythologique du monde. En combinant les œuvres de cette manière, j’ai cherché à trouver un équilibre subtil entre les notions subjectives et objectives en musique, les expériences personnelles intérieures et les concepts idéalistes, les formes dynamiques et les images statiques ».
Une traversée virtuose et accomplie
À Svetlana Andreeva succède Julian Trevelyan. Ce dernier invite à l’écoute d’un piano sorcier, tout en tension, et en torsion subtile. Le programme est dense et s’articule autour de l’eau et de ses environnements. Roussel, Isang Yun, Claude Debussy, Jérôme Combier, Abel-Marie Decaux et Messiaen sont les compositeurs convoqués. Julian Trevelyan à propos de cette traversée virtuose et accomplie : « La Suite de Roussel est pleine de mélodies marines françaises, cette réflexion humaine d’un marin constitue une fin appropriée à ce programme ».
Saisir à vif le temps suspendu
Mardi soir, second et ultime jour des demi-finales, la pianiste Karin Furutani, cristalline, parsème la salle de l’Institut de lueurs sonores dans un récit musical empreint de sortilèges et de profondeur. Ici, l’artiste saisit à vif le temps suspendu. Boucourechliev, Hèctor Parra, Claude Debussy, Akira Miyoshi et Gérard Pesson sont au programme. Voici, pour leur interprète « autant de tracés, de lignes de fuite et de perspectives qui dessinent un univers sonore, un Orient-Orion onirique ». En vérité, voici tour à tour, un violent corps à corps de l’artiste et de son instrument, un souffle d’une infinie poésie, un piano qui nous prend par la main et nous invite à une escapade enchantée et vertigineuse.
Une Java suite qui force l’admiration
En clôture de ces demi-finales, place à l’amplitude éloquente comme élégamment mesurée de Yijia Chen qui interprète entre autres, tendant au public un filtre de tendresse et d’élans, la Sonatine d’Albert Roussel « pleine de couleurs orientales, mais aussi influencée par l’impressionnisme, le symbolisme et le néoclassicisme ». Magnifique est encore la Sonate de Dutilleux donnée par le candidat avec une enveloppante et fulgurante musicalité. Pour Leo Gevisser, « une description possible de la musique est qu’il s’agit d’une architecture sonore autour du silence ». Oscillante incantation spatiale, part d’ombre et de lumière sont quelques-uns des mots qui pourraient accompagner cet ultime récital où le temps se dilate, à la fois chaotique mais aussi festif, à l’image de cette Java suite, de Leopold Godowsky, bouquet final des demi-finales, œuvre qui force à son tour l’admiration.
La finale au Théâtre d’Orléans
La finale et une synthèse de l’esprit du concours. Les trois finalistes présenteront Vortex Temporum, de Gérard Grisey, avec l’Ensemble Intercontemporain ainsi qu’une œuvre au choix entre Cerdana de Déodat de Séverac, Sonate en mi bémol mineur de Paul Dukas, et Ouverture variations et final de Guy Ropartz. Enfin, les trois candidats compléteront leur programme avec une ou plusieurs œuvres au choix du répertoire de 1900 à nos jours.
Samedi 2 novembre à 15 heures, Théâtre d’Orléans Plein tarif : 25 € (tarif réduit à découvrir sur www.theatredorleans.fr).
Toutes les épreuves du concours ainsi que la finale sont visibles en direct sur la chaîne YouTube du Concours international de piano d’Orléans.
En savoir plus : www.oci-piano.com
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