Avec « l’Amour de l’Art », le Centre Dramatique National d’Orléans a ouvert sa saison théâtrale au Bouillon, au sein du domaine universitaire, par une conférence animée par le duo Stéphanie Aflalo et Antoine Thiollier. Un petit bijou d’intelligence, délicieux et jubilatoire, qui ravit un public composé majoritairement d’étudiants.
Par Bernard Thinat.
Stéphanie Aflalo, autrice, comédienne, metteure en scène, musicienne, parcourt la France en tous sens en passant par Avignon l’été dernier, avec ses conférences qu’elle dénomme « Récréations philosophiques ». Dans la cité des Papes, elle évoquait la mort, jonglant avec les mots, dans « Méditation ». Ses récréations, elle les a débutées par un titre complètement loufoque, « Jusqu’à présent, personne n’a ouvert mon crâne pour voir s’il y avait un cerveau dedans ». Son deuxième volet, c’est précisément « l’Amour de l’Art », qu’elle présentait les 1ᵉʳ et 2 octobre au Bouillon.
Photo Roman Kané
Veste et jupe rouges, bas blancs, elle attend que le public s’installe, avec pour ce spectacle, Antoine Thiollier, jean et baskets, pour partager le plateau. En guise de prologue, les deux artistes tiennent à prévenir le public qu’à certains moments, ils pourront quitter la scène, ou parler curieusement, se tenir d’une étrange façon, la liste n’est pas exhaustive. La raison : tous deux souffrent de rétroversions multiples, allant du crâne aux jambes, en passant par le thorax, les coudes, la langue, et ainsi de suite. On aura même droit à une rétroversion du respect de la culture (sic). Tout cela avec un humour ravageur.
Le public mis en joie, les deux compères passent aux choses sérieuses : plusieurs tableaux de peintres (Caravage et Rembrandt) projetés sur l’écran sont explicités par Stéphanie et Antoine, d’abord avec des phrases évidentes, « là, on voit un crâne », puis dépassant le stade enfantin, nos deux artistes s’envolent vers des théories totalement absurdes, tel peintre prédisant le changement climatique ou les opinions politiques de tel ou tel. Le langage se fait rapide, élaboré. Quelques pas de danses de l’un ou de l’autre avant la dernière partie, quand ils nous décrivent un tableau qu’on ne verra pas, la salle d’attente d’un cabinet dentaire. Et c’est toujours aussi jubilatoire. Au final, ils reproduiront la performance de Marina Abramovic mangeant avec dégoût, un oignon. Le baiser final conclura le spectacle. Ovation légitime du public.
Photo Roman Kané
Études en philosophie aidant, Stéphanie Aflalo ne côtoie pas le vulgaire où tant d’humoristes se noient, au contraire ses spectacles font appel à la réflexion chez le spectateur, elle enjolive les mots, les fait virevolter avec grâce. Ici, tout est dans le titre, une déclaration d’amour à l’art, le spectacle vivant rendant hommage à l’art pictural, mais d’une manière totalement loufoque. Il fallait oser ce petit bijou artistique !
Prochain spectacle au CDN d’Orléans
Maître obscur, de Kurô Tanino
les 16 et 17 octobre au théâtre d’Orléans
Billetterie
Plus d’infos autrement sur Magcentre :
Scène nationale d’Orléans : l’incroyable force d’un mentaliste belge !