Au-delà de la fin d’un organe de presse local, la disparition du Petit Solognot, journal papier gratuit bimensuel, fait écho à la problématique actuelle de l’information libre. L’issue fatale du Petit Sol entre dans la continuité dans une mutation évidente dans les modes de communication. Le monde de l’information est à la croisée des chemins, de sa conception à l’approche d’un modèle économique.
Par Fabrice Simoes.
Le numéro 842 du journal papier Petit Solognot, paru ce mardi 17 septembre, sera le dernier. Après quarante ans, le journal basé à Romorantin, et qui rayonnait sur le Loir-et-Cher, le Cher et le Loiret, a fait sa dernière Une. Le journal annonce pleine page « Un dernier numéro pour la route » et « remercie les annonceurs, les associations et les lecteurs pour leur fidélité ». Créé en 1983 par le journaliste Gérard Bardon et l’écrivain Dominique Labarrière, Le Petit Solognot était une institution locale. Il traitait de l’actualité des trois départements solognots mais aussi de l’actu régionale. Outre sa proximité, c’était un espace où les différents journalistes et rédacteurs n’avaient d’interdits que ceux qu’ils se fixaient eux-mêmes. Cette liberté de ton et cette particularité géographique, qui s’affranchissait des limites départementales, constituaient des atouts. Moins cependant que sa gratuité. C’était probablement aussi sa faiblesse. Au sortir de la pandémie le ratio publicité-article, source d’équilibre, n’était semble-t-il pas revenu sur les bases antérieures. On peut penser que le volet économique n’est pas totalement étranger à cette décision abrupte. La société des éditions Ramsay qui avait racheté le titre en 2018 n’a pas, pour le moment, souhaité communiquer sur cet arrêt intempestif en cours d’année.
Un monde de l’information en mutation
Cette suppression du seul organe de presse typiquement solognot vient après celles d’autres en presse régionale. En deux décennies le paysage médiatique en région Centre-Val de Loire a été très largement modifié. Si des journaux très « locaux » ont disparu tels que le journal de la Sologne, le Petit Blaisois et le Petit Berrichon, mais aussi La Tribune Hebdo Orléans à l’automne dernier, d’autres de plus grande envergure ont tranché dans le vif. La Nouvelle République du Centre Ouest a lâché, après le début de ce millénaire, un bout du Centre pour se recentrer sur l’ouest. Il n’a conservé que 5 éditions départementales sur les 8 initiales : Indre, Loir-et-Cher, Indre, Vienne et Deux-Sèvres. D’autres, comme La République du Centre a perdu son édition eurélienne voilà une dizaine d’années. De fait, rares sont désormais les départements avec plusieurs titres de journaux différents… Le Journal de Gien, l’Écho du Berry, respectivement 10 000 et 12 000 exemplaires, ou la Voix du sancerrois, entre autres, font partie de ces derniers dinosaures d’une presse de proximité qui résistent à l’uniformisation de l’information, mais aussi, parfois, des idées. On ne sait pas pour combien de temps encore. Sans vouloir jouer aux oiseaux de mauvais augures, on peut penser que le modèle actuel est en sursis.
Dans les pays anglo-saxons, notamment en Grande-Bretagne, le volume des tabloïds et les éditions papier en général, même gratuites, sont toujours aussi importants. Pourtant l’utilisation des écrans est là aussi prédominante. Peut-être une question de culture… Ceci étant, dans les groupes de presse, Centre France ou autres, le virage du numérique a été pris mais il peine à faire sa place entre articles gratuits ou payants. Toute la difficulté réside à un modèle économique toujours à la recherche, à minima, d’un équilibre. 37°, l’information de la Touraine à la bonne température n’échappe pas à cette logique, tout comme Magcentre. Les uns et les autres jouent les funambules. Ainsi, pour l’heure, l’existence de magcentre.fr reste toute aussi précaire. Elle doit beaucoup à ses soutiens institutionnels et ses abonnés. Parce que, il faut l’avouer, la gratuité, même sur la toile, a un coût.
Si on entend souvent que « un journal qui disparaît, c’est un peu de démocratie qui disparaît », force est de constater que le désamour croissant et le désintérêt grandissant envers les médias classiques sont en même temps générationnels. Les réseaux sociaux, et la toile, sont actuellement des créneaux supports de médias en devenir. Cependant, sur ceux-ci l’instantanéité de l’information fait régulièrement se chevaucher informations vérifiées et fake news. Souvent au détriment des premières…
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