Dans l’Indre, l’extrême droite n’a pas encore gagné

Cinq points de retard pour François Jolivet (Horizons) dans la première circonscription. Dix pour Nicolas Forissier dans la deuxième, torpillé par son «ami» Ciotti. Un deuxième tour sportif, mais le RN n’a pas de réserves de voix.

Par Pierre Belsoeur

A La Châtre et dans ses environs, tout monde connaît Nicolas Forissier, et l’on vient lui apporter des encouragements bienvenus

La deuxième circonscription de l’Indre est vaste, une heure trente de route sépare Sainte-Sévère de Valençay . Et c’est justement de Valençay, dont le cœur de ville a été la proie des flammes la veille, que Nicolas Forissier arrive, brûlant l’étape de Saint-Août, dont le célèbre marché du mardi est un point de passage indispensable pour rencontrer le monde rural. Monde qui a abandonné, là comme ailleurs, l’inoxydable homme politique, qui fut maire de La Châtre, secrétaire d’Etat (à l’agriculture justement) et reste conseiller régional et député sortant.
Lors des législatives de 2012, Nicolas Forissier avait été balayé par la vague rose qui avait suivi l’élection de François Hollande. En 2017 il avait retrouvé son poste, résistant à la vague Macron. Un succès confirmé voici deux ans. Cette fois le capitaine du vaisseau LR 36 ( ou de la barque ?) «Je préfère l’expression vieux gréement» sourit-il, affronte la tempête RN. En voici un qu’un LR défroqué, dont la seule référence est d’être né à Châteauroux, vient de lui mettre dix points dans la vue en brandissant la pancarte de l’extrême droite associée à Ciotti !

«A son âge, j’avais repris deux entreprises ! »

Nicolas Forissier pourrait-être en colère face à cette cascade d’infortunes.« Plus que ma carrière politique, ma première satisfaction c’est d’avoir été utile à mon département en sauvant deux entreprises qui emploient actuellement une quarantaine de personnes.» Les reprises de l’Imprimerie Loeillet et de l’hebdomadaire «L’Echo du Berry» dans les années quatre-vingt-dix auront effectivement transformé ce Parisien en Berrichon.
C’est ce parcours de chef d’entreprises qui lui donne sa légitimité. «Une carrière d’homme politique ça se construit, marches après marches, vous devez vous rendre utile à vos concitoyens avant de revendiquer leurs suffrages. Mais là, on marche sur la tête, arrivé depuis trois semaines dans la circonscription, mon adversaire qui n’a jamais travaillé, se voit déjà député. C’est une entreprise de déstabilisation menée par Ciotti et le RN. Mais je ne suis pas encore battu.»
C’est manifestement la trahison d’Eric Ciotti qui a le plus de mal à passer. «Il prend en otage une famille politique, prive les candidats LR de moyens de campagne puisque la trésorerie du parti est bloquée. Tout cela pour un plat de lentilles, un portefeuille ministériel. Je suis écœuré.»
Le désistement immédiat du socialiste Clément Sapin, sa notoriété de député sortant dans tous les milieux devraient lui permettre de combler son retard sur un adversaire qui n’a pas de réserve de voix. «On devrait pouvoir compter sur une réaction de bon sens et de sécurité, mais on est en face d’une colère nihiliste. L’extrême droite n’a aucune réponse sérieuse à apporter, elle s’est contenté de surfer sur les ressentiments.»

Un parti à reconstruire

S’il sauve son siège dimanche Nicolas Forissier sera dans une opposition frontale à un gouvernement d’extrême droite, que le RN recueille une majorité absolue ou relative. Face à un gouvernement de gauche il soutiendra au coup par coup les mesures qui lui paraissent positives « Mon parti c’est l’Indre.»
En revanche, un autre chantier l’attend, c’est la reconstruction d’un parti de gouvernement de droite à présent que le macronisme vole en éclat. « Nous nous sommes recroquevillés en ayant peur d’être écrasés, alors que nous aurions dû avaler ce conglomérat qui n’a jamais été un parti.»