Le Rassemblement National pourrait rafler 13 des 23 sièges de députés dans la région contre 3 jusqu’à présent. Mais tout dépendra d’éventuelles triangulaires-peut être moins nombreuses qu’annoncées- des désistements et des reports de voix. La majorité présidentielle devrait perdre des plumes tout en préservant plusieurs sièges grâce au retrait de candidats de gauche.
Par Jean-Jacques Talpin (Avec Jean-Luc Bouland)
Les sondages ne s’étaient donc pas trompés. Comme pour les Européennes, ils avaient annoncé une vague incompressible d’extrême droite. Les résultats de ce dimanche 30 juin confirment cette orientation dangereuse dans le Centre comme dans la France toute entière. Dans la région le RN disposait de trois sièges : Thomas Ménagé à Montargis, Mathilde Paris dans le val de Sully et Roger Chudeau (désormais célèbre avec son embardée sur les binationaux et Najat Vallaud-Belkacem) en Sologne. Le 7 juillet la troupe bleu marine va considérablement s’étoffer avec peut-être une dizaine de sièges supplémentaires. En fait, la situation sera plus claire mardi 2 juillet au soir, date limite de dépôt des candidatures en préfecture. On saura alors quels candidats arrivés en 3ème position se désisteront ou se maintiendront. La tendance semble s’orienter vers de nombreux retraits car favoriser une triangulaire c’est assurément favoriser le candidat arrivé en tête, dans la plupart des cas RN.
La droite en retrait
Quelle que soit la configuration qui sera choisie, des candidats RN sont en position extrêmement favorable comme Roger Chudeau en Sologne (49,75%) à qui il a manqué 150 voix pour être élu au 1er tour. Même perspective favorable pour Mylène Wunsch dans l’Indre ou Thomas Ménagé dans le Loiret.
Même parachutés les candidats RN ont effectué leur razzia comme Pierre Gentillet l’avocat médiatique parisien plus habitués des plateaux de CNews que des labours berrichons qui décroche 43% dans la 3ème circonscription du Cher face au député sortant Renaissance Loïc Kervran. Dans une grande partie des circonscriptions les candidats RN arrivent largement en tête face aux sortants macronistes comme François Cormier Bouligeon (33% dans la Cher).
Si la majorité présidentielle enregistre un échec ,la droite classique est loin de connaître un succès. Ainsi en Eure-et-Loir Olivier Marleix, sortant LR et ex-président du groupe des Républicains à l’Assemblée Nationale n’engrange que 25,9% des voix contre 38% au RN. Dans l’Indre l’autre sortant LR Nicolas Forissier (déjà 6 mandats au compteur) plafonne à 31,8% contre 41,7% au RN. Sa seule planche de salut réside dans le désistement de Clément Sapin du Front Populaire qui tout en ayant dépassé les 20% se retire. Dans le Loiret pourtant Constance de Pélichy réalise une belle campagne à 32,04% et pourrait même espérer l’emporter si les voix du candidat de gauche Clément Verde parachuté de la dernière heure se reportent sur elle.
La gauche résiste en partie
Seul député communiste et ancien maire de Vierzon Nicolas Sansu sauvera-t-il son siège ou fera-t-il les frais de cette marée bleu marine comme Fabien Roussel dans le Nord ? Toujours est-il que Nicolas Sansu n’a recueilli que 29,7% des voix contre 40,6% au RN. Mais le candidat Renaissance (20,8%) devrait se retirer. Même à Saran, vieille ville communiste le RN arrive en tête. Seule l’histoire communiste résiste encore dans le Montargois où le communiste Bruno Nottin portera les couleurs du NFP au second tour même si le résultat semble acquis pour Thomas Ménagé avec ses 49%. Le jeune et ambitieux Ariel Lévy (LR) n’a donc pas réussi à bousculer ce duel déjà joué en 2022. Le Loiret, département où la droite traditionnelle semblait bien installée il y a une décennie, pourrait désormais être représenté par 4 députés RN sur 6…
A l’exception de l’écologiste Charles Fournier à Tours, la région comptera-t-elle un autre député de gauche ? Pas sûr même si en Indre-et-Loire et dans le Loiret la gauche affiche encore des couleurs. Dans la 1ère circonscription du Loiret la socialiste Ghislaine Kounowski arrive un cheveu (69 voix) derrière la députée sortante Stéphanie Rist. C’est également vrai dans la 6ème du Loiret où le socialiste Christophe Lavialle arrive en 3e position mais pas loin derrière le RN et le médiatique Richard Ramos (Modem). Si les consignes nationales sont respectées les deux candidats socialistes devraient se retirer et favoriser ainsi la réélection des sortants. Ce devrait être également vrai en Touraine où l’ancien frondeur de François Hollande Laurent Baumel devrait se retirer au profit de Fabienne Colboc (Renaissance).
Les ministres préservés ?
Trois ministres de la majorité présidentielle, ancien ou en exercice, concouraient ce dimanche : Marc Fesneau en Loir-et-Cher, Philippe Vigier et Guillaume Kasbarian en Eure-et-Loir. Même en seconde position (39,4%) Philippe Vigier peut nourrir des espoirs relatifs face au 43,1% du RN tout comme Guillaume Kasbarian, ministre du logement et un des rares candidats Renaissance à être arrivé en tête du scrutin. En. Loir-et-Cher Marc Fesneau (ministre de l’agriculture) devrait l’emporter dimanche malgré un retard de 300 voix sur le RN. Il est vrai qu’il bénéficiait du soutien du maire socialiste de Blois Marc Gricourt qui avait retiré son soutien au candidat LFI dont d’anciens tweets antisémites avaient été exhumés.
Des sortants pas naufragés
Hier députés sortants Renaissance des candidats de la majorité réussissent des scores honorables qui ouvrent la porte à des succès possibles. C’est vrai de Daniel Labaronne (32,5%) en Indre-et-Loire, de Christophe Marion (36,3%) en Loir-et-Cher, de Stéphanie Rist et Richard Ramos dans le Loiret. Ce ne sera pas le cas de Anthony Brosse élu avec trois voix d’avance dans le Pithiverais en 2022 et qui cette fois n’obtient que 22% des voix face à Jean-Lin Lacapelle (43,37%), un revenant du FN issu de la vieille et dure école lepéniste (celle de Jean-Marie !). Dans l’Indre, François Jolivet (Horizons) (35,1%) est devancé par la candidate RN. L’issue du scrutin dépendra du maintien ou non du candidat LFI (21,7%). C’est vrai aussi de Daniel Labaronne en Indre-et-Loire ou de Henri Alfandari (Horizons) en tête en Touraine. Dans le Cher et l’Indre d’ailleurs les cinq députés sortants de la majorité sont qualifiés pour le second tour.
Paradoxe de ce scrutin : la majorité présidentielle conservera une partie de ses acquis uniquement si les reports de gauche fonctionnent le 7 juillet !