Alors que le Plan de Sauvegarde de l’Emploi sera présentée une nouvelle fois le 25 juin, près de 1 000 personnes ont défilé dans les rues de Blois samedi pour dire non à la fermeture de l’usine emblématique de la ville depuis 1848.
Par Jean-Luc Vezon
De 7 à 77 ans, la solidarité s’est exprimée avec force dans un long cortège conduit par l’intersyndicale FO-CFDT, CGT. Vers 11 h 30, un long clapping a salué son arrivée sur le site de l’ancienne manufacture Poulain près de la gare, là où tant de blésois ont des souvenirs. « Poulain, c’est Blois et Blois, c’est Poulain » pouvait-on lire sur une banderole.
Le secrétaire du CSE Olivier Dupont a alors lu une déclaration dans laquelle il dénonce la stratégie spéculative d’Eurazeo : « C’est clair, le fond veut céder le groupe dans les prochains mois. Il déshabille la mariée pour la rendre plus séduisante aux yeux du futur repreneur. » En ligne de mire, une délocalisation de la production du site de Villebarou vers le site Carambar & Co de Strasbourg et l’Allemagne. Les poudres chocolatées ont elles déjà été cédées à Krüger fabricant de denrées alimentaires allemand établi à Bergisch Gladbach tandis que des contrats MDD n’ont opportunément pas été renouvelés …
Le syndicaliste a demandé l’aide des pouvoirs publics, bien silencieux à ce jour pour trouver une solution : « Il faut trouver un repreneur. Nous demandons l’application de la loi Florange », imposant de rechercher un repreneur pour les grandes entreprises projetant de fermer un établissement rentable et procéder à des licenciements économiques. Nous nous battrons jusqu’au bout ».
Du coté de la CGT, on dénonçait la rapacité du fonds Eurazeo, qui « après s’être gavé via des exonérations de cotisations sociales, des réductions d’impôts sur les bénéfices et des aides de l’Etat sous toutes les formes en veut toujours plus ». Selon la centrale, les 18 millions d’euros d’investissement nécessaires pour moderniser le site représentent seulement 3 % des bénéfices annuels du fonds d’investissement ou 10 % des dividendes versés aux actionnaires en 2022.
Rendez-vous mardi 25 juin
C’est la nouvelle date du comité social et économique (CSE) extraordinaire qui examinera le plan de fermeture de la direction. « Elle veut aller vite mais nos disposons d’avocats et d’experts pour démontrer qu’il s’agit d’un enfumage scandaleux » précisait à Magcentre.fr Aurélien Lambert syndicaliste CFDT.
« C’est une catastrophe sociale. On se s’attendait pas à ça, à un tel mépris d’Eurazeo pour les salariés. C’est une honte. Si, on ferme il faudra repartir à zéro » s’inquiétait Daniel, 52 ans dont 29 passés chez Poulain comme opérateur de conditionnement.
Si la manifestation se voulait apolitique à la demande des organisateurs, élections législatives obligent, les candidats de tous bords étaient nombreux derrière les banderoles. A noter que les représentants du RN, présents au point de départ place de la République, n’étaient pas présents dans le cortège, où leur participation n’était pas souhaitée.
Eurazeo, la face sombre du capitalisme
En 2017, Eurazeo, fonds d’investissement privé français, possédant 590 entreprises, a racheté à Mondelez 14 marques européennes emblématiques de chocolat et de confiserie dans l’objectif de créer et développer un nouveau groupe, Carambar&Co avec notamment les marques Poulain, Carambar, Kréma, La Pie Qui Chante et Terry’s, ainsi que les licences des Pastilles Vichy, des Rochers Suchard et de Malabar. Eurazeo a également hérité de cinq sites de production en France (Blois, Marcq-en-Baroeul, Saint-Genest, Strasbourg et Vichy).
En 2021, Eurazeo fermait Marcq-en-Baroeul, site historique de production de carambar, avec comme conséquence la suppression de plusieurs emplois et autant de familles plongées dans la précarité.
Aujourd’hui, la direction avance des arguments justifiant la fermeture et 109 licenciements : surcapacité de production, frais fixes trop importants, investissement de 18 millions d’euros pour remettre le site à niveau et assurer sa conformité avec le marché. Sa stratégie laisse à penser qu’elle veut céder à court terme la marque Poulain, emblématique du groupe, qui sera encore plus rentable pour les actionnaires après la fermeture de l’usine de Villebarou.
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