À 23 jours du résultat d’une campagne électorale éclair, Magcentre vous propose, avec la plume de Joséphine, de décrypter sous la forme d’un compte à rebours, cette échéance qui menace les fondements mêmes de nos valeurs républicaines.
Conclusion de la phase de négociations. Espoirs et déçus
Fumée blanche…
Le moral revient un peu. Ces dernières 48h ont été éprouvantes. À l’approche de l’échéance pour les dépôts de candidature, les coups de bluff ont soufflé le chaud et le froid sur le Front Populaire. Un Roussel alarmiste, une Place Publique odieuse dans la dernière phase de négociation, une FI qui entendait régler des comptes internes par le biais des investitures et incapable de dégager clairement Quatennens, un PS silencieux et distant qui pensait obtenir encore quelques gages, menaçant de tout arrêter il y a encore quelques heures… le Front Populaire accouche dans la douleur d’une dynamique unitaire inédite, du NPA à Place Publique.
La prise de parole sans ambiguïtés de François Hollande hier soir, l’adoubement du Nouveau Front Populaire par Raphaël Glucksmann sur France Inter ce matin et le vote favorable à 95% du Conseil National du PS en fin de matinée vont clore cette période d’incertitudes et lancer vraiment la campagne. Alliance, investitures, programme, méthode de désignation du futur Premier ministre, tout est calé, et il semble que le tempo imposé par Macron avec la dissolution, après une longue campagne européenne, ne laisse pas le temps à des candidatures dissidentes de fleurir comme en 2022. Cependant, les candidats à l’investiture déçus par les choix rendus publics par le Front Populaire ce vendredi, disposent de quelques heures pour se déclarer. En tout cas, à Blois, Marc Gricourt a été beau joueur et apporte son soutien à la candidature LFI sur la circo qu’il lorgnait. Certains de ses lieutenants, plus virulents sur les réseaux ces derniers jours, sans remettre en cause les accords s’interrogent sur la capacité du PS à négocier et se mettent en retrait, avec la tentation de rejoindre Place Publique.
La Touraine, terre de contrastes
En Indre-et-Loire, les choses se décantent aussi. Sur la circonscription de Tours, lancement de campagne ce jeudi soir du député écologiste sortant Charles Fournier autour d’associations, syndicats, organisations de jeunes et partis, même si l’absence de pas mal de ténors socialistes a été remarquée. Il aura face à lui l’inénarrable Benoist Pierre, ex-PS, ex-LREM, ex-Territoires de Progrès et désormais Horizons. Ayant réalisé un maigre score aux municipales de 2020 avant de fusionner avec une liste très conservatrice malgré ses promesses de « ni de droite ni de gauche », brouillé avec pas mal de monde localement, notamment les barons Horizons, Benoist Pierre est aussi et déjà candidat pour les municipales de 2026 et doit considérer cette législative comme un moyen d’asseoir sa prééminence à droite, alors que de nombreux autres concurrents se sont déclarés ces dernières semaines. L’investiture de M. Pierre est un peu une surprise, car c’était plutôt Loïc Guilpain qui était pressenti, lui qui a pris du galon à Renaissance en étant sur la liste Hayer aux européennes. Mais il a décliné l’offre sur les réseaux, annonçant sans rire qu’il ne pouvait être candidat parce qu’il avait piscine, une « compétition de natation prévue de longue date » pour être plus précis… Enfin, une jeune étudiante lepéniste, Lisa Garbay, représentera le RN sur Tours, elle qui remplace en catastrophe une figure locale du RN engagée dans des mouvements d’ultra-droite comme l’a révélé Médiapart il y a quelques jours, débarquée en quatrième vitesse pour ne surtout pas entacher l’image du parti “normalisé”.
Dans le reste du département, on en saura davantage dans la journée, mais les députés sortants issus de la majorité présidentielle se représentent tous, y compris Fabienne Colboc qui avait remporté avec moins de 500 voix d’avance la Législative de 2022 face à Laurent Baumel, un socialiste frondeur et unioniste assez connu qui est d’ailleurs investi de nouveau pour cette législative. À noter que LR a beaucoup de mal à trouver des candidats dans un contexte de guerre des chefs et de psychodrame ciottiste, certains cadres comme Fabrice Boisgard (37-05) et Jérôme Tébaldi (37-01) hésitaient à y aller et on les comprend, tout le monde ayant saisi que la perspective était une nouvelle veste. Croisée, bleu marine et avec des boutons dorés, mais quand même. D’ailleurs, ce vendredi soir, LR confirme qu’il n’y aura pas de candidature sur Tours, et juste trois candidatures de témoignage ailleurs avec des jeunes et seconds couteaux envoyés la fleur au fusil.
Sur la circonscription d’Amboise, après maintes péripéties socialistes qui voulaient la place, on retrouve finalement le duel du centre-droitiste Daniel Labaronne, l’ami des chasseurs et des châtelains contre Christelle Gobert, Insoumise et ex-Gilet Jaune. Ambiance garantie. Sur la circonscription de Saint-Cyr-Langeais, c’est le PCF qui présentera un.e candidat.e pour affronter la sortante Modem Sabine Thillaye, avec un RN en embuscade qui pourrait bien ravir ce territoire en présentant son délégué départemental, François Ducamp, notre Bardella local, jeune, lisse, bien sous tout rapport et extrêmement de droite.
Dallas-en-Lochois
Enfin, sur la circonscription Saint-Pierre-des-Corps-Chambray-Loches, c’est mouvementé. C’est Henri Alfandari, héritier du puissant groupe de cliniques privées Saint-Gatien, qui se présente pour Horizons avec l’étiquette majorité présidentielle, suppléé par une héritière Debré, façon soirée de gala du Who’s Who. Face à lui, le maire vaguement socialiste de Chambray, Christian Gatard se serait bien vu y aller en se déclarant rapidement pour tordre le bras au Front Populaire, mais il semble que son goût ancien pour les aventures solo et sa proximité avec la droite de la métropole et notamment Philippe Briand n’inspire pas confiance à ses partenaires, d’autant plus après son accueil glacial de la Nupes en 2022. Ce sera finalement un.e autre Insoumis.e, comme en 2022. Le RN, de son côté, ne présente pas de candidat, annonçant d’emblée soutenir la personne choisie par LR… Personne à ce jour pas encore connue, sachant qu’en 2022 c’était une candidate UDI qui avait été choisie pour représenter la droite sur cette circonscription. Détail troublant, le sénateur LR anti-ciottiste Jean-Gérard Paumier a poussé à la candidature sans étiquette mais clairement à droite d’Emmanuel François, maire de Saint-Pierre-des-Corps qui défraye la chronique depuis 4 ans à cause de sa gouvernance laborieuse et de son style… inimitable. D’ailleurs, dans les heures qui ont suivi, un de ses adjoints à la mairie, réputé électron libre et très ambitieux lui a emboîté le pas et a déclaré sa candidature. Tout comme le candidat surprise du groupuscule de David Lisnard, Nouvelle Energie (si vous connaissez, posez-vous des questions sur votre addiction à la politique). En tout cas, en interne, des responsables de la droite tourangelle s’affligeaient en off du spectacle offert et de ces méthodes dignes des Hauts-de-Seine de la grande époque.
Sur cette circo du sud-Touraine, un LR favorable à une alliance avec le RN sortira-t-il du bois ? Le RN finira-t-il par désigner un candidat d’ici dimanche ? Et s’il n’y a ni LR ni RN, Henri Alfandari dit-il clairement qu’il ne veut pas des voix du RN ? Emmanuel François est-il d’ailleurs mis en orbite pour gêner Alfandari ou pour affronter un éventuel LR soutenu par le RN ? Est-il également là pour couper l’herbe sous le pied de l’ennemie jurée de Jean-Gérard Paumier, Sophie Auconie, qui envisageait de se présenter au centre-droit vu le contexte ouvert ? Suspens et poires tapées.
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