Michel Ferry, gérant de la salle Les Carmes d’Orléans et organisateur, avec Antoine De Baecque, du festival Récidive, nous présente la troisième mouture, Récidive 1989. Elle aura lieu dans les salles du cinéma et à l’Atelier Canopée, du lundi 25 au samedi 31 mars.
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Propos recueillis par Bernard Cassat
Michel Ferry : « C’est très agréable, parce qu’on a l’impression que Récidive commence à rentrer dans les habitudes. Le rendez-vous commence à exister. On n’a pas atteint notre maturité, bien sûr. Il faut un certain temps d’installation… Mais il y a une attente…
Magcentre : Alors pourquoi ce choix de 89 ?
On ne voulait pas être trop près du dernier Récidive, de 68. Pour avoir de vraies notions cinématographiques, de vraies différences, il fallait s’en éloigner. On a hésité, et puis 89 est apparu comme très marquant. Politiquement, le dossier est lourd. J’ai fait un recensement des principaux journaux télévisés de l’année avec l’INA. C’est juste extraordinaire. Ça va des Russes qui quittent l’Afghanistan à la mort de Khomeini en Iran, qui a eu lieu le même jour que celui où les Chinois répriment Tian’anmen. Il y a une visite de Gorbatchev sur la grande muraille de Chine, en train de parader, et quelques mois plus tard la chute du mur. Et les US envahissent le Panama, ce dont on se souvient moins, et destituent Noriega, considéré comme un président dealer. C’est la chute de Ceaușescu en Roumanie, c’est Timisoara en ex-Yougoslavie. Et puis le défilé de Jean-Paul Goude sur les Champs pour le bicentenaire. Donc une année extrêmement riche politiquement.
Do the right thing de Spike Lee
Or une année foisonnante comme cela s’associe souvent à une année riche en cinéma. On voit bien la tendance se confirmer, ce n’est pas directement en lien, mais c’est souvent le cas. La proposition ciné est très forte en 89. Aux Etats-Unis par exemple, Tim Burton, Spike Lee. Des gens qui émergent et qui vont avoir ensuite un rôle important. Mais aussi les anciens toujours actifs, Sidney Lumet avec “A bout de course”, un film sur des gens qui ont fui après des violences militantes des années 70. Dans le ciné français, italien, … Ettore Scola et Nano Moretti. Nouvelle génération qui arrive. En France, Rivette et Assayas, “L’enfant de l’hiver”, un de ses premiers, et “Un monde sans pitié” de Rochant, avec Hippolyte Girardot qui vient présenter à la fois son livre et le film. A chaque fois on a un mélange de cinéma nouveau et ancien. Et on voit bien en 89 la relève de génération.
Palombelle Rossa de Nani Moretti
Séances de l’INA ?
Oui, l’INA est partenaire du festival. On a donc trouvé des films de l’époque… Ou sur 89.
Avant-premières. Principe de choix ?
On essaye d’être dans une actu cinématographique. “Le tableau volé”, de Pascal Bonitzer avec Alex Lutz, sort quelques jours après le festival. “Paris qui dort”, petite incursion en 1889. Le film de René Clair sera accompagné au piano, en partenariat avec le festival Grand Piano Orléans et l’ADRC. Et un bout du “Napoléon” d’Abel Gance remasterisé, projeté au cours d’une conférence de Dimitri Vezyroglou. Sans doute aussi accompagné au piano.
Alex Lutz et Léa Drucker dans Le tableau volé, de Pascal Bonitzer
Margarethe von Trotta, la cinéaste invitée pour recevoir le prix Jean Zay ?
Oui. Elle a failli venir l’an dernier mais finalement elle n’a pas pu, elle était en tournage. Il fallait une alternance homme/femme pour le prix Jean Zay, donc elle nous paraissait incontournable. Tous ses films sont engagés, et c’est vraiment une grande cinéaste des années 70. Et elle fait le lien entre cinéma d’auteur et cinéma grand public. La manière dont elle rend accessible la pensée d’Hannah Arendt, par exemple, c’est absolument remarquable. “Les années du mur“, on n’est pas certain de l’avoir. Il y a pour l’instant un problème de sous-titres. Elle recevra donc le prix Jean Zay. Et donnera une leçon de cinéma !
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