Analyser les Jeux olympiques, confronter les jeux antiques aux jeux modernes, décortiquer une quinzaine de sports, inviter un ou une sportive de haut niveau, tel est le projet de Frédéric Ferrer, artiste conférencier qui sillonne la France depuis 2019 avec 15 spectacles différents.
Par Bernard Thinat
A l’invitation du CDN d’Orléans pour deux soirées au Bouillon, jolie salle de spectacle au sein de l’Université à la Source, Frédéric Ferrer avait choisi la gymnastique artistique, sport que l’on ne voit qu’une fois tous les quatre ans à la télévision et qui réalise toujours beaucoup d’audimat, mais au budget particulièrement restreint.
JO antiques et JO modernes
Dans une première partie de sa conférence, l’artiste remonte le temps jusqu’à l’australopithèque, qui descendu de son arbre, s’est redressé et s’est mis à courir, peut-être poursuivi par quelque lion. Ainsi est né le sport pour survivre, dit-il. Quant aux JO antiques, si on en connaît leur fin, due à une question religieuse (ces JO étant organisés en l’honneur des dieux grecs, un empereur romain converti au catholicisme n’allait pas les laisser perdurer), on n’en connaît guère la date de leur création, sans doute nés dans la mythologie grecque. Frédéric Ferrer connaît très bien son sujet, il manie très adroitement l’humour et ses découvertes historiques, le public suspendu à ses lèvres.
Et par plusieurs anniversaires que l’on fête par des nombres ronds dont il a le secret par assemblages de dates, il en vient aux Jeux modernes et au célèbre Baron Pierre de Coubertin, dont il citera quelques écrits sexistes et racistes, à une époque où les femmes n’avaient pas droit au sport, ni au droit de vote, ni à tout le reste, la liste est longue. Enfin, en parlant de liste, il nous cite des sports ayant disparu depuis longtemps des épreuves des JO modernes, tel le tir au pigeon vivant, de quoi donner la nausée à tous les amis des animaux que nous sommes devenus. Première partie savoureuse et menée sur un excellent rythme parolier.
La gymnastique artistique (sol + appareils)
Dans une seconde partie intitulée « le sol, le parallèle et l’asymétrique », Frédéric Ferrer évoque à l’aide de courtes vidéos, plusieurs figures gymniques, surtout féminines : Olga Korbut aux JO de 1972, annonçant la venue de la superstar Nadia Comaneci à Montréal en 1976, avec la succession des 10 qui s’inscrivent 1.0 sur le tableau d’affichage non conçu pour une note à 2 chiffres entiers.
C’est aussi l’intrusion de la politique, la rencontre de Korbut et Nixon, ou la réception de Comaneci par le « Danube de la pensée », titre dont Ceausescu s’affublait parmi d’autres, et qui a contribué à placer la Roumanie sur le devant de la scène sportive face à l’URSS.
Le conférencier explique alors au public les méthodes de notations des juges, les divers degrés de difficultés des exercices, toujours à l’aide de vidéos, figures portant les noms des gymnastes les ayant créées, notamment l’Américaine Simone Biles, elle aussi auréolée de 4 médailles d’or à Rio en 2016. Et c’est au tour du brésilien Diego Hipólito, champion du monde au sol, et malheureux aux JO, étant par deux fois déséquilibré en toute fin de dernière diagonale, avant de conquérir l’argent chez lui, à Rio. Enfin, de saluer la gymnaste Oksana Chusovitina, 8 Jeux olympiques à son actif, les derniers à Tokyo à l’âge de 46 ans, et sous 3 nationalités différentes (URSS, Allemagne et Ouzbékistan).
Il évoque le cas de ces « femmes enfants » à la puberté retardée et couvertes de médailles lors des JO, bien que depuis 1997, l’âge minimum de 16 ans soit requis pour participer en gymnastique. Mais, on aurait aimé une analyse un peu plus critique des Jeux olympiques, dans le domaine financier ou écologique. Sans doute aurait-il pu nous interroger sur la finalité du sport de haut niveau, quand certains sportifs, agents et responsables de fédérations, se goinfrent à coups de millions gagnés chaque année, voire chaque mois, pendant que d’autres ne gagnent rien ou si peu. Quant au dopage, silence ! Mais ce n’était pas le sujet.
Maëna Millon et Frédéric Ferrer – Photo B.T.
Une invitée en gymnastique rythmique (naguère GRS)
Maëna Millon fait partie de ces sportives qui ne gagnent rien, sauf le plaisir d’affronter les meilleures dans des compétions internationales. Membre de l’équipe de France de gymnastique rythmique (un des très rares sports entièrement féminins), elle sait qu’elle ne participera sans doute pas aux JO, étant remplaçante en équipe, et la France ne possédant qu’une place en individuelle. Âgée de 21 ans, au club de la SM d’Orléans, soutenue financièrement par ses parents, elle s’interroge sur une reconversion après les JO. Invitée sur le plateau par Frédéric Ferrer, elle nous montre les 4 engins qu’elle manie avec adresse, grâce et souplesse : le ruban, les massues, le cerceau et le ballon. Adepte du « six o’clock » sans effort apparent, marchant sur pointes comme des danseuses classiques, Maëna a conquis le public autant par ses démonstrations avec les engins, que par ses explications limpides. In fine, le public a pu lui poser des questions auxquelles elle a répondu avec gentillesse.
Les 15 spectacles d’Olympicorama
Conférencier : Frédéric Ferrer
Cie Vertical Détour
• épreuve 1 – Le 400 mètres
• épreuve 2 – Le disque
• épreuve 3 – Le saut en hauteur
• épreuve 4 – Le 100 mètres
• épreuve 5 – Le handball
• épreuve 6 – Le marathon
• épreuve 7 – Le fleuret, le sabre et l’épée
• épreuve 8 – Le tennis de table
• épreuve 9 – L’haltérophilie
• épreuve 10 – Le quatre de couple sans barreur·se
• épreuve 11 : La mouche et le super-lourd
• épreuve 12 : Le sol, le parallèle et l’asymétrique
• épreuve 13 : Le pistolet tir rapide 25 m et la carabine
• épreuve 14 – La voie de la souplesse
• épreuve 15 – Le breaking et tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur d’autres choses
A venir dans la Région Centre Val de Loire :
Vierzon, théâtre Mac-Nab (épreuve 5), le 17 avril
Châteauroux à l’Equinoxe (épreuve 8), le 23 mai
Châteauroux à l’Equinoxe (épreuve 13), le 24 mai
Prochain spectacle au Centre Dramatique National d’Orléans :
Patatas Fritas Falsas
Jeudi 28 mars à 20 h 30
Vendredi 29 mars à 19 h 30
Avec Agnés Mateus, artiste catalane venue à Orléans l’année passée pour Rebota, Rebota... coup de foudre du public
En espagnol surtitré – Salle Vitez