Entre lobbys et conservatismes, un autre modèle agricole est-il possible ?

Avec les Loir-et-Chériens François Thiollet et Claude Gruffat, EELV compte deux députés européens. Très engagés, ils ont donné le top départ de leur campagne le 24 février dernier à l’Hôtel Bureau à Blois.

Claude Gruffat milite pour une politique agricole commune plus juste. Crédit photo Jean-Luc Vezon.

Par Jean-Luc Vezon


Alors que le Salon de l’agriculture s’ouvrait sous haute tension en pleine crise agricole, les deux députés membres du groupe Verts – Alliance libre européenne (79 députés dont 13 Français) ont profité du conseil politique du parti écologiste pour faire le point sur l’actualité.

En poste depuis le 11 décembre à la suite du décès de Michèle Rivasi, François Thiollet a d’abord rappelé les dossiers sur lesquels il travaille comme celui des petits réacteurs nucléaires modulaires (SMR), « lubie de Macron pour relancer la filière au prix de lourds investissements qui captent les ressources pour les énergies renouvelables », les matières critiques ou encore la transparence des contrats passés par l’UE.

Pilier du groupe au Parlement, ancien président de Biocoop, Claude Gruffat possède une solide expertise des sujets agro-économiques. Il a rappelé que le modèle actuel de la PAC, essentiellement basé sur l’aide à l’hectare, permet à 20 % des agriculteurs de toucher 80 % des aides.

« Un tiers des agriculteurs ne touche pas d’aides et en Europe, c’est un autre tiers de paysans qui vit avec moins de 350 € par mois*. La FNSEA a traité d’autres sujets mais pas celui du revenu », s’insurge le député. Dans le viseur également, la mise en pause d’Ecophyto décidée par le gouvernement sous la pression de la FNSEA.

Une relocalisation des productions

Alors que nous importons 55 % de nos fruits et légumes, 60 % de notre blé boulanger et 70 % de nos protéines végétales, Claude Gruffat plaide pour une relocalisation des productions pour répondre à nos besoins et retrouver notre souveraineté. « La future loi d’orientation va nous emmener dans le mur. Le seul modèle viable c’est l’agroécologie avec une politique ambitieuse de soutien au bio », précise Claude Gruffat en avançant quelques pistes comme le développement des projets alimentaires territoriaux (PAT) pour accélérer les circuits courts et la création de filières. Et cela d’autant plus, que selon lui, « les paysans bio vivent mieux que les agriculteurs conventionnés : + 22 à 36 % ».

Les lobbys en ligne de mire

Les lobbys pharmaceutiques ou agro-industriels « soutenus par Emmanuel Macron » ou les coopératives « qui gagnent leur vie en vendant pesticides et intrants » posent aussi problème. « Quatre multinationales assurent par exemple 91 % des échanges de céréales. Les politiques doivent reprendre la main », révèle Claude Gruffat.

Sur la question du soutien militaire et financier à l’Ukraine, les deux élus sont d’accord pour un soutien sans faille pour faire barrière à la Russie qui menace notre démocratie. « Nous ne pouvons pas faire moins. Notre souveraineté a un prix et les pays baltes, la Pologne sont menacés », insiste François Thiollet en souhaitant « l’entrée de l’Ukraine dans l’UE ».

Pour Claude Gruffat, il faudra aussi négocier des accords agricoles avec l’Ukraine dans le cadre d’une PAC dont le fonctionnement est à revoir et cela d’autant plus « qu’aujourd’hui, une partie de l’agriculture ukrainienne est aux mains de fonds de pension avec des gigas fermes ».

Ce changement en profondeur de l’UE passe clairement par une prise de conscience face au risque de basculement de la majorité européenne avec une montée massive de l’extrême droite qui en cas de succès pourrait devenir le second groupe au Parlement.

« Il y a clairement un risque d’avoir un Parlement européen anti-européen le 9 juin prochain. Nous allons nous battre pour contenir l’extrême droite » a conclu François Thiollet qui travaille au côté de Marine Tondelier en tant que secrétaire national adjoint d’EELV.

*Chiffre de 2017 et martelé par de nombreux politiques, il provient de la Mutualité sociale agricole mais est contesté par plusieurs spécialistes du milieu agricole.

François Thiollet a succédé à Michèle Rivasi comme député européen le 11 décembre dernier. Crédit photo Jean-Luc Vezon.

Jean-Loup Michel, nouveau co-secrétaire départemental

Alors que « les 100 jours » approchent, ce Vendômois âgé de 51 ans, ingénieur en génie civil de métier, est déjà sur le pont en vue de la campagne européenne. Les Verts espèrent créer une nouvelle fois la surprise et faire mieux que les 13,4 % des voix obtenues en 2019.   

Un certain nombre d’actions de mobilisation seront mises en place comme les Ap Euro (apéro europe). « Nous voulons nous rapprocher des électeurs en particulier des jeunes sensibles aux questions de justice sociale et d’écologie », a déclaré le cadre du parti en annonçant l’arrivée d’un salarié en région qui sera basé à Blois.

Sur la fiscalité, EELV défend par exemple une taxation des revenus des plus riches allant de 0,5 % (> à 3.6 M€) à 1,7 % (>15 M€) qui rapporterait jusqu’à 213 Mrds. Précisons que lors du dernier forum de Davos, 260 millionnaires et milliardaires ont demandé à être taxés.  

En appui aux élus, il entend aussi poursuivre les discussions localement avec les partenaires de la Nupes. A noter enfin qu’une co-secrétaire sera désignée prochainement dans le cadre d’une gouvernance collective.

Plus d’infos autrement sur Magcentre: L’eurodéputée Renew Fabienne Keller lance la bataille des européennes

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