Stabat Mater à la Scène nationale d’Orléans : aux antipodes spatio-temporels

Un concert hors du commun a été offert aux spectateurs ce mardi 13 février, avec une juxtaposition très originale des musiques de Domenico Scarlatti (1685-1757) et Antonín Dvořák (1841-1904) magnifiquement orchestrées par Simon-Pierre Bestion et royalement servies par des interprètes de haut niveau de l’ensemble La Tempête. Un nom à retenir.

L’ensemble La Tempête. Photo Hubert Caldagues



Par Anne-Cécile Chapuis


Le concert démarre dans la salle côté cour, dans l’intimité et dans le noir d’où fusent quelques notes et accords de théorbe, bientôt rejoint par les voix qui dessinent un prologue progressif vers ce qui nous attend : au-delà de son originalité, le concert est placé sous le signe de la qualité.

Avec une longue procession dans toute la salle Touchard, les 25 choristes rejoignent la scène où, furtivement, se sont installés les 22 musiciens de l’orchestre. L’éclairage est à l’image de cette longue introspection vers la douleur, façon torches verticales entre chaque pupitre, et pose le décor des Stabat Mater « Debout la Mère des douleurs se tenait en larmes près de la croix où pendait son Fils ».

Un enchantement de surprises

La musique est prenante et les numéros d’opus vont se succéder dans un étrange ballet empli de surprises, avec une mise en espace qui balaie toute la grande salle Touchard, des alternances de soli et chœur du plus bel effet, un orchestre à cordes à géométrie variable, un continuo assuré alternativement par le piano ou l’orgue positif et théorbe. Tout est savamment pensé, y compris avec une incursion dans une séquence grégorienne, dans des arrangements pertinents comme dans une utilisation de l’espace qui donne un relief inédit à la musique.

La première originalité est celle de réunir Dvořák et Scarlatti, deux compositeurs aux antipodes temporels et spatiaux et pourtant… Dans ce concert sans interruption où leurs musiques s’entrecroisent, on cherche à les départager, on hésite et quand on y parvient, on n’y attache plus aucune importance : l’essentiel est dans la musique harmonieuse qui coule de source.

Simon-Pierre Bestion à la conception, arrangements, direction

Simon-Pierre Bestion, chef d’orchestre, à la rencontre du public à l’issue du concert du 13 février au Théâtre d’Orléans. Photo AC Chapuis


Ce jeune chef d’orchestre au palmarès et expériences conséquentes réalise ici une véritable création. Il nous explique les choix de cette étonnante juxtaposition par la rencontre avec un ouvrage sur la réincarnation qui le passionne, et vient faire clé de voûte entre deux œuvres qu’il travaillait précédemment. Lui vient alors l’idée de réunir les deux compositeurs chez lesquels il avait déjà dépisté les ressemblances : similitudes de style malgré plus d’un siècle d’écart, même tonalité, parallèles d’événements dramatiques vécus par les deux musiciens, même approche de la voix. Commence alors pour lui la construction de l’édifice : « J’ai choisi d’augmenter la version de Scarlatti et de diminuer la version orchestrale de Dvořák », explique Bestion.

En situation, il tient l’ensemble à bout de gestes et de regards, sans partition ni baguette, et nous offre un concert inoubliable de brio et d’émotion qu’on ne demande qu’à réentendre.

La Tempête en fin de concert à Orléans. Photo AC Chapuis

Un prochain spectacle à Orléans

L’ensemble La Tempête, créé en 2015, est d’une qualité exceptionnelle, tant par les voix que les cordes. Il revient à Orléans dans un partenariat avec la Scène les mercredi 17 et jeudi 18 avril avec le Stabat Mater de Domenico Scarlatti dans une « composition inouïe en forme de théâtre musical pour 4 comédiens et 10 chanteurs instrumentistes ».

Rendez-vous est pris pour une musique revisitée et aux mains des plus grands interprètes.

Pour en savoir plus : Theatredorleans.fr/agenda/stabat-mater


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