Crise du logement : la cohabitation, le retour d’une tradition ancienne

Le Centre-Val de Loire comme de nombreuses régions s’ouvrent aux charmes de la cohabitation. Dans une étude publiée cette semaine, l’Insee confirme néanmoins la persistance de disparités régionales : on cohabite plus facilement sur les bords de la Méditerranée que sur les rives de la Loire. Et ce depuis longtemps !

La colocation revient à la mode. Illustration/Pexels

Par Zoé Cadiot


Contrairement à certaines idées reçues, la colocation, popularisée notamment par des émissions mythiques comme la série américaine « Friends » n’est pas un phénomène nouveau. Elle est même dans certaines régions, et depuis longtemps, une spécificité locale tant la répartition des ménages dits complexes en langage statico-administratif, c’est-à-dire hors de la cellule familiale classique, est inégale sur le territoire. Au point d’y voir une déclinaison inattendue de la « sociabilité méridionale » ?

« Qu’en dira-t-on »

Longtemps boudé en région Centre-Val de Loire et dans une grande partie de la France, comme l’attestent les nombreux travaux de l’Institut national des études démographiques (Ined) et de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), le partage d’habitat entre personnes vivant sous le même toit, sans avoir obligatoirement un lien parent-enfant, ni un lien de couple entre-elles, était chose banale dans les DOM, la Corse, le sud de la France et en Ile-de-France. Après un accident de la vie, un veuvage ou simplement en quête d’une nouvelle sociabilité, il n’était pas rare de se tourner vers ce type de solution sans risquer les « qu’en dira-t-on ».

Une formule moins plébiscitée

Aujourd’hui, le réflexe est moins automatique même si on ne craint plus les mauvaises langues. En trente ans, selon la dernière étude de l’Insee sur le partage du logement en dehors du noyau familial, publiée mi-janvier, la formule est moins plébiscitée. La part des ménages complexes a chuté en France : elle est passée de 6,4 % en 1990 à 3,7% en 2020. Soit 2,5 millions de personnes. Un recul qui s’explique notamment par une nette diminution des ménages complexes sans noyau familial. La cohabitation entre copains et/ou colocs peut en effet s’avérer difficile à l’usage. Comme le relève l’adage : « Un colocataire idéal est un colocataire aux abonnés absents ».

Intérêt des investisseurs

Associé à un mode de vie « fun », le partage du logement s’inscrit dans une réalité autre. Il répond aujourd’hui à des impératifs plus économiques que philosophiques. Nombre d’actifs en intérim ou en CDD aux revenus faibles ou incertains, vivant avec femme et enfant, avouent sans ambages avoir opté pour la formule qui permet de se loger à moindre coût. Pour d’autres, cette manière d’habiter en ouvrant son intimité à un inconnu ou à un parent proche est avant tout une solution de logement subie. La difficulté de trouver un appartement, de répondre aux attentes des propriétaires poussent ces locataires directement dans les bras de la cohabitation, surtout dans les grandes villes ou les bassins d’activité. Ainsi de nombreuses villes ont vu leur offre se développer. A Tours, Orléans, comme dans de nombreuses cités universitaires, le parc s’est considérablement développé. Au point de susciter un intérêt des investisseurs. Il faut dire que jusqu’aux années 90, selon l’étude de l’Insee, les ménages complexes étaient sous-représentés en ville, optant davantage pour la campagne.

Nouvelle génération

De retour en ville, ces ménages complexes sans noyau familial ne modifient pas réellement l’image du colocataire que nous avons. Dans une grande majorité de cas, ces ménages sont toujours composés de jeunes de moins de trente ans sans relation de couple, ou d’attache familiale. A la trentaine passée, il semblerait néanmoins que l’appel du vert se fasse de nouveau entendre. Il n’est pas rare de voir en effet de grandes propriétés habitées par ces cohabitants « friendly », heureux d’avoir plus d’espace sans avoir à ouvrir davantage son portefeuille.

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