Pierre et le loup sortent du bois !

Nous étions prévenus, le spectacle était interdit aux moins de 16 ans. Un comble pour ce conte musical pour enfants de Sergueï Prokofiev, mais Clément Joubert avait tout prévu avec trois versions pour les petits, les grands et les avertis, données successivement au Théâtre Gérard Philipe d’Orléans La Source les 29 et 30 septembre 2023.

Par Anne-Cécile Chapuis

Pierre et le loup au Théâtre Gérard Philipe Orléans La Source. Photo AC Chapuis


La version trash est signée Hugo Zermati. Cet acteur/auteur/metteur en scène est connu du public orléanais où, après des études au conservatoire d’Orléans, il se produit régulièrement. On le croise avec le Krizo théâtre, la Tête noire, les fous de Bassan, et il a récemment produit « Les Hugolettes » au printemps dernier au Bouillon Orléans La Source.

Hugo Zermati chante “le mal aimé” de Claude François. Photo AC Chapuis


Il collabore également avec la musique de Léonie et Clément Joubert, avec un souci commun de dépoussiérer la musique et les textes afin de leur restituer, dans un tourbillon parfois infernal, toute leur saveur.

Et cette fois-ci, c’est Pierre et le loup qui est sur le devant de la scène.

Des musiciens au taquet

Dans un décor créé par les élèves du Lycée Charles Péguy, les musiciens de l’Inattendu prennent place. Fustigés par le narrateur qui les traite de médiocres, malades, incapables et autres noms d’oiseaux (sic !) ils font grise mine. Mais c’est du second degré, et ils se prêtent volontiers à la mise en scène, répétant leurs traits en plusieurs dimensions, acceptant les invectives et allant même jusqu’à jouer le dindon (de la farce ?) et sauront se rebeller. Avec brio l’orchestre donne la réplique au narrateur, dans une partition revisitée qui va de Prokofiev (bien sûr) à Wagner, en passant par les musiques publicitaires ou Claude François !

Rébellion et vengeance des musiciens. Photo AC Chapuis


Un comédien infatigable

Hugo Zermati est époustouflant. Il déménage, dérange, dévie parfois, désobéit beaucoup. Il s’affranchit rapidement du texte initial écrit par Serge Prokofiev, en insérant parmi les animaux de l’histoire une cigale, un dindon, un escargot et le porc noir de Bigorre. C’est franchement hilarant et la salle répond instantanément avec rires, exclamations, applaudissements. L’énormité du propos émis par un acteur que rien n’arrête emplit la salle, prend parfois toute la place sur un orchestre pourtant excellent, mais réjouit le public. De jeux de mots en allusions salaces, de provocations en critiques sociales subtiles, c’est une soirée qui emmène, embarque, embrouille… À noter une sublime interprétation de La mort du loup d’Alfred de Vigny, dans un éclairage tout de rouge au diapason avec la musique et les vers.

Un loup qui passe du virulent au pathértique. Photo AC Chapuis


Le spectateur sort secoué, un peu déconcerté, mais ravi de cette heureuse rencontre entre théâtre et musique, dans un élan partagé et revisité qui fait sortir la musique… du bois et donc des sentiers battus !

Pour en savoir plus :

Comédie jubilatoire pour un duo d’artistes

Un « songe d’une nuit d’été » décalé et déjanté

L’Inattendu à Orléans Saint-Marceau

Commentaires

Toutes les réactions sous forme de commentaires sont soumises à validation de la rédaction de Magcentre avant leur publication sur le site. Conformément à l'article 10 du décret du 29 octobre 2009, les internautes peuvent signaler tout contenu illicite à l'adresse redaction@magcentre.fr qui s'engage à mettre en oeuvre les moyens nécessaires à la suppression des dits contenus.

Centre-Val de Loire
  • Aujourd'hui
    1°C
  • vendredi
    • matin -2°C
    • après midi 2°C
Copyright © MagCentre 2012-2024