Le 28 septembre dernier, les personnalités, Alain Claeys, Régis Aubry et Bernard Reber, invitées par le groupe de réflexion « Sciences et conscience » de la faculté de droit et le Comité éthique du CHR d’Orléans, ont éclairé avec prudence, tact et talent le difficile sujet : « La fin de vie : enjeux éthiques, demande sociale et évolutions législatives ».
Par Jean-Paul Briand
« Cette nouvelle loi doit être simple »
L’ancien député Alain Claeys et membre du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a débuté la conférence. Il a remémoré les quatre lois adoptées depuis 1999 sur la fin de vie. Lois mal appliquées car méconnues : en 1999, le droit aux soins palliatifs fut introduit, puis la loi Kouchner de 2002 a permis aux patients de refuser un traitement. En 2005 la loi Leonetti introduit l’interdiction de l’obstination déraisonnable. En 2016 le texte dont il est co-auteur, dite loi Claeys-Leonetti, clarifiait l’usage de la sédation profonde et continue jusqu’au décès. Ces quatre lois ont profondément modifié les droits des citoyens, néanmoins, concernant une dépénalisation de l’aide active à mourir, fort de son expérience parlementaire, Alain Claeys conseille : « Si on veut arriver à un texte accepté et compris par tous, cette nouvelle loi doit être simple ».
« Comment faire face à ces situations de grande vulnérabilité fabriquées par les progrès médicaux ? »
Régis Aubry, professeur de médecine, chef de service en gériatrie, spécialiste des soins palliatifs et rapporteur du CCNE a pris la parole après l’ancien député. Il a souligné que « la fin de vie aujourd’hui n’est plus la même qu’hier ». Le progrès des techniques médicales, « mais est-ce encore un progrès ? » s’interroge le professeur, amène les médecins, les patients et la société à être confrontés à des situations totalement inédites auparavant. Aujourd’hui on peut survivre avec des maladies dont on ne peut guérir et qui autrefois étaient rapidement mortelles. « Nous n’avons pas pensé que des patients vivaient difficilement aujourd’hui avec une maladie inguérissable », déplore le docteur Aubry. Puis il questionne : « Comment faire face à ces situations de grande vulnérabilité fabriquées par les progrès médicaux ? ». « Si au nom de la liberté on se contentait d’une loi sur l’euthanasie, sans l’accompagner d’une prise en charge de la grande vulnérabilité, on aura échoué », prévient Régis Aubry.
La Convention citoyenne « doit éclairer le débat parlementaire à venir »
Le philosophe Bernard Reber a parlé en dernier. Ce chercheur au CNRS et à Sciences Politique de Paris était l’un des quatre garants qui ont veillé sur la bonne tenue des débats de la Convention citoyenne sur la fin de vie. Malgré les divergences et la complexité du problème, il témoigne que les participants ont su dépasser leurs désaccords et toujours respecter les principes de la convention citoyenne : sincérité, égalité, transparence et respect de la parole citoyenne. La question posée par la Première ministre Élisabeth borne était : « Le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d’éventuels changements devraient-ils être introduits ? » Pour Bernard Reber la réponse des citoyens n’est pas aussi tranchée qu’on a voulu le faire croire. Si les conventionnistes se sont prononcés pour une évolution du droit vers une aide active à mourir à 75,6%, Bernard Reber tient à souligner que « cette position majoritaire l’est avec de nombreuses nuances » que l’on peut consulter dans le Rapport de la Convention Citoyenne sur la fin de vie. La Convention a été un succès aussi « elle doit éclairer le débat parlementaire à venir », souhaite Bernard Reber.
« Faire société entre tous ses membres »
Le public est venu nombreux à cette conférence. Le thème choisi est clivant. Il touche intimement chacun d’entre nous. Il exige que politiques, juristes, médecins et citoyens dialoguent et échangent leurs savoirs, leurs expériences, leurs sentiments afin de « faire société entre tous ses membres » a rappelé la modératrice de la conférence.
C’est un sujet d’actualité : Il y a quelques jours, la ministre déléguée auprès du ministre de la Santé et de la Prévention, Agnès Firmin-Le Bodo, a remis au chef de l’Etat une première version d’un texte de loi sur un droit à l’accès au suicide ou à l’aide active à mourir.
« La vérité appartient à ceux qui la cherchent et non point à ceux qui prétendent la détenir » Condorcet
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