Orléans : école de la bienveillance contre école du gaspillage ?

La ville veut pénaliser les parents pour les absences de leurs enfants à la cantine. Toute l’opposition se mobilise vent debout contre cette mesure qui sera pourtant mise en application.

Par Jean-Jacques Talpin


Le gaspillage alimentaire est un mal considéré comme aujourd’hui insupportable.
 C’est vrai dans nos foyers comme dans toutes les structures de restauration collective et en particulier scolaire. Avant l’été le conseil municipal d’Orléans avait approuvé un nouveau règlement intérieur de la restauration scolaire instaurant notamment une pénalité de 5 euros pour les parents ne prévenant pas, ou trop tard, des absences de leurs enfants à la cantine. Un délai de prévenance de 5 jours avait été décidé, ce qui a entraîné la mobilisation d’un collectif de parents d’élèves et une pétition signée par plus de 1 100 personnes jusqu’à présent. Ce collectif présent lundi soir devant l’hôtel de ville (voir encadré) où se tenait une séance du conseil municipal dénonce notamment une « mesure injuste » et contraire à « l’école de la bienveillance ». Pour la ville ce délai de prévenance et cette pénalité doivent avant tout permettre de lutter contre le gaspillage alimentaire tout en favorisant une meilleure organisation des agents municipaux. 

Rassemblement des parents d’élèves devant la mairie. Photo Magcentre

Aujourd’hui dans les 67 écoles de la ville, 200 repas sont jetés quotidiennement, soit près de 30 000 repas perdus chaque année pour un coût annuel de 210 000 euros. « Si l’on ajoute les impayés, explique Serge Grouard, c’est une perte de 400 000 euros chaque année ». Cette pénalité de 5 euros servirait donc à « responsabiliser les parents » en les incitant à mieux prévenir la ville des absences de leurs enfants. Une mesure considérée comme juste alors que la ville revendique une « politique scolaire exemplaire » : alors que le prix de revient d’un repas atteint 7 euros, les familles les plus modestes ne règlent que 57 centimes avec une gradation allant jusqu’à 4 euros par repas.

« Souplesse et indulgence »

Toute la gauche s’est mobilisée vent debout contre ce projet en demandant notamment un report de la décision et l’engagement d’une « véritable concertation ». « À quoi servent les parents d’élèves ? », s’interroge Ghislaine Kounowski en regrettant que les associations de parents aient été mises devant le fait accompli. À demi-mot Serge Grouard reconnaît que cette concertation ait été « imparfaite » et annonce que la ville « va prendre le temps nécessaire pour discuter avec les parents ». En attendant, la majorité municipale concède tout de même deux modifications au règlement : d’une part la sanction financière pour la cantine ne sera finalement appliquée qu’à partir de la troisième absence non justifiée. D’autre part le plafonnement à 5 euros des pénalités pour les activités périscolaires hors restauration qui étaient dans un premier temps cumulables.

Mais alors que Baptiste Chapuis (PS), Jean-Philippe Grand (EELV) et plusieurs élus de gauche demandent de concert une suspension du règlement intérieur, Serge Grouard préfère aller de l’avant. Il est vrai qu’il est secondé par les poids lourds de la ville comme Charles-Éric Lemaignen ou Florent Montillot qui viennent appuyer la mesure avec des arguments déjà entendus : « La restauration scolaire n’est pas un drive où l’on vient quand on veut ou quand on peut », « la cantine n’est pas un dû », « que ceux qui abusent du système cessent d’abuser du système ! » Plus que pour lutter contre le gaspillage, il s’agit donc de « responsabiliser les parents ». Et de citer en renfort l’exemple de Saint-Jean-de-Braye où la municipalité socialiste a adopté un délai de prévenance de 7 jours et une pénalité de 12 euros par absence. Finalement Serge Grouard en revient à une « solution apaisée » comme le demande Dominique Tripet (PCF) en adoptant le nouveau règlement intérieur mais en promettant une négociation avec les parents d’élèves. Fidèle à sa nouvelle image d’homme consensuel qu’il veut faire partager, Serge Grouard promet que ce règlement sera appliqué avec « souplesse et indulgence ». Du Grouard soft…

Des parents venus « mettre la pression » sur les élus


En amont du conseil municipal, une soixantaine de parents d’élèves, venus pour certains avec leurs enfants, s’étaient donné rendez-vous devant la mairie pour manifester leur mécontentement vis à vis des nouvelles mesures de la rentrée. Postés aux portes du bâtiment une demi-heure avant la séance, ils souhaitaient intercepter les élus pour pointer « le manque de concertation considéré comme le cœur du problème » dans l’élaboration du nouveau règlement. Distributions de courriers et cartons rouges à destination des élus étaient prévues mais seuls quelques-uns de l’opposition ont bien voulu se présenter pour échanger avec eux. En revanche le temps de la consultation et des discussions nécessaires avec les parents d’élèves concédées par Serge Grouard lui-même lors du conseil municipal n’étaient visiblement pas d’actualité pour tout le monde. Notamment pour le premier-adjoint Florent Montillot qui n’a pas traîné au moment d’esquiver les interpellations des parents et leurs vaines demandes de dialogue. Une réunion de la coordination des associations et collectifs de parents d’élèves doit décider de la suite de l’action à mener. Un recours juridique est notamment envisagé puisqu’un rendez-vous avec le défenseur des droits est prévu ce mardi 26 septembre.

Quelques élus (ici Baptiste Chapuis) ont échangé avec des parents. Photo Magcentre

Plus d’infos autrement sur Magcentre : Cantines scolaires à Orléans : la note pourrait être salée pour les parents

Commentaires

Toutes les réactions sous forme de commentaires sont soumises à validation de la rédaction de Magcentre avant leur publication sur le site. Conformément à l'article 10 du décret du 29 octobre 2009, les internautes peuvent signaler tout contenu illicite à l'adresse redaction@magcentre.fr qui s'engage à mettre en oeuvre les moyens nécessaires à la suppression des dits contenus.

  1. Bonjour,

    j’invite cordialement monsieur Talpin a venir rencontrer la “soixantaine” de familles (d’où sort ce chiffre ?) qui ont signé la pétition… En fait non, monsieur Talpin, nous sommes une soixantaine à avoir signé un courrier remis hier soir à la municipalité.
    Pour ce qui est de la pétition lancée par une maman de La Source, accessoirement aide soignante, elle atteint à la rédaction de ce commentaire, 1101 signatures !
    Soit juste 1041 de plus que ce que vous écrivez.

    N’hésitez pas à prendre contact avec notre collectif, vous aurez les bonnes informations nous concernant, en plus de celles du cabinet du maire…

    Bonne journée !

Les commentaires pour cet article sont clos.

Centre-Val de Loire
  • Aujourd'hui
    • matin -2°C
    • après midi 2°C
  • samedi
    • matin 1°C
    • après midi 6°C
Copyright © MagCentre 2012-2024