Dans Vol de nuit, en 1931, Antoine de Saint-Exupéry affirmait : « Victoire… défaite… ces mots n’ont point de sens. La vie est au-dessous de ces images et déjà prépare de nouvelles images. Une victoire affaiblit un peuple, une défaite en réveille un autre. » Alors que le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a utilisé le terme d’écoterrorisme pour qualifier les manifestants de Saint-Soline, voici une sélection de livres qui permet de comprendre un phénomène beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît.
Par Hakim Aoudia CulturAdvisor
Notre Dame des Landes sce Wikipedia
“L’affrontement qui vient” d’Anthony Cortes & Sébastien Leurquin aux éditions du Rocher
La crise climatique est déjà là : records de températures, pénuries d’eau, incendies, fonte du permafrost, érosion des côtes, extinctions massives…
Face à ces constats effrayants et de plus en plus rapprochés, une vague d’écoanxiété se répand dans la population. En réaction, bon nombre de militants écologistes organisés en divers groupes mènent des actions de plus en plus “radicales”. Ils savent qu’agiter des banderoles, marcher pour le climat ou signer des pétitions ne sauveront pas la planète. Les petits gestes, les discours des politiques, ou la croissance verte, ces engagés n’y croient plus. L’heure est à la désobéissance civile, à l’action directe, aux sabotages partout sur le territoire. Voire à l’insurrection ?
Pour mener à bien cette enquête, les auteurs ont réalisé une série de reportages dans les lieux où la colère monte. A Bure, où l’État prévoit de sacrifier un territoire pour y enfouir les déchets radioactifs produits par son parc nucléaire. A Pertuis, où un projet d’agrandissement de ZA sur des terres agricoles a entraîné l’implantation d’une ZAD… Autant de bras de fer et de combats locaux qui dessinent un véritable front de lutte à l’échelle nationale.
Pendant ce temps, sous les dorures des ministères, on s’active pour organiser la réponse et contrer ce que l’État considère comme une menace. Renseignement, surveillance, répression, condamnations… D’un côté, on multiplie les actions et on se demande jusqu’où il faudra aller. De l’autre, on fiche, on intimide et on réprime. Une plongée inédite au cœur d’un affrontement probablement inéluctable.
Juliette est une jeune militante écologiste, fragile et idéaliste. Elle participe à une opération commando pour libérer des animaux de laboratoire. Cette action apparemment innocente va l’entraîner au cœur d’un complot sans précédent qui, au nom de la planète, prend ni plus ni moins pour cible l’ espèce humaine.
L’agence de renseignements privée « Providence », aux États-Unis, est chargée de l’affaire. Elle recrute deux anciens agents, Paul et Kerry, qui ont quitté les services secrets pour reprendre des études, l’un de médecine, et l’autre de psychologie. Leur enquête va les plonger dans l’univers terrifiant de l’écologie radicale et de ceux qui la manipulent. Car la défense de l’environnement n’a pas partout le visage sympathique qu’on lui connaît chez nous.
La recherche d’un Paradis perdu, la nostalgie d’un temps où l’homme était en harmonie avec la nature peuvent conduire au fanatisme le plus meurtrier.
Depuis vingt ans sont apparus des mouvements contestataires agissant au nom de l’éthique : altermondialisme, écologie, défense des droits des animaux.
S’ils s’expriment majoritairement à travers des actions légales, ils ont cependant donné naissance à des groupes radicaux partisans d’attaques violentes et à des groupuscules terroristes n’hésitant pas à recourir à des actions« armées ». Ce phénomène porte un nom : écoterrorisme.
Depuis le début des années 1990, les Black Blocs livrent une véritable guérilla urbaine aux forces de l’ordre et le Front de libération des animaux ou le Front de la libération de la terre multiplient les actes criminels – sabotages, attentats ou meurtres –, ciblant les entreprises et le « pouvoir de l’argent ». Ils figurent aujourd’hui, aux états-Unis et en Grande-Bretagne, sur la liste noire des organisations terroristes au même titre que Daech et Al-Qaïda.
La France est encore peu touchée mais tout laisse craindre que se développent dans un avenir proche des campagnes violentes dans l’Hexagone. Les événements de Sivens, Roybon et Notre-Dame-des-Landes en sont les signes annonciateurs.
“Le Gang de la clef à molette” d’Edward Abbey aux éditions Gallmeister
Révoltés de voir le somptueux désert de l’Ouest défiguré par les grandes firmes industrielles, quatre insoumis décident d’entrer en lutte contre la “Machine”.
Un vétéran du Vietnam accro à la bière et aux armes à feu, un chirurgien incendiaire entre deux âges, sa superbe maîtresse et un mormon nostalgique et polygame commencent à détruire ponts, routes et voies ferrées qui balafrent le désert. Armés de simples clefs à molette – et de quelques bâtons de dynamite –, ils doivent affronter les représentants de l’ordre et de la morale lancés à leur poursuite.
Commence alors une longue traque dans le désert.
À la faveur de la primaire écologiste, la percée spectaculaire de Sandrine Rousseau face à Yannick Jadot a marqué l’irruption sur le devant de la scène politique de la branche la plus radicale de l’écologie.
Activistes du climat, écoféministes, militants de la décroissance, zadistes, commandos anti- 5G… Sur fond d’urgence climatique, les nouveaux croisés de la révolution verte sont de plus en plus nombreux à donner de la voix.
Qui sont-ils ? Des rebelles d’Extinction Rebellion aux survivalistes écolos, des théoriciens du « modèle amish » aux communautés néo-utopistes, des apôtres de l’apocalypse climatique aux jusqu’au-boutistes de la cause animale, cette enquête nous plonge dans la galaxie étonnante des ultras de l’écologie.
“Siècle bleu, tome 1 : Le rêve de Gaïa” de Jean-Pierre Goux aux éditions Actes Sud
L’organisation clandestine Gaïa est prête à tout pour sauver la planète et l’humanité quitte à fomenter des opérations spectaculaires qui les font passer pour de dangereux terroristes auprès des gouvernements. Quitte à leur servir de bouc-émissaires pour dissimuler des scandales d’État.
Devenu ennemi public n°1, Abel, son fondateur, n’a d’autres choix que de faire éclater la vérité, au risque d’accélérer dangereusement la fin des hommes. À moins que ce ne soit que le début d’une nouvelle utopie.
Et si les « Faucheurs volontaires » d’OGM n’étaient que l’avant-garde de poussées radicales écologistes à venir ? Face aux urgences des crises écologiques, il semble n’y avoir pour l’instant que verdissement de discours ou récupérations variées. Voilà qui peut inciter des esprits motivés et ardents à recourir à l’action directe, à considérer, par exemple, selon les termes de l’écrivain américain E. Abbey, que si le monde sauvage est désormais hors-la-loi, seuls les hors-la-loi peuvent sauver le monde sauvage.
Cet ouvrage se place dans une telle hypothèse et passe en revue quelques-unes des questions pouvant alors se poser. Dans quelles conditions la désobéissance, dans un État de droit, est-elle légitime ? La non violence doit-elle inclure les objets ? Quelles sont les limites des interventions légalistes ? Qu’est-ce qu’une action directe ? Les véritables éco-terroristes sont-ils ceux qui empêchent des saccages de nature ou bien plutôt ceux qui parsèment la planète de poisons ?
Cette étude décrit également quelques mouvements d’action directe, surtout anglo-saxons, comme par exemple l’ONG centraliste Greenpeace ou encore Earth First ! des années 1980, la référence encore maintenant, etc.
Préparons-nous au débat.
Après des années passées seule dans la forêt à étudier les arbres, la botaniste Pat Westerford en revient avec une découverte sur ce qui est peut-être le premier et le dernier mystère du monde : la communication entre les arbres. Autour de Pat s’entrelacent les destins de neuf personnes qui peu à peu vont converger vers la Californie, où un séquoia est menacé de destruction.
Au fil d’un récit aux dimensions symphoniques, Richard Powers explore ici le drame écologique et notre égarement dans le monde virtuel.
Son écriture généreuse nous rappelle que, hors la nature, notre culture n’est que ” ruine de l’âme “.