PPL sur l’accès aux soins : une loi pour rien ?

Le député Valletoux qui fut pendant 11 ans le président de la Fédération hospitalière de France, réunissant la quasi-totalité des établissements de santé du secteur public, a fait une proposition de loi (PPL) « visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels ». Va-t-elle résoudre les difficultés actuelles des patients ?

Par Jean-Paul Briand

Après son passage en commission, la PPL Valletoux était examinée à partir du 12 juin 2023. La grande crainte des médecins libéraux était que des amendements à cette PPL, portée par un ardent défenseur du service public, les pénalisent et limitent leur précieuse liberté d’installation. Cette hantise était générée par un groupe transpartisan de 53 députés mené par le socialiste Guillaume Garot. On y retrouve 8 élus des départements du Centre-Val de Loire : Philippe Vigier, Nicolas Sansu, Christophe Marion, Nicolas Forissier, Loïc Kervran, Anthony Brosse, Mathilde Desjonquères et Charles Fournier. Ce groupe, n’ayant pu déposer sa PPL « contre les déserts médicaux », avait la ferme intention de durcir celle de Fréderic Valletoux en exigeant une sélection à l’installation. La loi Valletoux a été votée en première lecture dans la nuit du 15 au 16 juin sans y inclure de contrainte à l’installation ou au conventionnement. Cette déclaration de guerre à la médecine libérale a été évitée mais quels sont les changements substantiels apportés par la « loi Valletoux » aux patients ?

Des réunions supplémentaires

Ce sont les conseils territoriaux de santé (CTS) revisités qui vont désormais élaborer l’offre, l’accès aux soins et la permanence des soins (PDS). Si on ne sait pas les périmètres d’influence de ces CTS nouvelle mouture qui, d’après le député Valletoux, « ne doivent pas forcément correspondre aux limites des départements », on peut être certain qu’il leur faudra beaucoup de chaises et une grande table. Les invités y sont nombreux : chaque CTS devra en effet réunir le représentant de l’État du département, le directeur de l’agence régionale de santé (ARS), des directeurs des organismes locaux d’assurance maladie, des députés et sénateurs, des représentants des collectivités territoriales, des représentants des services départementaux de protection maternelle et infantile, des représentants des établissements de santé et médico-sociaux, des représentants des maisons et centres de santé, des représentants des communautés professionnelles territoriales de santé, des représentants des professionnels de santé, des représentants des usagers, etc. La maladie française de la réunionnite n’est pas sur la voie de la guérison.

Quelques aménagements… 

Un article concernant la permanence des soins peut être interprété comme un timide retour à l’obligation des gardes. Les praticiens des cliniques privées seront contraints de participer à la PDS le soir, le week-end et les jours fériés. Par ailleurs les médecins libéraux ne pourront plus retirer leur plaque du jour au lendemain : ils devront communiquer, à l’ARS et au Conseil de l’Ordre, l’arrêt de leur exercice libéral six mois au préalable, sauf en cas de force majeure. Afin de lutter contre les dérives de professionnels à l’affût des aubaines financières, la nouvelle loi prévoit que les bénéficiaires d’exonérations, d’aides à l’installation ou conventionnelles ne puissent de nouveau en bénéficier qu’après un délai de dix ans. Durant l’année qui suit le départ de leur médecin ou si l’assuré change de département, les patients qui ne peuvent pas retrouver de médecin traitant ne paieront plus la majoration exigée par l’Assurance-maladie.

…et des nouveautés

Un statut d’infirmier référent a été instauré. Les patients chroniques pourront choisir un(e) infirmier(e) autorisé à réaliser le renouvellement d’ordonnances, pratiquer des gestes courants de diagnostic ou des actes de prévention.

Un autre amendement paraît anodin mais il peut bouleverser le système de soins français. Les ARS seront autorisées à recruter et salarier des médecins dans les zones déficitaires. Ceux qui souhaitent que les professionnels de santé de première ligne (généraliste, sage-femme, psychologue, pédiatre) appartiennent à un service public régalien y verront là une avancée fondatrice…

Après son passage par le Sénat puis sa deuxième lecture à l’Assemblée nationale, cette « loi Valletoux » va-t-elle enrayer la dégradation de l’accès aux soins ? L’Association des Petites Villes de France est loin d’être convaincue.


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  1. Merci pour cet article qui éclaire les apports potentiels de cette loi.

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