Tourisme : l’hospitalité, ça se travaille !

Comment faire pour que les visiteurs se sentent bien accueillis sur une destination ? La question a été débattue les 11 et 12 mai derniers à l’occasion de la Convention nationale dédiée à « L’hospitalité, un enjeu pour nos territoires ». Organisée au Palais des Congrès de Tours, cette réflexion menée par ADN Tourisme, a suscité échanges et éclairages.

Par Estelle Boutheloup

Les 11 et 12 mai, Tours a reçu la Convention Nationale dédiée à l'”Hospitalité” en présence des acteurs institutionnels du tourisme et des collectivités. Photo EB

N’est pas 1ère destination touristique mondiale qui veut ! La France l’est avec 90 millions de visiteurs par an. Mais si l’« Omotenashi » (l’art d’aller au-devant des besoins d’un hôte) est ancrée dans les gênes du Japon, l’hospitalité est une notion encore à parfaire sur notre territoire pour faire en sorte qu’accueillis comme accueillants se sentent bien. Car « le touriste n’est pas une rente », a pointé François de Canson, président d’ADN Tourisme à la Convention nationale sur l’hospitalité organisée par le Comité Régional du Tourisme du Centre-Val de Loire et l’Office de Tourisme de Tours-Val de Loire le 11 mai dernier.
« Pour preuve, le COVID avait tout arrêté ». Aujourd’hui, en pleine reconquête de clientèles française et internationale, « tout va bien dans le tourisme : 87% des Français veulent passer leurs vacances en France cette année et le taux de fréquentation est déjà plus élevé qu’en 2022 ». Des chiffres qui accompagnent la volonté, voire la nécessité, d’un slow-tourisme, avec une recherche de bien-être, de sens, de convivialité, ou encore de vivre comme un local. Sans oublier un point d’orgue : la Coupe du Monde de Rugby du 8 septembre au 28 octobre « où l’hospitalité aura son sens ! »

Accueillir comme on aimerait être accueilli

« Hospitalité »… Une notion vers laquelle ADN Tourisme (Fédération des acteurs institutionnels du tourisme) souhaite aller, au-delà de celle d’ « accueil touristique ». L’idée ? Inclure résidents, visiteurs et voyageurs au sens large, c’est-à-dire ceux qui sont sur le territoire pour d’autres raisons que celle du tourisme : travailleurs, aidants et accompagnants de personnes malades, étudiants, chercheurs, migrants, nouveaux habitants… Un défi qui concerne collectivités et institutions, comme agences d’attractivité économique, institutionnels du tourisme et acteurs économiques. « Une ville accueillante c’est une ville qui met en avant ses atouts », a souligné Élise Pereira-Nunes, déléguée notamment aux Relations internationales, aux Réseaux de villes et à la Francophonie, à la Mairie de Tours : inscription UNESCO, Label Cité de la Gastronomie… Plus encore !
« Se mettre à la place du touriste et à sa portée en adaptant le territoire aux seniors, les accès aux personnes à mobilité réduite, des activités pour ceux qui ne partent pas en vacances, mais aussi en répondant aux attentes de développement durable avec la rénovation des bâtiments : les touristes vont regarder tout cela ».

Cette démarche d’inclusion, la Région Centre-Val de Loire l’intègre progressivement. « L’hospitalité est une question d’altérité, notait Marc Richet, directeur général du CRT Centre Val de Loire. Un visiteur satisfait devient le premier prescripteur d’une destination. Travailler sur l’hospitalité, c’est travailler avec l’idée de recevoir l’autre comme on aimerait nous-mêmes être reçus ». Ainsi à Amboise, dès 2021, une réflexion globale a été menée avec différentes collectivités et le CRT pour travailler sur le constat de la chaîne de valeur, pour monter en gamme, allonger la durée des séjours hors période estivale, et gérer les flux. « J’ai pris en main les problématiques de territoire y compris les mécontentements des touristes et des habitants », a expliqué Véronique Savaranin, directrice de l’office de Tourisme du Val d’Amboise (1,2 M de visiteurs). Parmi lesquels : la circulation et le stationnement en ville, le manque d’animations en début de soirée, quelle offre d’activités à proposer aux enfants et en famille à la sortie des châteaux. « Des solutions liées au budget ont été trouvées avec la mise en place de loisirs gratuits pour enfants, d’ateliers « Croque château » à l’Office de Tourisme, de séances de pilate en bord de Loire, ou encore d’animations selfies dans les files d’attente du château royal et du Clos Lucé avec des agents costumés ».

 

Pour animer les files d’attentes au Clos Lucé, des agents costumés de l’Office de Tourisme proposent des selfies aux visiteurs. Photo O.T Val d’Amboise

Montée de la « Tourismophobie »

Car l’enjeu de l’hospitalité aujourd’hui est de trouver un équilibre entre ceux que l’on reçoit et ceux qui habitent sur place. « Les habitants sont les visages de la destination, on ne peut plus les mettre de côté », a fait remarqué Olivier Henry-Biabaud du cabinet d’études TCI Research. Et si certains ne demandent qu’à participer comme greeters ou en workshops, d’autres en revanche voient rouge à l’arrivée des touristes supportant de plus en plus mal les nuisances : foule, gestion des déchets, de la circulation, de l’hébergement… « 8% des habitants des grandes villes européennes ne supportent plus les touristes », poursuivait le chercheur. Un tiers des habitants d’Amsterdam est ainsi tourismophobe : une publicité inédite a même été lancée « Stay Away ! » (Restez chez vous) à l’encontre des Anglais qui n’y viennent que pour boire ». En France, ce chiffre de tourismophobie varie de 2% à 19% dans les grandes villes. 

Pour autant, si le contexte post-COVID affiche des intentions de séjours au plus haut, la qualité est le critère de choix N°1 des visiteurs. Et en la matière la concurrence est vive. « Des investissements colossaux sont à faire sur les bâtiments : l’Espagne et l’Italie bénéficient de beaucoup d’aides… Il faudra être une destination durable dans les 10 ans à venir sinon ce sera préjudiciable pour notre pays, a prévenu Jean-Virgile Crance, Président de la CAT (Confédération des Acteurs du Tourisme). Aussi il faut stimuler le gouvernement au niveau de la sécurité, et débloquer du budget pour monter en gamme ». Certes le Plan de relance a soutenu le secteur à hauteur de 1,9 milliard d’euros. Mais après ? « Il faut une impulsion politique et considérer que le tourisme est une vraie industrie ».

Si 2022 a été une excellente année touristique en Centre-Val de Loire avec un taux d’occupation quotidien en hôtellerie de plus de 61% (+9,1% par rapport à 2021), l’hospitalité y est peut-être pour quelque chose ? « La région en a l’habitude, elle a accueilli Leonard de Vinci il y a plus de 500 ans… », soulignait Marc Richet.

Plus d’infos autrement sur Magcentre: « 2022 merveilleuse année » pour le tourisme régional

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