Entre chanteur, musicien, poète, conteur, spectacle, concert et littérature, Thomas Fersen construit depuis plus de 30 ans une œuvre originale et personnelle. Depuis ses débuts, en 1993, il a bâti un univers à part qui sied parfaitement au personnage récurrent qui parcourt ses chansons. Cet éternel adolescent, nonchalant et paresseux, qui raconte son quotidien, ses amours et ses désirs. Il est actuellement en tournée avec son nouveau spectacle : Dieu sur Terre.
Par Rosa Tandjaoui (CulturAdvisor)
Thomas Fersen et ses musiciens à la Bamboche à Olivet. Photo Marie-Line Bonneau
Enfance et formation
Thomas Fersen naît le 4 janvier 1963 à Paris. Baigné dans la musique classique dès son plus jeune âge, il s’initie, grâce à ses deux sœurs aînées, aux Beatles, Genesis et Led Zeppelin.
Inscrit à l’école primaire de la rue Julien-Lacroix, dans le 20e arrondissement, il découvre, par l’intermédiaire de ses copains de classe, la chanson paillarde. C’est pour lui une énorme révélation : « Dans certaines phrases par exemple, « entre les seins, direction quéquette », cette ellipse-là, elle est extraordinaire. D’un seul coup, on passe des seins à la quéquette avec le mot “direction”, ça marche : il y a une connexion qui se fait dans l’esprit. C’est ça que j’essaie de faire dans mes chansons. » À 14 ans, il reçoit sa première guitare, offerte par sa mère, et s’initie en autodidacte à la musique.
Une période punk
En 1980, son baccalauréat en poche, il fonde son premier groupe punk « UU » : « Car c’était inscrit sur les tickets de métro ». Ainsi, deux autres groupes suivront, jusqu’à ce qu’il soit appelé sous les drapeaux : « Cette période punk m’a fait du bien, j’étais dans l’imitation des Anglais, mais ça m’a donné une occasion de me dépenser un peu, assez ludique. (…) Je prétendais chanter en anglais. En fait, je chantais en yaourt. Je rêvais d’être Bowie. Je n’étais personne. »
Un voyage fondateur
En 1986, il effectue un long voyage en Amérique centrale, emportant avec lui un ouvrage qui deviendra son livre de chevet : La montagne magique de Thomas Mann. Dès lors, il redécouvre le plaisir des mots et se met à écrire des chansons : « J’ai toujours eu le goût du langage, sans le savoir. (…) Les gens qui parlaient bien, qui avaient du vocabulaire, ça me fascinait. »
De plus, il s’invente une nouvelle identité : Thomas Fersen, en hommage au footballeur mexicain Thomas Boy et de l’amant de Marie-Antoinette Axel de Fersen : « Thomas Fersen, j’ai trouvé que ça sonnait bien, je trouvais ça beau. Du moins, j’ai senti que j’allais pouvoir le remplir. »
Premiers enregistrements
Son premier 45 tours, Ton Héros, Jane, sort en 1988, rapidement suivi, en 1990 d’un second, Le peuple de la nuit. Malheureusement, les deux enregistrements restent confidentiels : « J’étais quelqu’un d’autre. Quand je revois des documents d’époque, je suis surpris par mon comportement, ma gestuelle, ma voix. Je regarde un étranger : le bonhomme était plein de fraîcheur, plutôt amusant.
Révélation et succès
Alors qu’il écume les restaurants parisiens, chantant accompagné de sa femme, il s’inspire de cette expérience de piano-bar pour réaliser son premier album. Le bal des oiseaux, sorti en 1993, est un immense succès, obtenant même une Victoire de la musique en 1994.
Suivront quinze autres albums, dont quatre en public, avec toujours la même exigence :
« Je n’utilise pas d’argot, et j’écris au présent… les chansons sont des petites peintures, et j’essaie de bien peindre, je n’utilise jamais l’impératif… Sous couvert de douceur, j’aime bien dire les petites choses qui dérangent, avec un parti pris extrêmement classique dans la forme pour mieux toucher les gens. »
À cet égard, La chauve-souris, extraite de l’album Qu4tre paru en 1999, en est un parfait exemple.