Sans surprise les participants à la convention citoyenne sur la fin de vie se sont prononcés « fatalement » pour une évolution de la loi concernant « l’aide à mourir ». Compte tenu du libellé de la question, de ce que souhaitait le Président Macron et de la caution donnée par le Comité consultatif national d’éthique dans son avis 139, les dés étaient pipés.
Par Jean-Paul Briand
Un alibi pour légaliser l’euthanasie
A la demande du président de la République, la Première ministre avait sollicité le Conseil économique, social et environnemental (CESE) afin que les membres de la convention citoyenne répondent à la question suivante : « Le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées, ou d’éventuels changements devraient-ils être introduits ? ». Logiquement, dans le prolongement des choix d’Emmanuel Macron, qui a proclamé à plusieurs reprises être partisan du « modèle belge », les débatteurs de la convention se sont majoritairement prononcés en faveur d’une légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté. Le Président et son gouvernement ont signalé qu’ils feraient ce qu’ils veulent des conclusions des travaux organisés par le CESE. Il est néanmoins vraisemblable qu’elles servent d’alibi à une prochaine proposition de loi (PPL) autorisant l’euthanasie. Le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a d’ailleurs prévenu que le président de la République discutera rapidement du sujet avec des représentants du culte opposés à une législation qui lèverait l’interdit du 6ème commandement « Tu ne tueras point ».
L’aide active à mourir n’est pas un soin
Le respect d’une volonté à mourir est particulièrement complexe. Est-ce l’expertise des équipes médicales qui doit être souveraine ou la volonté du patient à ne plus être soigné qui doit primer ? Quand la PPL sur l’euthanasie et le suicide assisté sera discutée, quels rôles seront confiés aux professionnels de santé ? Il est plus que probable que la lourde responsabilité d’évaluer la demande puis d’aider éventuellement à mourir, leur incombera. Or, parmi ceux qui, dans le cadre de leurs métiers, côtoient la mort quotidiennement et connaissent mieux que quiconque les difficultés des fins de vie, quel que soit l’habillage du geste euthanasique, la très grande majorité d’entre eux refusent de le considérer comme un authentique soin et ont exprimé leur opposition à toute légalisation de l’euthanasie.
Un glissement éthique majeur
Le 16 février 2023, treize associations représentant 800 000 adhérents aux différents modes d’exercices professionnels et directement impliquées dans les processus de fin de vie (infirmiers, oncologues, gériatres, professionnels des soins palliatifs) se sont interrogées sur les conséquences qu’aurait la mise en œuvre d’une forme de mort médicalement administrée. Les conclusions dans leur rapport commun sont sans équivoque. Les signataires considèrent qu’une légalisation de l’aide active à mourir entraînerait « un glissement éthique majeur » et des « menaces que l’injonction de mort ferait peser sur les personnes les plus vulnérables ». Ils craignent que des personnes très âgées, ou malades, se jugeant inutiles ou comme une charge pour leur famille et la société, souhaitent ainsi mourir prématurément. Ils demandent au gouvernement et aux parlementaires, « s’ils décident de faire évoluer la loi, de laisser le monde du soin à l’écart de toute implication dans une forme de mort administrée ».
Les signataires dénoncent la grande fragilité de notre système de santé : pénurie et démissions de soignants, fermetures de services hospitaliers, déserts médicaux, manque de médicaments, insuffisance des soins palliatifs, etc. Devant autant de carences, les priorités du gouvernement devraient être de rénover notre système de santé à l’agonie et de faire respecter la loi du 9 juin 1999 qui exige des unités de soins palliatifs dans tous les départements avec des moyens suffisants…
Articles à lire ou relire (et à commenter) sur la fin de vie, les soins palliatifs et l’euthanasie :