En 1987 le bio ne faisait pas partie des préoccupations des vignerons. Voici dix ans, « La Levée de la Loire » salon des vins bio, était une curiosité. En 2023 les bio sont majoritaires à Angers Loire dégus’T.
Par Pierre Belsoeur
Des grappes de ballons blancs au plafond des ensembles de huit tables formant des carrés alignés d’un bout à l’autre du grand hall du parc des expositions d’Angers.
Alignés sur un sol nu avec simplement une bande de moquette bleue au milieu. Dans les épreuves sportives cette moquette habille la ligne d’arrivée. Là elle symbolise la Loire avec laquelle les 700 exposants ont un lien. Ou plutôt avaient un lien.
En 1987, année de création du salon des vins du Val de Loire, les allées accueillaient des stands personnalisés dans un grand hall entièrement moquetté. Les appellations de la source à l’embouchure du fleuve royal, des Côtes d’Auvergne au Muscadet, s’y côtoyaient. Sa raison d’être : promouvoir les vins de Loire auprès des acheteurs français et étrangers en leur faisant déguster sur un seul lieu, le nouveau millésime. Très prisés par la restauration, les vins de Loire se boivent jeunes et la typicité de chaque millésime est un argument de vente essentiel.
Après avoir connu un développement spectaculaire jusqu’au début du XXIe siècle (les primo exposants étaient sur liste d’attente avant d’accéder à la Mecque des Vins de Loire), le salon a été victime de défections successives. Ce furent d’abord les gros négociants qui désertèrent le salon pour créer le salon de Wine in Paris, puis les Interprofessions (BIVC pour les vins du Centre ,Interloire pour la Touraine et l’Anjou et Vins du Pays Nantais) qui se chargeaient des animations et des conférences qui prirent leurs distances.
Parallèlement les vignerons bio avaient créé dans les années 2000 leur propre structure,
« La Levée de la Loire », parallèlement au salon, dans un autre lieu d’Angers. Regardés d’abord de haut par leurs confrères, les vignerons bio accumulèrent les
exposants (venant parfois des rangs des anciens exposants du Salon des Vins de Loire). A partir de 2015 ils furent accueillis au parc des expositions dans un hall différent. Au charme cosy du salon s’opposait la présentation spartiate de « La Levée de la Loire ». Et puis arriva le Covid qui mit le Salon des Vins de Loire en pause, « La Levée de la Loire » réussissant quand même à tenir salon à Saumur en 2022.
« Destination Angers » reprend le flambeau
« Pour 2023, explique Mathilde Favre d’Anne, présidente de « Destination Angers », et maire adjoint d’Angers, organisatrice du salon, j’ai repêché un bébé qui était en train de se noyer. Il n’était pas possible d’organiser le salon des Vins du Val de Loire. La seule solution était de réunir ce salon, La Levée de La Loire et Demeter (organisme privé réunissant des vignerons en Biodynamique) sur le même site. »
En définitive cette édition 2023 a réuni 450 exposants en bio et biodynamique et 250 vignerons de l’ancien Salon des Vins du Val de Loire.
« L’important c’est que cette édition ait lieu. Nous avons décidé de privilégier l’essentiel, la rencontre conviviale entre vignerons et acheteurs, en logeant tout le monde à la même enseigne. Ce qui avait l’avantage de limiter les coûts pour les exposants. »
Une formule qui ne choque pas vraiment les habitués quoique. « Ce qui m’ennuie, reconnaît Jean Tatin, vigneron de Quincy, fidèle au salon d’Angers depuis une vingtaine d’années, c’est que l’on privilégie la façon dont on produit par rapport aux terroirs. »
Une critique que balaye la présidente : « Les retours que j’ai c’est qu’en cassant certains codes on a accru la convivialité et que chez Demeter, à la Levée de la Loire ou au Salon des Vins du Val de Loire on parle d’une même voix. »
A propos de voix justement Mathilde Favre d’Anne a entendu parler anglais, canadien, russe ou italien sur le salon, mais ce qui est certain, c’est que les acheteurs internationaux vont plutôt à Wine Paris qu’à Angers. Cela ne gêne pas un autre habitué, Bertrand Minchin viticulteur dans l’appellation Menetou-Salon. « Nous sommes un salon de vignerons, il n’y a pas de gros ou de petit. On vient, on goûte et on choisit. Et justement ce millésime est plutôt bien réussi. Peut-être qu’il y a moins d’importateurs, mais notre clientèle c’est aussi les cavistes qui sont présents en force. »
La présence de Demeter, dont les adhérents présents au salon viennent essentiellement d’autres vignobles français mais aussi d’Italie Espagne, Allemagne et Autriche, fausse un peu l’image d’un salon consacré aux vins de Loire. Pour l’organisatrice c’est un argument pour faire venir les acheteurs à Angers. On verra bien comme évoluera le salon en 2024.
Le “vin orange”, qu’est ce que c’est qu’ça ?
Parmi la multitude de conférences et master class que l’on pouvait suivre au cours des deux journées du salon, deux concernaient le vin orange et intéressaient manifestement les jeunes dégustateurs.
Selon Jean Tatin, producteur de Quincy et de Reuilly : « Ce vin orange correspond aux nouvelles tendances de consommation des citadins. C’est particulièrement vrai aux Etats-Unis où on le sert dans les bars. Techniquement ces vins sont nés voici 8 000 ans en Géorgie et ont été remis en lumière dans les années 90. Il s’agit de vins blancs de macération. La macération consistant à rajouter de la rafle au jus de raisin pendant plusieurs semaines. Cette teinte orange est le résultat d’une oxydation et donc d’une diminution de l’acidité. Ces vins sont aromatiques et très structurés. Et justement, le Reuilly gris a une belle carte à jouer dans ce concert puisqu’on peut obtenir cette teinte orange avec un minimum d’oxydation. »
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