[Rétro] Du Capitole à Urgence POLT ou la nouvelle bataille du rail

La trêve des confiseurs est pour Magcentre aussi l’occasion d’un coup d’œil dans le rétroviseur de l’année 2022. Nous vous proposons de relire quelques articles qui ont marqué cette année…

Première publication mardi, 18 octobre 2022

Urgence POLT existe depuis dix ans. Derrière le sigle qui signifie Paris, Orléans, Limoges, Toulouse, se cache un drame ferroviaire. Comment la ligne sur laquelle circulait le train le plus rapide d’Europe a-t-elle failli disparaître ? Un livre raconte cette bataille du rail.
 

Par Pierre Belsoeur

Le Capitole en majesté dans sa livrée rouge avec liseré gris dauphin dans les
années 60

En1970 Le Capitole, le train le plus rapide de France, permet de relier Paris à Toulouse en 5h56. En 2022, au bout de douze ans de sollicitations, l’association Urgence POLT caresse de nouveau l’espoir de retrouver un temps de trajet équivalent au moment où les TGV ont pulvérisé ces performances. Cherchez l’erreur.
En fait ce résultat serait un moindre mal car la ligne Paris-Toulouse a failli connaître le sort de Nantes-Lyon saucissonnée contre toute logique et qui est passée d’axe national à régional.

La logique du «tout TGV» …

Avec le réseau TGV il est beaucoup plus rapide d’aller de Nantes, Angers, ou Tours à Lyon en passant par Paris qu’en empruntant l’ancienne ligne partiellement électrifiée. La ligne POLT ( Paris, Orléans, Limoges, Toulouse) ne souffrait pas de ce handicap, son électrification date de 1943, avant Paris-Bordeaux et alors que sur la ligne de Nantes-Paris la traction électrique n’était possible qu’à partir du Mans à la fin des années 50 !
La période sombre du POLT a débuté au début des années 80, lorsque François Mitterrand inaugurait le premier TGV reliant Paris à Lyon. Deux grands projets: Paris- Marseille et Paris-Bordeaux avaient été programmés ( et financés) et entre les deux se trouvait un vaste no’mans land de territoires moins peuplés… donc moins rentables pour un projet de ligne à grande vitesse. D’autant moins rentables que le Massif Central en occupait le centre, comme un gros cailloux sur la voie ferrée.

A la fin du XIXe siècle, on avait pourtant résolu le problème puisque la ligne avait atteint Toulouse en 1891. Elle avait auparavant failli être écartée par les parlementaires en 1844 lorsque avait été adopté le schéma en étoile avec Paris pour centre, que nous connaissons encore aujourd’hui «construction extrêmement coûteuse et exploitation onéreuse» disaient déjà ses opposants.

Le péril du barreau Poitiers-Limoges

A partir des années 80, la ligne POLT a perdu de son attractivité, tant en nombre de passagers que de financements « rénovation extrêmement coûteuse et exploitation onéreuse» auraient pu, à leur tour, arguer les décideurs de la fin du XXème siècle.
Un TGV Limousin reliant Paris à Limoges en un peu plus de deux heures avait bien été envisagé, mais la ligne POLT y aurait perdu une bonne partie de son intérêt, puisqu’à partir de Brive on reprenait le Corail. Le projet fut enterré en 1996.
On avait alors perdu beaucoup de temps sur le dossier modernisation de la ligne et surgit une possibilité de TGV pendulaire comme il en existe en Italie. De tests en études de financements et de réunions de comité de pilotage le mirage dure jusqu’en 2003, date où le projet est envoyé aux oubliettes. Il faut dire que Jacques Chirac, s’était installé à l’Elysée, et Jean-Pierre Raffarin à Matignon et qu’un projet porté par Bernadette Chirac, élue de Corrèze, venait d’émerger : la création , à partir de la ligne TGV Atlantique, d’un barreau Poitiers- Limoges. Une idée à priori saugrenue de ligne unique entre deux capitales régionales ( avant de se retrouver englobées dans la région Nouvelle Aquitaine).
Un projet qui, s’il devenait réalité, sonnait le glas de la ligne POLT. Le barreau allait néanmoins perdurer et arriver au lancement d’une enquête publique en 2013 avant son abandon en 2016, le Conseil d’Etat annulant la déclaration d’utilité publique d’un caprice qui aura tout de même coûté 130 millions d’euros aux collectivités locales.


Jean-Claude Sandrier , infatigable animateur d’Urgence POLT

La menace du barreau Poitiers-Limoges a incité les élus des villes et départements de la ligne POLT à réagir en créant en 2010 à Brive, l’association Urgence Polt que préside l’ancien député communiste de Vierzon Jean-Claude Sandrier. Seuls les socialistes de la Haute Vienne attachés à leur barreau TGV, sont restés à l’écart jusqu’en 2016.
Toute cette bataille, qui va déboucher, à la fin de 2023, sur la mise en service de matériels modernes et confortables en attendant les travaux de modernisation de la ligne ( mais encore une fois tous les conseils régionaux ne sont pas prêts à mettre la main au portefeuille) est racontée dans un livre «Une ligne de vie» qui vient de paraître, présenté le 15 octobre à Cahors, lors de l’assemblée générale d’Urgence Polt

Une ligne de vie

180 pages 18 euros aux Editions La Bouinotte à Châteauroux.
www.labouinotte.fr

Plus d’info autrement sur Magcentre: 60 élus roulent pour leur POLT (Paris-Orléans-Toulouse)

 

Commentaires

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  1. C’est tout de m^me dommage qu’Urgence Polt sous la plume de son Président, n’ait été plus disert pour s’opposer à la LGV Poitiers-Limoges dans son avis lors de l’enquête publique de celle-ci, se contentant de dire “l’association n’a pour objet de se prononcer sur la pertinence ou non d’un ligne à grande vitesse mais simplement de promouvoir ou renforcer et moderniser la ligne POLT” (Courrier annexé au registre de la Préfecture de Limoges et enregistré sous le N° 811) Heureusement que d’autres associations, sans son aide se sont engagées dans un recours en Conseil d’Etat et ont obtenu l’annulation de la DUP

  2. L’article de Pierre Belsoeur comporte des inexactitudes. La ligne Nantes Lyon n’est pas une ligne régionale, elle fait partie avec Nantes Bordeaux dès lignes d’aménagement du territoire dont l’autorité organisatrice est l’état. Le combat de l’association RACO ( Rhône-Alpes Centre Océan) avec les collectivités territoriales à permis une relance de la ligne avec 3 aller retour entre Nantes et Lyon, la mise en service de nouveaux trains modernes ( Coradia Liner), la modernisation des infrastructures ( electrifications entre Tours et Saincaize), régénération de la voie, mise en accessibilité des quais…, schéma directeur de la ligne. Pierre TROSSEVIN
    Trésorier de RACO

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