Pierre Rolland, né à Gien dans le Loiret en 1986 (36 ans), a décidé de prendre sa retraite. Mais après seize années passées dans le peloton professionnel, c’est bien plus qu’un simple coureur qui se retire, c’est un révolutionnaire du cyclisme et toute une génération de fans qui partent avec lui. Car Pierre Rolland et son tempérament atypique ont apporté au cyclisme français un renouveau qu’il n’avait pas connu depuis très longtemps.
Par Timothé Beuret
Pierre Rolland s’envole vers la victoire lors de la 19e étape du Tour de France 2011 à l’Alpe d’Huez. ©Petit Brun
S’il fallait décrire ce tempérament en une seule phrase, pas la peine de mouliner bien longtemps, la mythique « Attaque de Pierre Rolland ! » le caractérise si bien. Cette phrase donne les frissons aux plus passionnés d’entre nous, car pour les vrais fans, la voix de Thierry Adam à 2 km de l’arrivée à l’Alpe d’Huez au moment où il sort de sa roue le grand Alberto Contador lors de la 19e étape du Tour de France 2011 résonne encore. Cette phrase culte, devenue virale sur les réseaux sociaux et ressortie à chaque attaque du Loirétain, fait désormais partie de sa légende.
Un tempérament (très) offensif et un coureur esthétique
Mais une seule phrase ne peut pas résumer un coureur de sa trempe, et il l’a lui-même fait savoir en 2020 : « disons que je trouve que c’est un peu réducteur de juste sortir ça quand on parle de moi. Après, ça ne me dérange pas non plus tant que ça dans le sens où je préfère être décrit comme quelqu’un qui attaque plutôt que quelqu’un qui reste dans les roues et qui ne fait que profiter du travail des autres. »
Ces attaques qui ont fait son mythe et que le public attendait à chaque étape de haute montagne, ont un style très particulier : un long effort en danseuse, grand plateau, un énorme braquet, très appliquées sur le style ; les attaques de Pierre Rolland ne passaient jamais inaperçues. Il les caractérise lui-même ironiquement « en souplesse » dans une vidéo avec GCN en français où il dévoile comme secret de ses attaques « la répétition d’accélérations à l’entraînement ». Des exercices « très courts et très intenses » qu’il effectue plus que la plupart des coureurs.
Selon lui, « pour gagner une course, c’est comme au loto, il faut prendre son ticket ». Donc peu importe le moment, pas d’hésitation, quand le ressenti est bon, une grosse attaque est toujours la bienvenue. Et bien que Pierre fût souvent missionné pour disputer le classement général, lorsque les sensations étaient présentes, l’hésitation, elle, ne l’était pas.
Un palmarès fourni d’un coureur accompli
Pierre emporte avec lui un palmarès magnifique dont notamment cette victoire d’étape à l’Alpe d’Huez et le classement du meilleur jeune lors du Tour de France 2011 au cours duquel il aura fait vibrer la France, puis une étape à La Toussuire lors du Tour de France 2012, qu’il termine à la huitième place du classement général. Il se classe quatrième du Tour d’Italie 2014. Il a également remporté une étape du Tour d’Italie 2017 à Canazei, où il aurait placé, pour lui, « sa plus belle attaque ». Il finit par boucler la boucle cette année en remportant le maillot de meilleur grimpeur du Critérium du Dauphiné, maillot qu’il avait déjà remporté 14 ans auparavant. La retraite n’était pas forcément prévue pour cette année, mais son équipe B&B Hotels – KTM n’a pu réunir les fonds nécessaires pour une nouvelle saison. Pierre « aurait aimé continuer, mais le destin en a décidé autrement ».
Un homme positif, toujours plein d’ambitions…
Le natif de Gien ne remplira plus son palmarès, mais sa vie ne risque pas d’être moins chargée. Pour la suite, il annonce « plein de projets. Un nouveau chapitre va commencer, je vous tiendrai informé rapidement de mon avenir. D’ici quelques semaines ou quelques mois, je vous dirai de quoi sera fait le reste de ma vie ». Pierre toujours aussi positif a déjà l’air d’attaque pour un nouveau défi. « Je vois des gens autour de moi, dont certains qui me connaissent à peine, qui sont tristes pour moi, a-t-il déclaré auprès d’Eurosport, j’ai envie de leur dire “ne soyez pas tristes pour moi, parce que je ne le suis pas”. Je suis content de ces 16 années. C’est le destin qui a décidé de cela et je ne vais pas contre les choses. J’ai de beaux projets qui m’animent, j’ai envie qu’ils commencent. Si je ne savais pas ce que j’allais faire de ma peau dans trois mois… Oui, je serais triste, je me sentirais vide. Mais ce n’est pas le cas. »
Pierre Rolland de retour aux sources lors d’un entraînement improvisé avec les jeunes d’Orléans Loiret cyclisme en novembre 2022. ©CGOL45
…et qui ne s’est jamais éloigné de ses racines
Pierre Rolland, qui a commencé le cyclisme à Orléans avec son ami Benjamin Gault au Cercle Gambetta Orléans, reste toujours proche de ses racines et continue de sillonner régulièrement les routes du Loiret. Entre le département et lui, les liens ont toujours été forts. Pierre n’a jamais oublié d’où il vient et les Loirétains le lui ont toujours rendu en le soutenant au bord des routes. Un fan témoigne de ce ressenti dans une interview pour Vélo club net. « En 2012, j’ai vibré lors de sa grande chevauchée vers les sommets de la Toussuire, aidé par ses coéquipiers d’alors. J’ai le souvenir distinct d’un panneau tendu par une supportrice sur le bord de la route et filmé en gros plan par les caméras : “Allez Pierrot, le Loiret est là !“. Je compris alors que d’autres partageaient ma passion, et je compris surtout qu’il ne partait jamais seul dans ses attaques : il emmenait avec lui des milliers de suiveurs qui le poussaient à réaliser ses rêves. »
Lorsqu’il en a l’occasion, et avec la simplicité qui le caractérise, il lui arrive de rouler avec les jeunes du club d’Orléans. Et quand on sait que le club vit des moments compliqués aussi bien économiquement que sportivement, les nouvelles ambitions de Pierre Rolland pourraient-elles être liées au club d’Orléans ?
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