Coup d’envoi ce lundi 7 novembre 2022 du mois de l’Algérie à Saran avec pour commencer une exposition sur le parvis de la mairie consacrée à la longue colonisation française et la guerre d’Algérie. Une choix courageux.
Par Sophie Deschamps
Tous les ans, la mairie communiste de Saran choisit un thème d’actualité. Pour 2022, ce sont les 60 ans de l’indépendance de l’Algérie. D’où ce mois de l’Algérie avec une programmation riche et variée qui a donc démarré ce lundi 7 novembre 2022 par l’inauguration d’une exposition sur le parvis de la mairie, accessible à tous, et intitulée La Guerre d’Algérie, 1830-1962, de la colonisation à l’indépendance. Un choix fort assumé par la municipalité saranaise, dont Mathieu Gallois, élu chargé de la citoyenneté : « Les initiatives d’échanges et de réflexion sont peu nombreuses, ce sujet restant assez tabou en général dans notre société. C’est un sujet qui a touché, impacté, divisé la société, des familles et deux peuples. N’oublions pas qu’il aura fallu 37 ans pour que les “évènements d’Algérie” soient enfin nommés comme étant la Guerre d’Algérie. Et soixante ans après, les mémoires sont toujours à vif des deux côtés de la Méditerranée. »
Un sujet encore tabou
Même son de cloche pour l’association de Solidarité Loiret-Algérie, l’ASLA, partenaire de cette manifestation saranaise pour qui je cite « parler de colonisation de l’Algérie et de la guerre d’Algérie soixante pas après n’est pas chose aisée, surtout dans le contexte tourmenté des relations franco-algériennes actuelles. Même si aujourd’hui, les présidents des deux pays et leurs gouvernements semblent vouloir impulser une nouvelle dynamique aux échanges et ce dans tous les domaines, les questions mémorielles ne doivent plus être l’apanage des seuls gouvernants.»
C’est en fait tout l’enjeu de cette exposition de 24 panneaux, qui se visite de droite à gauche, un petit clin d’oeil à la langue arabe. Imaginée par l’historien Guillaume Doisy (absent ce lundi) spécialiste des caricatures, elle propose ainsi un regard très bien documenté sur l’occupation française et ce conflit dont les plaies ne sont toujours pas totalement refermées. Une période que l’on découvre à travers de nombreux dessins de presse satiriques, des photos, mais aussi des couvertures et des articles de journaux, officiels ou clandestins, piochés sur les deux bords de la Méditerranée. Une richesse d’opinions et de documents qui renseignent sur la longue colonisation française de 132 ans de l’Algérie, puis sur le conflit démarré en 1954 et qui s’achèvera en 1962 par les accords d’Évian et l’indépendance de ce pays du Magreb.
La torture évoquée en janvier
On peut toutefois regretter que la torture ne soit pas explicitement évoquée dans cette exposition, mis à part un panneau consacré aux exactions de l‘OAS. Cette question sera cependant abordée les 18 et 19 janvier 2023 avec la représentation au théâtre saranais de la Tête Noire, sous forme de pièce, du fameux livre La Question de Henri Alleg. Un texte écrit depuis la prison algéroise de Barberousse, dans lequel le journaliste-historien dénonçait la torture des militaires français contre des Algériens et publié en pleine guerre d’Algérie le 18 février 1958 aux éditions de Minuit.
Cette exposition fera l’objet de visites commentées gratuites en novembre de 14 à 16h les mardi 15, vendredi 18, mercredi 23, vendredi 25 et mardi 29 par un membre de l’ASLA. Une visite qui se terminera par un thé à la menthe et des pâtisseries algériennes dans la salle du conseil de la mairie de Saran.
Les places étant limitées l’inscription est obligatoire au 02 38 80 35 22
Le programme de ce mois de l’Algérie, Algérie, d’un monde à l’autre à Saran est disponible ici
La photo de Une représente une partie de l’affiche de l’exposition, La Guerre d’Algérie, 1830-1962 de la colonisation à l’indépendance. Photo Sophie Deschamps