Voiture électrique : ils sont devenus fous ! Le livre de François-Xavier Pietri, journaliste économique, co-fondateur de l’émission Capital sur M6, ancien directeur de la rédaction du quotidien La Tribune, est salutaire à plus d’un titre. Il a le mérite de nous faire réfléchir sur la folie des politiques lorsqu’ils succombent aux lobbies.
Par André Degon
On attendait un tel ouvrage avec impatience pour remettre les pendules à l’heure. Car, enfin, que Bruxelles interdise la vente des voitures à moteurs thermique ou hybride en 2035 est totalement absurde car irréaliste. F.- X. Pietri explique simplement avec des arguments clairs qu’une telle décision n’est pas applicable. Interdire les moteurs diesel et essence neufs ainsi que les hybrides, convertir en totalité un parc automobile à l’électricité sans avoir les capacités industrielles et la couverture de bornes de recharges relève de la gageure. En outre, l’auteur nous explique que le coût de recharge d’une Zoé « peut grimper jusqu’à 15 euros pour 100 km d’autonomie sur le réseau Ionity…C’est tout simplement 1 ou 2 euros de plus que la dépense en carburant sans-plomb ou diesel d’une Clio. » A cela on peut se demander si, à ce régime, en 2035, nous aurons assez d’électricité pour nos besoins ou bien s’il faudra choisir entre rouler ou se chauffer ? La Californie qui vient de décider la fin du moteur thermique au profit de l’électrique en 2035 a été obligé en août dernier pour cause de canicule d’interdire la recharge de voitures électriques.
Des constructeurs inquiets
Les constructeurs, obligés de suivre les politiques, sont néanmoins inquiets, notamment de la menace qui plane sur l’emploi (100 000 emplois sont sur la sellette en France, 500 000 en Europe). En effet, là ou cinq ouvriers sont nécessaires à la fabrication d’ un véhicule thermique, il n’en faut que trois pour un véhicule électrique. Sans parler de la chute de la filière (sous-traitants, équipementiers), 400 000 personnes en France. Et, cerise sur le gâteau, avec cette décision d’électrification du marché européen, Bruxelles ouvre grand la porte aux constructeurs chinois qui ont joué merveilleusement bien. En vingt ans, ils ont appris des constructeurs européens à faire des voitures grâce au transfert de technologies. Ils ont ouvert leurs portes aux constructeurs européens pour mieux apprendre. En 2005, les voitures chinoises que l’on découvrait au Mondial de l’Automobile de Paris étaient invendables sur le marché européens car incapables de passer les crash-tests.
Au dernier Mondial, devenu un salon automobile franco-asiatique, les Chinois présentent des marques comme Aiways, BYD, Great Wall Motors, Geely… totalement inconnues avec des motorisations électriques. N’est-ce pas ce que souhaite Bruxelles ? Et en plus elles sont garanties 7 ans, et dotées de la meilleurs note aux crash-tests. Et en plus comme ils ont le quasi-monopole de la fabrication des batteries, ils sont les maîtres du jeu. Pour fabriquer une batterie, il faut du cobalt, du lithium et des terres rares. Le cobalt vient essentiellement de la République démocratique du Congo où 40 000 enfants, et 200 000 adultes, selon les ONG, creusent le sol à main nues pour 1 dollar par jour.
Plus de gaz d’effet de serre
F.-X. Pietri observe que « le raffinage du cobalt est assuré à 80% par des intérêts chinois…ce qui assure[ à la Chine] de facto le contrôle du marché mondial et de ses prix ». Quant aux terres rares (17 métaux utilisés dans les nouvelles technologies comme les téléphones portables et ordinateurs) la Chine en produit 80%. Concernant le lithium provenant d’Amérique du Sud, il faut 2 millions de litres d’eau pour en extraire une tonne. Nul besoin d’évoquer l’assèchement des terres.
Faut-il mentionner le fait que la production d’une voiture électrique est plus émettrice de gaz à effet de serre qu’une voiture thermique (ADEME, agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). On pourrait également évoquer ce que l’auteur appelle le casse-tête des 700 000 tonnes de batteries à recycler en 2035 et se demander avec quelle énergie on fabriquera de l’électricité ? Par contre, ceux qui se frottent les mains sont les Chinois qui proposent des voitures électriques 20% moins cher que les Européens. Nul doute que la prime de 7000 euros du gouvernement se retrouvera dans la poche des constructeurs chinois.
Alors, n’y a-t-il pas de solution pour en sortir ? Bien sûr que oui. Si on avait laissé les constructeurs travailler sans cette folle précipitation, on pourrait se diriger vers d’autres solutions : le GNV, le gaz naturel pour véhicules, peu polluant, la production de carburants synthétiques, le bio GNV obtenu à partir de la méthanisation, l’hydrogène, l’amélioration de la consommation des moteurs thermiques. En 15 ans, on est passé de 12 l/100 km à 6 ou 7 l/100 km. En allégeant les voitures et en travaillant sur les moteurs, on peut encore descendre les consommations.
Alors, toute affaire cessante, lisez vite Voiture électrique : ils sont devenus fous. C’est passionnant, instructif et documenté.
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– Voiture électrique : ils sont devenus fous de François-Xavier Pietri, éditions de l’Observatoire. 203 pages, 19 euros.