Rencontre avec une Compagnie tourangelle qui ne s’exprime que par Grommelots : une jolie surprise pleine de fraîcheur. Ici, on mime !
Par Bernard Thinat
Parmi les 1560 propositions dans le OFF, classées par discipline, on n’en trouvait qu’une seule et unique dans la catégorie « Mimes ». Pourtant, on trouve du mime dans les ballets classiques, au cirque, au théâtre parfois, mais pour trouver une heure de mime intégral, il faut aller du côté de Tours pour dénicher la « Compagnie Discrète », laquelle se trouvait en Avignon en ce mois de juillet. Leur spectacle : « Play War » ! Je laisse traduire.
Ils sont deux sur scène, deux soldats, largués en pleine nature hostile, dans la jungle, lors de la guerre du Vietnam. Ils vont devoir affronter tous les pièges, surtout la peur qui les assaille. Mais c’est plein d’un humour décalé, on rit même si le sujet est grave. Certes, le spectateur ne comprend par tous les gestes mimés, mais peu importe. Et c’est si rare le mime. Ils sont pleins d’énergie et de malice. Ils nous font fortement penser à Laurel et Hardy, l’un commande, l’autre joue bévue sur bévue. Spectacle à voir absolument avec enfants s’ils passent non loin de chez vous !
Alexandre et Adrien lors des saluts après Play War – Photo B.T.
Rencontre avec Alexandre et Adrien (AA), un matin sur une terrasse, place des Carmes :
MagCentre : A quand remonte votre Compagnie ?
AA : Elle a été créée en 2014, mais nous nous étions rencontrés au Conservatoire de Tours quelques années auparavant. Et on avait décidé d’expérimenter le mime avec « Play War » qui ne durait que 20 mn à cette époque. On s’est ancré dans ce travail corporel, « mille cartoons » comme on l’appelle. On s’est ensuite séparés, l’un à Cannes, l’autre au Québec, puis sommes revenus à Tours en 2014.
MagCentre : Pourquoi « discrète » ?
AA : On cherchait un nom de compagnie cette année-là, celui-ci nous a fait rire, et on l’a gardé. C’est un nom qui fait sens.
MagCentre : Pourtant, il étonne dans la mesure où ce n’est pas un mot théâtral. Revenons à Play War. D’où vient l’idée de parler de la guerre ?
AA : Au début, on voulait se moquer du cinéma hollywoodien avec des super héros tel Rambo. L’écriture du spectacle repose sur le concept de jouer à la guerre comme des enfants dans leurs jardins mais avec nos références.
MagCentre : les sons que vous produisez, comment les appelez-vous ?
AA : Des bruitages, mais au théâtre, on parle de « grommelots », quand on invente une langue. On parle de langage cartoonesque car ça va très vite, le public ne va pas tout capter, mais il va comprendre le but de la séquence.
MagCentre : D’où la question : le théâtre a-t-il besoin de paroles ?
AA : On va répondre non. Ce qu’on aime, c’est la force du mime. C’est une discipline répandue dans le monde, mais très peu en France. Notre pratique, c’est un mélange de mimes, de bruitages, de jeu de clowns, de théâtre gestuel. C’est notre langage à nous.
MagCentre : Vous avez des projets de créations ?
AA : Oui, pour 2023, en résidence à l’étranger. Car avec le mime, on brise les barrières de langue, d’âge, le mime est un langage universel, il n’y a que le corps qui parle. Et ce projet qui nous importe parlera d’écologie, d’urgence climatique. Ce sera un conte post-apocalyptique qui se passera dans les paysages nordiques.
MagCentre : Vous êtes subventionnés ?
AA : On est conventionnés par la Région Centre Val de Loire depuis trois mois, mais auparavant on bénéficiait de l’aide à la création.. On va dans les écoles dans le cadre de la réussite éducative mis en place par la ville de Tours, pour des enfants timides, allophones, ou surexcités. On leur propose des ateliers où tous les enfants sont au même niveau parce qu’ils ont le même langage, le mime et les grommelots. On va aussi dans les collèges où on intervient ponctuellement dans le cadre de résidences, on participe au projet « Aux arts, lycéens et apprentis », dispositif de la Région, on est allé à la fac de Tours. Voilà, on a une activité de mimes très fournie.
A suivre
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