Drames et réconciliations amoureuses au pays du soleil levant

Dans quel labyrinthe intellectuel Koji Fukada nous promène-t-il avec son dernier long métrage ? C’est la question que se posent les spectateurs, lorsque la première partie, « Suis-moi, je te fuis », se termine. Il est vrai que Fukada est un expert en dédales cinématographiques : souvenons- nous de « l’Infirmière », « Harmonium » ou « le Soupir des vagues ».

Par Bernard Thinat

Un jeune homme, Tsuji, rencontre par hasard une femme, Ukiyo, dans un magasin. Peu après, il la sauve d’une mort certaine, sa voiture restant bloquée sur un passage à niveau alors qu’un train arrive. De cette femme, il ne parviendra pas à couper les ponts, celle-ci revenant inéluctablement dans ses pas, et lui ne parvenant pas à l’abandonner à son sort. Pourtant, aucun désir sexuel ne semble animer l’un ou l’autre. Fukada introduit un élément de désordre en la personne de Ukiyo, dans la vie apparemment routinière de Tsuji. Et tout va dériver.

Place au second volet du diptyque, « Fuis-moi, je te suis », les deux ayant été au départ une série télévisée au Japon longue de dix heures, et présentés au Festival de Cannes 2020, lequel comme on le sait, n’a pas eu lieu.

De la seconde partie, on dira juste que l’ensemble d’une durée totale de 4 heures, n’est pas ce que Fukada a produit de meilleur. Il faut dire que précédemment, il avait mis la barre très haute. Donc, Tsuji et Ukiyo vont se chercher, se poursuivre, tantôt c’est l’un qui poursuit l’autre, tantôt c’est l’inverse. D’où le titre, jeu de mots et jeu de lettres. Fukada explore les passions amoureuses, celles qui font mal à l’âme, celles qui peuvent détruire, celles qui tombent dans le domaine de l’incompréhensible, tout en laissant sur le bas-côté celles et ceux qui ont aussi cru en l’amour, mais qui ont échoué à conquérir le cœur de l’autre. Le réalisateur pose la question : après la rupture et l’éloignement, le retour en arrière est-il possible ? Par une pirouette ultime, il efface quatre ou cinq ou six années, on ne sait plus trop, pour revenir au passage à niveau, point de départ, feu ou jeu d’artifices, au propre comme au figuré.

Le thème sous-jacent du double film de Fukada, c’est la vie en entreprise au Japon, avec ce système extrêmement rigide dans la chaîne entre le simple employé et son chef, fait de courbettes et d’excuses envers son supérieur, duquel chacun découvrira que lui aussi est sujet aux affronts d’un chef plus haut placé, entreprises où le simple flirt entre employés est interdit, et ne parlons pas de la vie de couple, car cela pourrait ralentir la cadence ! Fukada ne semble pas trop apprécier ce système, nous non plus d’ailleurs.

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