Dans dix jours, Melissa Lucio doit être exécutée au Texas, l’un des états les plus conservateurs des États -Unis. Sous l’impulsion d’associations anti peine de mort (Ligue des Droits de l’Homme, Ensemble contre la peine de mort, Amnesty international, ACAT France) et de la réalisatrice Sabrina Van Tassel, la mobilisation s’organise. C’était le cas à Blois samedi 16 avril.
Par Jean-Luc Vezon
« Nous demandons la grâce de Melissa Lucio condamnée à mort pour le soi-disant infanticide de sa fille de deux ans Mariah à l’issue d’un non procès instrumenté par un procureur (1) qui a utilisé ce verdict pour sa réélection. Cette femme, mère de onze enfants a droit à un procès juste et équitable » expliquait Simon Blin, « citoyen engagé » et organisateur de la manifestation qui a rassemblé une cinquantaine de personnes, militants des droits de l’homme et élus de gauche sur le parvis de l’hôtel de ville de la préfecture du Loir-et-Cher. La manifestation blésoise intervenait après une manifestation similaire à Paris en milieu de semaine.
Cette condamnation est d’autant plus incompréhensible qu’une contre-enquête, menée par la réalisatrice Sabrina Van Tassel, dans son documentaire L’État du Texas contre Melissa révèle les failles d’une enquête à charge et tend à démontrer l’innocence de l’accusée. Mal défendue par un avocat commis d’office, qui bâcle son travail et qui mystérieusement se retrouvera embauché par le procureur, Melissa a subi à l’évidence un déni de justice.
« Melissa a le profil type d’une coupable idéale : pauvre, Américano-Mexicaine et dépendante aux stupéfiants. On lui a soustrait ses aveux après 7 heures d’interrogatoire sans eau, nourriture et privation d’accès aux toilettes » développe Simon Blin. Melissa Lucio, 53 ans, est ainsi la première femme hispanique au Texas à être condamnée à mort. Elle est emprisonnée depuis 2008.
Une abolition universelle de la peine de mort
« La condamnation à mort de Melissa Lucio est prévue le 27 avril 2022 à la prison de Gatesville au Texas. Je vous invite à signer la pétition en ligne adressée au Procureur Greg Abbott et au Bureau des pardons du Texas. Soyez la plume qui fera basculer la balance implacable de la justice » a insisté Nicole Loza de la Ligue des Droits de l’homme dans son allocution.
« Au-delà du cas de Melissa, nous demandons l’abolition universelle de la peine de mort. L’an passé, 141 pays l’avaient aboli dans leur législation mais 54 autres la pratiquent encore » précise Nicole Loza. C’est malheureusement le cas dans 27 états des USA même si certains ont adopté un moratoire.
Alors que l’on commémore le 40e anniversaire de l’abolition de la peine de mort en France, les mots du Garde des sceaux Robert Badinter, prononcés le 17 septembre 1981, prennent tous leur sens : ” parce qu’aucun homme n’est totalement responsable, parce qu’aucune justice ne peut être résolument infaillible, la peine de mort est moralement inacceptable.”
De nombreuses personnalités, acteurs ou people en France et dans le monde comme Kim Kardashian demandent la grâce de Melissa Lucio. Un débat en soutien à la Texane aura lieu au Conseil national du barreau mercredi 20 avril prochain (18 h 30) en présence notamment de Christiane Taubira.
(1) Armando Villalobos est aujourd’hui emprisonné, après avoir été condamné en 2014 à une peine de 13 ans de prison pour corruption et extorsion.