“Bruno Reidal”, le mal absolu

A la fin de l’été 1905, dans une forêt du Cantal, un jeune paysan devenu séminariste à 17 ans du nom de Bruno Reidal assassine un garçon de 12 ans et le décapite à l’aide d’un couteau. Il se rend aussitôt après à la gendarmerie pour avouer son crime. Emprisonné, il comparaît devant une aréopage de médecins qui explore son passé pour tenter de trouver une explication à son geste en lui demandant de consigner son vécu par écrit.

Par Gérard Poitou

L’histoire est vraie et ce crime oublié est abordé à partir des documents qui nous en restent, notamment l’étonnante confession écrite du très jeune assassin sollicitée à l’époque par le psychiatre Alexandre Lacassagne,  rappelant Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère… (1976) film de René Allio, dont le texte avait été mis au jour et commenté par Michel Foucault. Mais le parallèle s’arrête là et et le film se place très loin de l’approche socio-psychiatrique de la criminalité de l’époque.

Car le personnage de Bruno Reidal résiste aujourd’hui comme hier aux tentatives d’explication psychiatrique. Enfant ordinaire d’une campagne arriérée, il brille par des résultats scolaires qui lui permettent d’entrer comme boursier au petit séminaire, entrée qui confirme ses aptitudes remarquables. C’est cette lucidité intellectuelle qui donne la force insondable à son cahier autobiographique. Il a fallu pas moins de trois acteurs pour reconstituer cette vie brève qui va basculer dans l’horreur d’un crime “gratuit”.

Car le réalisme obsessionnel de la mise en scène ne fait que nous enfoncer un peu plus dans l’irrationnel d’un rapport au monde qui dérape. De la solitude enfantine jusqu’à cette masturbation compulsionnelle, d’un désir vide à une haine jalouse de l’autre, entre souffrance et jouissance, la trajectoire de Bruno semble marquée d’une logique implacable vers l’abîme. Et c’est le fatalisme de cette pulsion dévastatrice qui nous renvoie, sans réponse, à cette extrémité de la psyché humaine.

“Bruno Reidal, confession d’un meurtrier”

1h 41min de Vincent Le Port
Avec Dimitri Doré , Jean-Luc Vincent , Roman Villedieu

Commentaires

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  1. Si le vécu d’enfance et d’adolescence est effectivement important puisque c’est dans ce temps de la vie que l’individu s’adapte aux difficultés qu’il rencontre (et ce pas seulement pour les humains puisqu’on peut le constater avec des animaux et aussi des végétaux) , l’être humain présente pendant l’enfance des prédispositions à développer des déséquilibres psychiques pour s’adapter.
    On peut constater (généralement avant l’âge de 5/6 ans) des périodes plus ou moins longues (de quelques jours à quelques semaines) où des tendances névrotiques polymorphes se manifestent un peu comme si l’être humain en train de structurer son psychisme “essayait” des comportements dits caractériels.
    Chez certains individus par exemple pour Bruno Reidal, une forte pulsion de mort sur autrui qui se manifestera par un passage à l’acte à l’adolescence est le retour en force d’un traumatisme psychologique antérieur auquel il avait “répondu” inconsciemment en refoulant le désir de tuer ( qui n’a pas été cruel, enfant, en torturant une mouche ou en pinçant son petit frère ? mais a ensuite compris et intégré l’interdit de faire du mal gratuitement )

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