West Side Story au Zénith d’Orléans, emballant

Le West Side Story de La Fabrique Opéra resplendit par le brio des interprètes et l’énergie de l’orchestre. Le drame lyrique conserve l’esprit du film de Rober Wise de 1961. La violence et l’amour se disputent sur fond d’immigration et de pauvreté dans cette esthétique de danse moderne qui a fait sa réputation. Le travail collectif rassemblé par la Fabrique Opéra trouve une fois de plus sa puissance et fonctionne parfaitement.

Par Bernard Cassat

Les Sharks . Photo BC

Tout commence par un mambo. La musique de Leonard Bernstein est très branchée sur les rythmes afro-cubains ou salsa. Et ça swingue. Les chanteurs-danseurs, qu’ils soient Jets ou Sharks, nous emmènent avec une belle énergie dans ce monde magique de la comédie musicale installé en 1961 par la pièce de Robbins et le film de Robert Wise. Les chorégraphies très au point, l’énergie de l’orchestre, les voix adaptées à ces textes en anglais mais tellement connus qu’on les comprend bien, tout nous plonge dans cette atmosphère du New York des années 1950. Comme il n’y a pas de chœurs dans ce drame lyrique, des foules silencieuses symbolisent la grande ville, et surtout des SDF qui abondent dans les quartiers pauvres de la mégalopole. Terrain de basket derrière des grillages, comme dans le film, comme dans la vie. C’est là que le drame va se nouer.

Une vingtaine de jeunes comédiens chanteurs danseurs épatants

Tout n’est pas chanté. Il y a de vrais moments de théâtre qui permettent à la narration de s’installer puis d’avancer. Mais ce sont les moments dansés et chantés qui donnent la dynamique du spectacle. Les Jets seuls, puis les Sharks seuls. Les filles n’arrivent qu’ensuite, dans un camp comme dans l’autre. Les Sharks plus colorés, avec des musique aux rythmes irrésistibles, impressionnent peut-être plus.

Mais les moments de plus grand plaisir sont bien sûr les confrontations entre les deux, le fameux bal qui les réunit le samedi soir dans la même salle. Leur affrontement crée un ballet virevoltant. La vingtaine de danseurs-euses s’amusent à se chamailler, se dénigrer, se frôler pour se repousser, se provoquer avec un enthousiasme joyeux. C’est là que la puissance de la musique de Bernstein éclate vraiment. Les airs collectifs dansés comme America restent dans la tête longtemps parce que ce sont de vrais chefs d’œuvre !

Le combat n’est pour l’instant que celui de la danse. Mais la violence va prendre le dessus. Cette violence est dans les mots crus des insultes, dans le discours de la police, et passe ensuite dans les faits racontés. Racisme exacerbé. Les deux bandes sont toutes deux des immigrés, c’est rappelé à plusieurs reprises. Leur seule différence est leur origine et leur couleur de peau. Nord contre sud, Polonais contre Portoricains. Racisme pur, donc. Mais le pire personnage est sans doute le policier. Influence d’événements récents repris par le metteur en scène ?

Maria Juliette (Marie Oppert) et Tony Roméo (Julien Salvia)

Mais il y a aussi l’amour. Le fameux Maria suivi de Tonight, ces duos qui compensent la violence des danses des deux bandes. Les deux comédiens chanteurs danseurs sont magnifiques dans ces rôles difficiles, tellement attendus que la pression devient quasi sportive. Autant Maria que Tony, sans copier les modèles ni inventer à tout prix, livrent un très belle prestation. Anita, la confidente de Maria, a aussi tout au long du spectacle une présence impressionnante. Elle mène le groupe de femmes portoricaines, lance les séquences entre femmes immigrées qui se racontent en chantant leur vie de travail et leur soumission aux hommes.

Le bal commence! Photo BC

Quant à l’orchestre, placé sur le côté (puisque ce n’est pas un opéra, pourquoi pas ?), donc amplifié, parfois même un peu trop, donne le ton par son énergie. Emmené par un Clément Joubert très en forme, il a une puissance formidable, passant d’un ton hollywoodien à la chaloupe de la salsa. Le décor aurait peut-être pu symboliser plus la ville de New York. Statique et un peu vieillot, il aurait pu contribuer à la dynamique de l’histoire. Mais la brillance des interprètes enlève la mise. Le spectacle est au rendez-vous. La Fabrique Opéra a une fois de plus réussi brillamment son pari.

A lire: Johan Nus, chorégraphe de West Side Story: “la narration par la danse”

West Side Story

La Fabrique Opéra

Chef de projet et d’orchestre : Clément Joubert

Metteur en scène : Gaël Lépingle

Chorégraphie : Johan Nus

Livret : Arthur Laurents

Musique : Leonard Bernstein

Paroles : Stephen Sondheim

Chorégraphie originale : Jerome Robbins

Maria : Marie Oppert
Tony : Julien Salvia
Anita : Emmanuelle N’zuzi
Riff : Bart Aerts

Les Sharks :
Bernardo : Ezzahr
Chino : Mickaël Gadea
Pepe : Thomas Bimai
Indio : Lionel Kapamba
Luis : Hakim Ouhibi
Rosalia : Emma Rattanaxay
Consuelo : Mômô Bellance

Les Jets :
Action : Grégory Garell
Baby John : Maxime Pannetrat
A-Rab : Clément Bernard-Cabrel
Big Deal : Mathieu Cobos
Anybodys : Marine Nottrelet
Diesel : Guillaume Zimmermann
Velma : Alexia Cuvelier
Graziella : Ophélie De Cesare
Minnie : Alizée Duvernois

Commentaires

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  1. Excellent dynamique énergique… sublime ! Nous avons passé une belle soirée ! Bernstein n’y est pas pour rien et tous les acteurs de cette comédie musicale expriment tout leur talent sans une fausse note ! L’orchestre est solide et Clément Joubert maîtrise l’ensemble avec vigueur maestria et une grande complicité avec des interprètes de très haut niveau ! Quelle Énergie … que l’on espère renouvelable !

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