Prestigieux, audacieux et véritable festival, le Concours International de piano d’Orléans est le seul au monde consacré au répertoire pour piano de 1900 à 2022. Ouverte au public, sa quinzième édition, qui se déroulera, du 4 au 10 avril prochains, accueillera vingt-six pianistes, âgés de moins de trente-six ans et originaires de quatorze pays. Le président du jury est le grand compositeur Philippe Manoury , artiste qui aime un piano dans le prolongement de Debussy, « ce compositeur qui a donné un autre visage à cet instrument, un instrument désormais plus résonnant que percussif ». Il aime à se laisser surprendre ainsi qu’à recevoir.
Par Jean-Dominique Burtin
Philippe Manoury, pionnier de la musique électronique. Photo: Harmut Nagele
Un artiste bien connu des Orléanais
Philippe Manoury, compositeur qui fête cette année ses soixante-dix ans, héritier du piano debussyste, est un artiste bien connu des Orléanais puisqu’il fut accueilli en résidence durant trois années à la Scène nationale d’Orléans que dirigeait alors Claude Malric. Il y composera en 2003 « La Frontière », son troisième ouvrage scénique, un opéra de chambre et, en 2005 « On Iron », vaste pièce pour quatre solistes, percussion, chœur de chambre.
« Réfléchir au piano résonnant »
Pour le concours Philippe Manoury est l’auteur de deux études commandées par le Concours et sur lesquelles s’affronteront les 7 demi-finalistes : “Réseaux” (2’30) et “Dérèglements” (4’30).
Ces œuvres font partie d’un projet d’études pour piano que Philippe Manoury écrit actuellement pour Bertrand Chamayou. Un premier volume est déjà publié, un second, qui comptera six ou sept nouvelles études, est ainsi en cours d’écriture. Philippe Manoury : « Ce qui m’intéresse est de réfléchir au piano résonnant, à l’utilisation des harmoniques du piano et à la manière d’enfoncer les doigts de façon à rendre muettes certaines touches ».
Une Passacaille « redoutable »
Une autre de ses œuvres, « Passacaille pour Tokyo » (1994), composée pour Ichiro Nodaira, œuvre pour piano et dix-sept instruments, est la pièce imposée pour l’épreuve finale lors de laquelle les finalistes se produiront en compagnie de l’Ensemble intercontemporain.
Il y a là une structure qui se répète, comme une charpente visible ou couverte. Une note y résonne du début à la fin, un mi bémol central. Cette “Passacaille” est “redoutable” car elle comporte différents échafaudages, des déplacements rapides où le piano joue la note que l’ensemble n’a de cesse d’entretenir. Pas de faux pas possible.
Un second piano, fantôme
Pour cette “Passacaille”, étonnamment, un second piano est dans la coulisse. Philippe Manoury : « Il est comme une ombre du soliste. Petit à petit elle va se révéler et prendre la parole. A certains moments cette ombre va même vers le devant de la scène ».
La présence de ce second piano est née du souvenir du temps où, jeune pianiste, Philippe Manoury accompagnait les cours de danse à Pleyel. Il n’était pas le seul accompagnateur et passant devant les salles entendait des pianos tels des « halos ».
« Une vision que je n’avais pas »
Comment Philippe Manoury, ouvert aux esthétiques différentes, voit-il son rôle de président du jury ? « Avant tout, je ne suis pas seul à juger. Ce qui m’intéresse est que les pianistes me surprennent. Les Etudes, je les ai dans les oreilles, mais j’attends de voir ce que les candidats vont en sortir. Bien souvent, des interprètes me donnent plus que ce que j’ai écrit, m’apportent une vision que je n’avais pas. »
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Retrouver sur magcentre.fr: Magistral esprit d’ouverture avec le Concours de piano d’Orléans mercredi, 23 février 2022