Richard Cayeux, le maître français des iris, fait chevalier de la Légion d’honneur

Une consécration pour cet horticulteur du Loiret (Poilly-lez-Gien) qui incarne depuis près de 40 ans la quatrième génération des Iris Cayeux. Cette maison, reconnue dans le monde pour ses incroyables collections, et dont le peintre Claude Monet était un fidèle client, crée des variétés florales depuis la fin du XIXe siècle. Retour sur cette lignée au destin florissant.

Par Estelle Boutheloup

Le jardin témoin des Iris Cayeux permet de découvrir les centaines de variétés disponibles et cultivées sur 20 ha
à Poilly-les-Gien dans le Loiret. Photo IrisCayeux

Après Ferdinand, son arrière grand-père, en 1910, puis Henri, le frère de celui-ci, en 1926, c’est à Richard Cayeux de se voir distingué par l’État, nommé, fin 2021, chevalier de la Légion d’honneur. « Je ne sais pas qui m’a proposé mais c’est une reconnaissance qui fait plaisir, confie l’ingénieur agronome. Horticulteur n’est pas un métier facile. Il doit composer avec les aléas climatiques, la concurrence des grosses jardineries… Nous sommes une petite structure qui doit garder son niveau de qualité sur des décennies pour continuer à apporter du bonheur et de l’esthétisme dans les jardins ».

Cayeux chez Monet

Comme ceux de Bagatelle, du château d’Auvers-sur-Oise ou encore de Giverny. « Depuis quatre générations, Cayeux fournit le jardin de Claude Monet. Mon arrière-grand-père lui faisait déjà des propositions de variétés d’iris pour ses bordures de jardin », explique Richard Cayeux en montrant une lettre scannée. Alors que Ferdinand Cayeux reprend en 1896 une entreprise de marchand grainier, il commercialisera son premier iris en 1906, « Ma Mie », un iris diploïde (12 paires de chromosomes), blanc et lavande, aux nombreuses fleurs élégantes, et plus petit que les iris actuels. « Il était très doué en génétique et il avait du flair. Il s’est mis à hybrider les iris à la fin du XIXe siècle, sachant qu’il y avait matière à amélioration. »

Ainsi, Ferdinand Cayeux, aidé de son frère, s’est mis à créer différentes variétés de fleurs en région parisienne : roses, dahlias, cannas et iris… Jusqu’à 300 collections ornementales que conservera à son tour René Cayeux, le grand-père de Richard, pendant la Seconde Guerre mondiale, occupé, lui, à développer des graines potagères pour nourrir le pays.

À Giverny, des Iris Cayeux ont été commandés par le peintre Claude Monet pour dessiner les bordures de son jardin. Sont-ce ceux-là qui lui ont inspiré certaines de ses œuvres ? Photo Iris Cayeux

La relance de l’iris en France

C’est en 1960 que Jean Cayeux reprend l’entreprise familiale et s’installe dans le Loiret à Poilly-lez-Gien. Là, il plante 2000 m2 d’iridacées. « Mon père est à l’origine du renouveau des iris en France. Après les deux Guerres mondiales, les cultures florales sont délaissées. Dans le même temps, les États-Unis développent beaucoup de variétés. Son objectif alors est de rattraper le retard de la France. » Pour cela, il va développer la vente par correspondance, éditer un catalogue commercial en anglais pour l’export (États-Unis, Canada, Angleterre…), acheter des pieds aux États-Unis et en Australie, et créer de nouvelles variétés avec son fils qui lui succède en 1983 : « Mon père avait le sens de l’innovation », salue Richard Cayeux, mais des deux c’est moi qui aie créé le plus de variétés. » Comme « Provençal », cet iris de 1978 aux pétales rouge bordeaux, sacré « Iris du Millénaire » en 2000.

Suivront de nombreuses autres toutes aussi élégantes : « Ravissant » (2007), aux sépales blanc pur bordés d’un lilas rosé vif et barbes mandarine : « Seule variété autant primée au monde à ma connaissance et commercialisée chez le plus grand cultivateur d’iris au monde, un américain de l’Oregon. » Également « Barbe noire » (2013) aux pétales blancs et barbes jaune d’or, sépales blancs bordés de violet pourpré noir et striés de fines lignes. « Bord de Loire » (2019), d’un bleu pur. Et les nouveautés 2022, « Volcanique », « Toile de maître », « Tempête de neige », « Serrac », « Sémillant »… « Nous sortons entre 8 et 16 nouveautés par an en orientant notre recherche sur de nouvelles formes, de nouvelles textures, l’époque de floraison… Il faut environ 10 ans pour créer un iris. » Parfois 20 ans même ! Comme « Domino noir » (2013), une perle rare aux pétales pratiquement blanc pur, des sépales noirs et des barbes jaune d’or.

Créée en 2007 par Richard Cayeux, la variété “Ravissant” serait l’une des fleurs les plus primées au monde.
Photo Iris Cayeux.

Un Made in France pas encore à l’Élysée

Aujourd’hui, les Iris Cayeux regroupent 1300 variétés dans les champs (20 ha) dont 50% sont commercialisées. « Les autres se sont des variétés pour l’avenir, des créations à l’essai sur 4-5 ans, des achats en test d’acclimatation… » Des variétés qui séduisent de plus en plus la clientèle étrangère (Russie, Lituanie…) et que les clients de la région peuvent découvrir sur place, dans les carrés d’un jardin témoin à Poilly-Lez-Gien, véritable « show room » extérieur qui explose en couleurs en mai.

« C’est tout cela qui a motivé la Légion d’honneur », souligne Richard Cayeux, les lettres de congratulation des élus locaux et du Ministère de l’Agriculture dans les mains. Reste maintenant, à l’Élysée, grand défenseur du Made in France, d’en orner ses jardins, où curieusement l’iris Cayeux n’a pas encore trouvé sa place…

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