Théatre d’Orléans : deux facettes du danseur Boris Charmatz

Boris Charmatz est un danseur tout à fait atypique. Tenter de résumer son parcours ou son travail serait le trahir. Mais heureusement, il s’exprime beaucoup, sur différents médias. Avant d’aller découvrir les deux spectacles qu’il nous propose cette semaine, Somnole mercredi 26 et Infini vendredi 28 janvier, dressons une première approche du personnage.

Par Bernard Cassat

De formation très classique se terminant à l’opéra de Paris, Boris Charmatz a ensuite dansé dans des compagnies contemporaines, puis monté très jeune ses propres spectacles. La question de la transmission de la danse l’a retenu, et avec huit autres jeunes danseurs, il a mis sur pieds Bocal, une « école » de danse qui a duré un an mais qui a constitué une pépinière très fructueuse d’idées, de projets et de découverte d’un chemin de travail, pas seulement pour lui mais pour tous les participants. Il a ensuite pris la direction du centre de Rennes en 2009, qu’il a fait évoluer en Musée de la danse. Et tout récemment, il a été contacté par la troupe de Pina Bausch pour venir diriger le Tanz Theater de Wupperthal, responsabilité qu’il a acceptée.

Somnole, solo de Boris Charmatz. Photo Marc Dommage.

Comme tous les artistes travaillant en compagnie, le confinement l’a surpris en train de commencer à monter ce qui deviendra Somnole. Ce n’est donc pas le Covid qui l’a poussé vers le solo. « Il y a sans doute une question de légèreté ; ce n’est pas le même poids. Je suis le seul responsable de ce qui se passe sur scène : tout se passe entre moi et moi, il n’y a pas besoin de traduction. Le lien avec ce dont on rêve la nuit – la dimension fantasmatique et intuitive du travail de création, que l’on couche dans un cahier, dans sa tête ou dans son corps – est beaucoup plus direct. Pas besoin de transmettre, de faire comprendre, comme ça peut être le cas dans une chorégraphie de groupe », dit-il dans un entretien avec Gilles Amalvi en décembre 2020, et publié sur son site. « Souvent les pièces me viennent dans un état de demi-sommeil et j’aime ces mouvements, le plus souvent involontaires, que l’on peut faire quand on va s’endormir, comme une danse alanguie, traversée de sursauts. Pour moi, la création a à voir avec une forme non-volontaire, qui puise dans l’inconscient. Je ne crée pas par volonté, avec une idée claire de ce que je veux faire ; je me laisse guider par des impulsions, des tropismes… » Il a choisi pour ce solo de ne pas danser sur de la musique, mais de créer lui-même sa bande son en sifflant tout en dansant. C’est « tellement riche de possibilités, produisant une jonction intime entre la production de mouvement et l’émission du souffle. »

Infini, une pièce pour six danseurs-euses. Photo André Le Corre

Le deuxième spectacle, Infini, créé en 2019 mais repoussé pour raisons sanitaires, met en scène six danseurs-euses, dont Maud Le Pladec, la directrice du Centre Chorégraphique d’Orléans. La conception est totalement différente. « Les danseurs, depuis des siècles, comptent jusqu’à 4, 6 ou 8, puis recommencent. Dans les chorégraphies modernes, il arrive qu’ils comptent de manière plus complexe, avec des treize et des cinq qui se combinent. Mais qu’arriverait-il s’ils comptaient à l’infini ? Qu’arriverait-il si au lieu d’atteindre un but, une fin, une mesure, un rythme cyclique, ils comptaient comme on s’endort, comme on meurt, comme on regarde les étoiles éteintes par notre sur-luminosité urbaine ?… Que serait le chiffre s’il marque l’abandon, le passage, la métamorphose infinie ; le nombre de la recherche, et non de la détermination ?… », écrit Boris Charmatz dans une note d’intention. Les chiffres remplacent donc la musique, complétés par « des musiques ou des chansons qui fonctionnent à base de comptes et que nous allons chanter a capella ». Il rajoute avec amusement : « j’ai toujours détesté compter en dansant, j’ai toujours préféré laisser mon cerveau divaguer… Dans cette pièce nous comptons, parlons et chantons et dansons mais c’est pour mieux divaguer. » De plus, le groupe de danseurs prend ici toute son importance. Et Boris redevient chorégraphe tout en dansant lui même. « Je retrouve le plaisir de construire une pièce chorégraphique de l’intérieur. Beaucoup d’idées viennent en les faisant avec les autres danseurs. Le fait d’être dans le groupe me procure des effets en trois dimensions. En étant dans la pièce, les choix viennent directement du plateau, pas seulement d’un regard extérieur frontal. »

Somnole

Chorégraphie, interprétation Boris Charmatz
Assistante chorégraphique Magali Caillet Gajan
Collaboration costumes Marion Regnier
Travail vocal Dalila Khatir
Avec les conseils de Médéric Collignon, Bertrand Causse
Lumières Yves Godin
Régie générale Fabrice Le Fur


Mercredi 26 janvier 20h30 − Salle Barrault
Tarif B (tarifs de 5€ à 25€, détails et renseignements ici)
ou
Tarif C (tarifs de 5€ à 20€, détails et renseignements ici) si achat simultané des 2 spectacles de Boris Charmatz, Somnole et infini
Durée 1h environ

Infini

Chorégraphie Boris Charmatz
Interprétation Régis Badel, Boris Charmatz, Raphaëlle Delaunay, Maud Le Pladec,
Fabrice Mazliah, Solène Wachter
Assistante chorégraphique Magali Caillet Gajan
Travail vocal Dalila Khatir
Costumes Jean-Paul Lespagnard
Lumières Yves Godin
Son Olivier Renouf
Régie générale Fabrice Le Fur


Vendredi 28 janvier 20h30 − Salle Barrault
Tarif B (tarifs de 5€ à 25€, détails et renseignements ici)
ou
Tarif C (tarifs de 5€ à 20€, détails et renseignements ici) si achat simultané des 2 spectacles de Boris Charmatz, Somnole et infini
Durée 1h10

Pour aller plus loin :

https://www.borischarmatz.org/

De nombreuses interviews ou émissions de radio sont en ligne, notamment

https://www.franceculture.fr/emissions/affaires-culturelles/boris-charmatz-est-l-invite-d-affaires-culturelles

toute récente (18 janvier 2022)

ou plus ancienne:

https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-culture/la-grande-table-emission-du-mercredi-16-septembre-2020

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