Un concert très original a eu lieu ce vendredi 21 janvier au théâtre d’Orléans, avec la rencontre entre la musique de Béatrice Martin, claveciniste, et les couleurs de Jérémy Queyras, artiste-peintre. Place était donnée au direct avec la musique de Scarlatti et la réalisation d’une grande fresque colorée, sur scène, le temps d’un moment magique d’environ une heure quinze. Du jamais vu.
Par Anne-Cécile Chapuis
Jérémy Queyras et Béatrice Martin. Photo Thomas Allen
Un projet original des Folies Françoises
Dans le cadre de la programmation « Scène nationale », les Folies Françoises ont préparé ce concept hors du commun. La musique de Domenico Scarlatti (1685-1757) évoque le sud, le soleil, la sensualité et s’ouvre tout naturellement à sa mise en scène et en couleurs. Jérémy Queyras a déjà réalisé des performances similaires avec une violoniste ou un violoncelliste. Avec le clavecin, c’est une expérience unique qui vient porter les rythmes et couleurs résolument situées dans la chaleur de l’Andalousie, région chère au compositeur italien qui a passé 28 ans comme maître de chapelle à la cour espagnole.
Des spécialistes de haut niveau.
Béatrice Martin fait autorité dans le monde du clavecin. Bien connue des orléanais pour son implication dans les Folies Françoises qu’elle a co-fondées avec Patrick Cohen Akénine en 2000, elle mène une carrière de concertiste internationale, et enseigne actuellement à la Julliard school de New York.
Jérémy Queyras, né en 1997, n’a pas attendu le nombre des années pour faire preuve de sa valeur ! Diplômé de l’Art Academy London, titulaire d’un premier prix du concours Goodmesh 2021, il poursuit sa formation auprès des plus grands, et cherche continuellement à repousser les frontières de la peinture en décloisonnant les arts.
La fresque du 21 janvier, à l’issue du concert. Photo AC Chapuis
Une prestation époustouflante
Le décor est dépouillé. Sur la scène de la très conviviale salle Vitez, un clavecin côté jardin et une monumentale toile blanche occupe toute la longueur de la scène. Les deux artistes entrent, saluent et s’installent qui à son clavecin, qui à ses bacs de peinture. Et le ballet commence. La musique intimiste du clavecin retentit avec la sonate en do mineur de Scarlatti. Le ton est donné. Jérémy Queyras prend sa brosse et commence avec de grandes arabesques dans les tons jaunes et orange. Avec lui on suit la musique. L’œil et l’oreille sont en alerte.
Les sonates s’enchaînent devant un public médusé qui retient son souffle. György Ligeti (1923-2006) s’insinue harmonieusement entre Bach et Scarlatti. Béatrice Martin joue avec beaucoup de virtuosité nuancée de sensibilité, passant d’un registre et d’un clavier à l’autre, mettant en valeur la palette subtile de l’instrument. C’est jubilatoire, la musique coule de source. Et pendant ce temps, Jérémy Queyras poursuit sa route sur la toile. Les couleurs se succèdent, rythmées par les sons, c’est un festival. Et l’on ne sait pas si c’est le clavecin qui enrichit la peinture ou si c’est la peinture vient couronner la musique…Le spectateur est happé par les deux arts, conscient qu’il se passe quelque chose d’inédit, qui a à voir avec la création, l’expression, l’émotion…
Une exposition dans la résonance de l’instant.
La fresque réalisée ce vendredi est visible jusqu’au 31 janvier à l’exposition du théâtre d’Orléans consacrée à Jérémy Queyras. Y sont visibles les prestations réalisées avec violoncelle ou violon, ainsi que plusieurs œuvres de l’artiste peintre.
Quant aux Folies Françoises, un rendez-vous est déjà pris pour ce dimanche 23 janvier à 18h pour une rencontre-débat Couleur baroque, au cinéma les Carmes où, à l’issue de la projection du film « Rembrandt » il sera question de la création de la pièce de Couperin intitulée « les Folies Françoises »