Depuis l’automne dernier, les trois députés du Cher ont reçu des menaces de mort. Des messages par mails et courriers à la lueur desquelles on comprend que les notions de Démocratie directe et de République sont décidément mal vécues par certains de nos congénères. Quand la bêtise crasse est alliée au populisme, le résultat ne se fait pas attendre.
Par Fabrice Simoes
La connerie à l’état pur, ça existe et Frédéric Dard (Monsieur San Antonio) ne manquait pas de rappeler qu’« il y aurait plusieurs façons d’être con, mais le con choisit toujours la pire ». Si on avait encore quelques doutes quant au niveau actuel de la connerie de nos congénères, ils ont vite été levés. Tobie Nathan, expliquait dans La psychologie de la connerie que la « connerie est le bruit de fond de la sagesse ». Pour l’heure, certains se limitent à quelques borborygmes et ont des difficultés à passer au niveau de la phrase construite et de l’entendement. Ou alors pour montrer au monde que l’on peut s’exprimer sans atteindre le premier maillon de la chaîne de l’intelligence.
La preuve en est, le premier message reçu par Loïc Kervran (AGIR), le député de la 3e circonscription du Cher (Saint-Amand-Montrond), fin octobre 2021. Là, un auteur anonyme – la connerie est rarement assumée quand on se sait con – estimait que le jeune député berrichon risquait de « finir comme le député britannique…» et que « nous, on est cachés et on surgira quand on le voudra. Vous, vous n’êtes pas cachés, nous savons où vous trouver… » La missive faisait ainsi référence à l’assassinat quelques jours plus tôt du député conservateur britannique David Ames, tué à l’arme blanche. On se disait qu’un taré était passé par-là et que le dépôt de plainte était un minimum associé à la détermination de Loïc Kervran. Sur les réseaux sociaux, il expliquait calmement que ses menaces, son auteur, pouvaient se les carrer quelque part en termes plus choisis. « Cela n’entamera en rien ma détermination à travailler sans relâche pour nos territoires et vous toutes et tous », écrivait-il alors.
Couteau, lance-roquette, le choix des armes
En décembre, c’était le tour de Nadya Essayan (Modem), la députée de la 2e circonscription (Vierzon), de recevoir deux mails, le 1er et le 28 décembre, très explicites ; cette fois la lâcheté s’ajoute à l’anonymat : « Ta tête aurait dû tomber il y a bien longtemps. Vu que personne ne l’a fait, je vais m’en occuper car tes mesures sanitaires vont se retourner contre toi » pour le premier. Le second proposait plusieurs méthodologies, « coup de couteau, décapitation, lance-roquette, arme à feu, bombe, peu importe comment on te tuera. Vous allez vite comprendre que notre liberté, il ne fallait pas y toucher ». Nouvelle plainte et détermination idoine.
Lundi dernier, c’était au tour de l’élu de la 1ere circonscription (Bourges), François Cormier-Bouligeon (LRem), de déposer plainte. Il venait de découvrir, dans le courrier de sa permanence, une enveloppe qui contenait un sachet de poudre noire et de plombs de chasse. Pas un mot, pas un seul paraphe, une simple lettre avec le timbre inversé. Si les deux premiers députés étaient nettement visés pour leurs prises de positions sur le passeport vaccinal, pour le troisième c’est un peu plus délicat. Il vient de déposer un texte de loi contre les enclos de chasse qui peut incommoder des amis de la nature engrillagée par exemple. Et, mettre un timbre de Marianne la tête en bas est parfois associé à des résidus d’idées monarchisme. Au moins trois pistes à suivre donc.
Là, encore réponse de l’élu : « Je suis indifférent aux menaces ! Rien, jamais, ne me fait dévier du chemin choisi pour réformer notre pays et protéger les Français. Je serai un député libre jusqu’à la dernière minute du mandat qui m’a été confié par mes concitoyens de la première circonscription du Cher. »
Le préfet du Cher n’a pas manqué de réagir. Il a envoyé un communiqué à toutes les rédactions. « Menaces à l’égard des élus du Cher : s’attaquer à eux, c’est s’attaquer à la République. Dans le cadre de l’adoption des lois consécutives à la crise sanitaire, les trois députés du Cher ont, comme de nombreux élus en France, fait l’objet de menaces contre leur intégrité physique. Jean-Christophe Bouvier, préfet du Cher, condamne fermement ces méthodes lâches et violentes, et souhaite que les procédures judiciaires engagées puissent aboutir à la condamnation des auteurs. Les élus représentent les citoyens français au sein de nos institutions démocratiques. S’attaquer à eux, c’est s’attaquer à la République. »
Pas mieux…
Lire aussi : La députée Stéphanie Rist menacée, quand la haine supplante le débat