Il était un grand artiste. Exaltant. Résolument humble et merveilleux. Il serrait, étreignait entre ses bras un bandonéon tel un cœur qu’il ouvrait à chacun. A la renverse, son âme de la musique, synonyme d’une belle histoire d’amour, nous tendait les mains et nous bouleversait. Jacques Trupin, bandonéoniste orléanais, bateleur de beaux, vibrants et oscillants sentiments, nous a quittés tellement trop tôt, ce dimanche, à l’âge de soixante-deux ans. Des suites d’une atteinte cardiaque. Il nous faisait tanguer sur le fil de l’émotion.
Par Jean-Dominique Burtin
Photo GP 2014
Ses concerts à passion éperdue, de toute intensité musicale demeurent dans la mémoire. D’une humilité amoureuse de chacun, homme de rencontre, chaleureux et festif, il n’oubliait jamais ses battements de vie et retrouvait les uns et les autres, même perdus de vue de longue date, avec une complicité canaille. En un instant de retrouvailles, tous les jours partagés s’affichaient dans son sourire d’une malicieuse générosité. Ce bel homme de tendresse, coureur de la planète et de divers mondes de la création, joyeuse, prenante et intime, nous laisse un bel héritage et occupe une douce place dans nos jardins secrets emplis d’estime. A lui, si discret et pudique, à ses enfants, Jeanne et Jules, dont il nous parlait souvent avec bonheur et heureuse fierté, à ses proches, ses partenaires, ses témoins, ses amis, nous adressons notre reconnaissance.
Les obsèques de Jacques Trupin auront lieu ce vendredi 21 janvier à 15 heures en l’église de Saint-Hilaire Saint-Mesmin (Loiret).
Un immense amoureux, un passeur du tango contemporain
Éloquente de passion et de fidélité est la biographie officielle non exhaustive de cet artiste. Jacques Trupin découvre l’accordéon à l’âge de cinq ans , en marchant sur les traces de son père. C’est à vingt ans qu’il aborde « sérieusement » la musique classique en entrant à l’université de Paris VIII où il obtient une licence de musicologie et à la Schola Cantorum pour y étudier pendant deux ans l’harmonie et l’écriture musicale.
Ses études terminées, Jacques Trupin s’installe en Australie où il fait la connaissance de musiciens argentins. Il découvre avec eux le bandonéon pour lequel il se prend de passion. A son retour en France, il s’inscrit au conservatoire d’Orléans pour parfaire ses connaissances en écriture. C’est à cette occasion qu’il rencontre le pianiste Fabrice Ravel-Chapuis avec lequel il fonde le duo Artango.
La formation connaît très rapidement un succès international en produisant un tango contemporain loin des clichés. Les tournées succèdent aux tournées, en Europe, Amériques du sud et du nord. Le duo enregistre cinq albums dont Un soir (Virgin Classics) dans lequel le duo s’offre la collaboration de l’Orchestre National de Lille dirigé par Jean-Claude Casadesus.
Dans les années 2000, le duo se sépare, Jacques Trupin choisissant de travailler pour le théâtre. Il compose pour différents metteurs en scène en même temps qu’il se produit en concert avec différentes formations.
En 2003, il s’associe avec le metteur en scène Franck Jublot et le plasticien Denis Garénaux pour fonder La Balle Rouge. Jacques Trupin compose la musique de cet opéra visuel qui fait l’objet d’un album et a été primé au YAMawards 2017 (Young Audiences Music Awards). Il est également le compositeur interprète de “L’Enfant-Roi”, présenté en 2012 au festival d’Avignon.
Fin 2011, Jacques Trupin compose un spectacle pour quintette à cordes, “Parfum d’écume”, qui a fait l’objet d’un album enregistré en 2012 à Orléans.
Son ultime création de tango contemporain s’intitule “Voyage immobile”.
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