Les frères Larrieu ont fait appel à leurs amis talentueux pour monter Tralala, une comédie qui chante et qui danse. Sur une histoire ténue, l’attention est sans cesse ravivée par les interprètes, les chansons et la danse. Le retour des réalisateurs chez eux leur permet d’être eux-mêmes, des cinéastes inventifs qui n’ont peur de rien, surtout pas de la poésie.
Par Bernard Cassat
Mathieu Amalric arrive à Lourdes. Capture écran
Arnaud et Jean-Marie Larrieu nous ramènent dans leur ville de naissance pour une grande balade dans la légèreté, la frivolité chantante d’une comédie pleine d’allant. Le pitch est vraiment très simple. Un clochard musicien, en l’occurrence Mathieu Amalric plus illuminé que jamais, rencontre devant la gare Montparnasse un jeune fille lumineuse qui lui dit de surtout ne pas être soi-même, avant de disparaître en laissant son briquet orné d’une effigie de la vierge de Lourdes. Le lendemain, il décide d’y aller. Va s’en suivre une série de quiproquos, de fausses reconnaissances et de vraies preuves d’amour.
Josiane Balasko rouvre sa boite de nuit. Capture d’écran
Les frères Larrieu nous donnent presque envie d’aller à Lourdes tant ils nous montrent certaines perles rares de cette ville, un hôtel rétro, des rues baroques, les montagnes autour. D’autant que le formidable casting nous fait vite oublier la futilité du propos. L’histoire ne tient pas vraiment, mais peu importe puisqu’on est dans un conte musical. Josiane Balasko crève l’écran. Même si, comme pour Mathieu Amalric d’ailleurs, ses chansons manquent un peu de punch. Non pas parce qu’ils ne sont pas vraiment chanteurs, mais les mélodies ne décollent pas.
De grands noms de la chanson ont pourtant travaillé sur la partie chantée du film. Par contre, lorsque Bertrand Belin, seul compositeur à jouer son rôle, entame sa chanson de réconciliation fraternelle au bord d’un lac improbable, on est emporté. Tout est là, la qualité de la voix, les arrangements des instruments, le look totalement rock de Bertrand, qui semble habité par Bashung. Il y aura plusieurs chansons de Belin, toutes aussi intenses. Mélanie Thierry, dans une gestuelle mystérieuse, magique et envoûtante, apporte une très belle contribution. Et puis il y a les moments de pure comédie musicale, dans la boite de nuit de Maman Josiane par exemple, qu’elle rouvre pour fêter le retour de celui qu’elle croit être son fils, avec riffs de guitare et danse collective. Denis Lavant, lui aussi vieux complice des deux réalisateurs, ne chante pas mais sa présence lutine fait merveille. Quant à Amalric, qu’il chante ou ne chante pas, son look de sdf, sa barbe de clochard et ses cheveux dans le vent lui donnent un air christique tout à fait à propos. Son regard de braise fait presque peur à certains moments, mais prouve son immense talent.
Mélanie Thierry dans une danse magique. Capture écran
Les frères Larrieu s’amusent avec une histoire totalement improbable, pleine d’images pieuses puisqu’on est à Lourdes. Avec un petit côté Théorème de Pasolini. Le « retour » de Pat fait redémarrer la vie de ses anciens proches. Sauveur non assumé, il est vrai. Mais rassembleur, certainement, comme le sont les réalisateurs qui s’entourent d’une équipe de qualité pour offrir, une fois de plus, un travail original, cohérent et poétique. Un ravissant moment de cinéma.
Réalisé par Arnaud Larrieu, Jean-Marie Larrieu
Avec Mathieu Amalric, Josiane Balasko, Mélanie Thierry, Maïwenn, Bertrand Belin, Denis Lavant
Compositeurs chansons Philippe Katrine, Bertrand Beulin, Dominique A, Jeanne Cherhal, Etienne Daho, Sein
Chorégraphies Mathilde Monnier
Directeur photo Jonathan Ricquebourg