Paul Rapinat a toujours entendu parler dans sa famille de son arrière grand-mère, Charlotte de Bartley, nimbée d’une aura mystérieuse. Dans un film documentaire, il part à sa recherche en étoffant les possessions familiales d’explications d’historiens et de spécialistes de la Belle Epoque. Un tableau peint en 1912 par Boldini lui sert d’ossature pour son récit filmé. Aussi passionnant que Charlotte elle même.
Par Bernard Cassat
C’est à un voyage dans le temps que nous invite Paul Rapinat dans son documentaire. Son arrière grand-mère a été une femme tout à fait exceptionnelle. Il n’a lui même que très peu de souvenirs d’elle, mais elle a laissé dans la famille une légende encore très présente.
Après avoir été écrivain public un temps, Paul Rapinat a suivi une formation de documentariste et s’est installé à Orléans. Il s’est retourné vers l’histoire de son aïeule, d’autant plus que nombre d’objets et documents lui ayant appartenu étaient encore dans la famille. Sauf un tableau qui la représentait et dont la recherche est devenue l’objet de son film.
La Belle Epoque à Paris
On retourne donc à Biarritz en 1881, date de la naissance de cette arrière grand-mère dans un milieu plutôt modeste, mais dans des conditions sociales assez perturbées. Sa mère comme son père biologique ne la reconnaissent que bien après sa naissance, et son père n’est en fait pas son vrai père. Peu importe en fait, puisque Charlotte Barthe, dite Bartley, sera élevée dans un domaine agricole voisin et non par ses géniteurs. Jolie petite fille puis très belle jeune femme, elle a un enfant très tôt. Elle ne cherche absolument pas à se faire épouser, mais décide de monter à Paris pour vivre une vie libre. Commence alors, vers 1907, une période très faste où elle s’installe comme demi-mondaine, comme on disait alors, c’est à dire une femme aux mœurs assez faciles mais avec classe, avec élégance et beaucoup de culture. Elle se fait entretenir par plusieurs hommes et finit par amasser assez d’argent pour acheter un domaine à Biarritz et y construire plusieurs pavillons raffinés.
De très beaux documents sur cette époque
Paul Rapinat documente toute cette histoire. Il rencontre à Paris un spécialiste de la société d’alors qui raconte la vie de ces femmes, en fait peu nombreuses pour celles qui réussissaient, leurs obligations et leurs « gains ». Un journal qu’avait tenu Charlotte prouve la grande intelligence de cette femme qui sortait de l’ordinaire. Des photos et des films familiaux tournés avant son décès témoignent du luxe qu’elle avait réussi à construire. Et parmi les photos de sa villa de Biarritz, Paul retrouve la présence d’un tableau dont elle avait parlé dans ses écrits. Commandé au peintre par un industriel alors « protecteur » de Charlotte, cette œuvre intitulée La dame de Biarritz lui avait été donnée par la suite. Charlotte s’en est séparée en 1929, sans doute par besoin d’argent. Le tableau a changé de propriétaires et de noms au cours du siècle, mais Paul a retrouvé sa trace dans une exposition d’œuvres de Boldini à Forli, en Italie. Il fait même l’illustration de l’affiche.
Ce film extrêmement bien documenté nous entraîne dans toutes ces recherches. Paul Rapinat se met en scène dans son film puisque le moteur, l’action sont ses propres efforts pour préciser par petites touches la vie extraordinaire de cette femme, son aïeule mais aussi une actrice du monde bien particulier des riches parisiens autour de la guerre de 14. Il devient en cela une intéressante évocation de la Belle Epoque.
La dame de Biarritz
Documentaire de Paul Rapinat
Images Alexis Renou, Zacharie Dutertre, Paul Rapinat
Montage Cedric Jouan
Son Vincent Reignier, Jérome Ayasse
Musique Vincent Viala
Production Nadejda Tilhou et Cent soleils, TV7
Avant première mardi 19h30 au cinéma les Carmes
A lire aussi : “Chanter la Belle époque” au centre Charles Peguy