Jean-Pierre Sueur vent debout contre la réforme de l’accès aux archives classifiées

« On ne pourra accéder aux archives qu’on bon vouloir du pouvoir exécutif. Aussi elles pourront être perpétuellement interdites d’accès.  C’est juste contraire à la loi de 2008 qui permet, malgré il est vrai une procédure administrative stricte de 2011, le libre accès aux archives de plus de 50 ans ». Au lendemain du vote de nuit d’un article réformant l’accès aux archives classifiées de plus de 50 ans, dans le cadre du projet de loi renforçant les mesures antiterroristes et le renseignement, le sénateur du Loiret Jean-Pierre Sueur (PS) ne décolère pas. Et il n’est pas le seul.  « Je suis très en colère de voir qu’on puisse revenir de façon aussi brutale, et au détour d’un cavalier législatif , sur la loi de 2008., c’est extrêmement grave  par rapport à l’écriture de  l’Histoire contemporaine  et politique de demain », assène pour sa part la porte-parole du groupe Sylvie Robert (PS), Ille-et- Vilaine,  à l’issue du point presse hebdomadaire du groupe, ce mercredi matin.

Notion d’exception

Au cœur de la polémique, on l’aura compris, un article, l’article 19, du projet loi renforçant les mesures antiterroristes et le renseignement. Il prévoit, selon l’exécutif, une nouvelle simplification, après la mise en place en 2011 d’une procédure administrative très stricte qui impose de déclassifier, un par un, tous les documents tamponnés comme « secrets », entravant de fait leur consultation.  S’il est vrai, comme le soulignait la ministre de la Défense Florence Parly pendant les débats nocturnes, que « l’absence d’un tampon de déclassification ne sera plus un obstacle », la démarche sera néanmoins plus aléatoire comme l’affirmaient les plus récalcitrants avec cette nouvelle notion d ‘exception au délai de 50 ans pour les documents les plus sensibles.  

« C’est une vraie tache dans le mandat d’Emmanuel Macron », renchérit pour sa part le sénateur socialiste Rachid Temal (Val d’Oise), qui pointe l’incohérence politique entre « un Président qui a souhaité faire un travail sur la mémoire, que ce soit la mémoire de la Première guerre mondiale, sur l’histoire commune de la France et de l’Algérie » et « la fermeture annoncée des archives ». « Sans les archives, poursuit l’élu, cette Histoire apaisée, rassembleuse, n’est pas possible ».  

Recours devant le Conseil d’Etat

Cette analyse est partagée par nombre de sénateurs de tous bords, qui ne cachaient pas leur exaspération d’autant plus que l’abrogation de la restriction administrative de 2011 frappée d’un recours au conseil d’Etat, déposée par plusieurs associations et historiens à l’automne, est attendue dans les prochains jours. Consciente de cet agenda, la sénatrice écologiste Esther Benbassa , chercheuse et historienne, s’interroge :   « Que fait d’ailleurs cet article dans ce texte » .Tout comme   la centriste Catherine Morin-Desailllly (Seine-Maritime) qui dénonce « un recul historique dans le principe de libre communicabilité  des archives » avec l’adoption à l’arraché de l’article 19 du projet de loi renforçant  l’accès aux archives classifiées de plus de 50 ans.  Ou encore Pierre Laurent (CRCE à majorité procommuniste, Paris), qui pointe aussi « l’émoi et la colère de la communié scientifique et culturelle ».

Z.C.

 

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