Théatre d’Orléans : un deux trois c’est reparti !

Après la musique mercredi, le spectacle vivant reprend lui aussi jeudi. Eins Zwei Drei, mélange burlesque des arts du cirque et de la scène, nous fait passer presque deux heures dans un monde loufoque au point de se faire exploser soi-même. Monté par Martin Zimmermann, chorégraphe et circassien suisse, ce spectacle hors normes manie l’absurde et le grotesque, et propose un de ces moments qui nous manquaient tellement.

C’est à une visite de musée que nous invite Zimmermann. Ou plutôt à regarder trois étranges personnages déambuler dans un musée. Un clown blanc, qui fait l’intermédiaire avec le public, puisque c’est son rôle. Un clown noir, plus grotesque que son compère, qui danse autant qu’il se contorsionne et qui glisse sur le sol blanc avec maestria. Ou tente de réparer une lumière en montant sur le piano, ce qui deviendra une tentative à la limite de l’angoisse. Et un troisième larron apparaît un peu plus tard, défonçant le plancher pour faire apparaître ses longues jambes. Véritable marionnette, il va pendant le déroulement du spectacle faire des contorsions impressionnantes et se retrouver enfermé dans une toute petite boite en plexiglass.

Trois acteurs clowns contorsionnistes

Pas vraiment d’histoire, mais une suite de scénettes désopilantes, des jeux sans paroles, ou très peu. Les corps expriment l’essentiel, comme souvent chez les clowns ou dans les pantomimes. Et ces corps là sont vraiment incroyablement maniés, véritables poupées de caoutchouc. Des onomatopées, des sons gutturaux, parfois quelques mots reconnaissables, mais seule la musique rajoute une dimension sonore. Jouée par un pianiste sur scène, c’est vraiment le quatrième personnage. Il se sert parfois de chansons bien connues pour exprimer plus précisément la situation. Et renforcer l’effet humoristique.

Parce que ces danseurs pantomimes sont des clowns d’abord et avant tout. Drôles dans leurs gestes, drôles dans leurs déguisements, drôles dans leur démesure. Le décor du musée, les murs, les fenêtres, les cadres, les lumières vont devenir eux aussi les protagonistes des comédiens. Des machines scéniques deviennent machinations, et les trois clowns en jouent autant qu’ils en sont le jouet. Ces « trucs » de scène, ce matériel important leur permet de créer un univers qui n’a plus besoin d’histoire pour tenir le spectacle. Ils font monter la tension pour exploser dans une apothéose assez infernale, une débauche d’absurde et de grandiloquent.

Du vrai spectacle, enfin

Après six mois de silence, cette retrouvaille avec le spectacle vivant, au fond, tombe tout à fait à propos. L’inexistence de l’histoire n’est pas gênante, puisque le sujet, c’est vraiment le spectacle lui-même. Des artistes doués, qui ont beaucoup travaillé et qui mènent le public par le bout du nez, là où ils veulent. Le clown blanc fera lever et applaudir le public, parce que le courant passe, l’échange est réel, l’énergie circule de la scène à la salle et vice versa.

Ca fait vraiment du bien de retrouver cette magie du spectacle.

Bernard Cassat


Eins Zwei Drei

Eins Zwei Drei copyright-cran-17

Conception,mise en scène, chorégraphie, costumes Martin Zimmermann
Création, interprétation Tarek Halaby, Dimitri Jourde, Romeu Runa, Colin Vallon
Création musicale Colin Vallon
Dramaturgie Sabine Geistlich
Scénographie Martin Zimmermann, Simeon Meier
Conception décor, coordination technique Ingo Groher
Dernière représentation vendredi 21 mai 19h. Il reste des places.

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