Sages-femmes :« Que notre métier soit reconnu pour ce qu’il est »

Le 5 mai dernier plusieurs manifestations se sont déroulées en France afin de demander une reconnaissance des droits et une revalorisation des salaires et actes des sages-femmes. Dominique Bergerault de Parny est sage-femme libérale à Tours. Elle revient sur l’exercice de son métier en cabinet.

Dominique Bergerault de Parny est installée dans son cabinet depuis 1991, rue Origet à Tours. Photo Ana Rougier

Quel est votre parcours ?

Dominique Bergerault de Parny : J’ai toujours été attirée par les métiers médicaux et ce dès mon enfance puisque ma mère était sage-femme. Elle était très investie dans son métier, au point d’en oublier les jours de repos. Dès qu’une femme devait accoucher, elle allait l’assister. Elle était toujours de garde. J’ai naturellement continué dans cette voie, avec la volonté d’accompagner les femmes avant, pendant et après leur grossesse. J’ai ouvert le premier cabinet libéral de sage-femme d’Indre-et-Loire en 1991.

En quoi consiste votre métier ?

D.BdP : Beaucoup de personnes sont persuadées que nous sommes des assistantes des médecins ou que nous sommes l’équivalent des aides-soignantes. C’est faux. En cabinet, nous assistons et accompagnons les femmes tout au long de leur grossesse, en apportant une aide à la fois psychologique, médicale et sociale. Pour moi, c’est très important de garder ce lien humain. À l’hôpital, les conditions sont différentes puisqu’on va agir auprès de femmes que l’on ne connaît pas.

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En tant que sage-femme travaillant en libéral, vous êtes en lien avec les hôpitaux pour les accouchements de vos patientes ?

D.BdP : En Touraine, les accouchements se font en majorité en maternité. Les accouchements à domicile sont diabolisés, ce qui n’est pas forcément le cas dans d’autres pays européens comme les pays du Nord. Les accouchements à risque peuvent être sélectionnés s’il y a une bonne corrélation entre le secteur libéral et l’établissement accoucheur. Un accouchement ne s’improvise pas, il y a 9 mois pour le prévoir.

Quelles sont les relations entretenues entre médecins et sages-femmes libérales ?

D.BdP : Nous sommes dans deux mondes différents, bien que complémentaires. Les médecins sont formés pour rétablir ce qui ne va pas, les sages-femmes sont formées pour accompagner ce qui va bien. Ce n’est pas la même dynamique. Ainsi, on multiplie les examens sous prétexte de rassurer sauf que l’on se trompe. Dès qu’une femme apprend qu’elle est enceinte, elle doit aller à l’hôpital pour vérifier qu’il n’y a pas de risques, faire une prise de sang, etc. C’est très stressant. N’étant pas informées, beaucoup de femmes se précipitent chez l’échographe avant même de voir une sage-femme, ce qui n’est pas une démarche logique. Il faut laisser du temps aux femmes pour se réjouir de leur grossesse.

Quelles sont les revendications auxquelles vous prenez part ?

D.BdP : Lors des allocutions du président, nous n’avons pas été citées une seule fois. Il faut que notre métier soit reconnu pour ce qu’il est : un travail médical qui demande un investissement énorme. Il faut une revalorisation de notre statut mais aussi de nos revenus. À l’hôpital, les sages-femmes s’organisent pour se défendre. Ce n’est pas pareil dans le secteur libéral. Par exemple, les cotations de nos consultations sont fixées par la sécurité sociale et ne suivent pas le coût de la vie.

Vous rencontrez des difficultés particulières ?

D.BdP : Je suis une féministe modérée mais il y a un problème lié à la condition féminine dans notre métier. Nous sommes des femmes, on s’occupe de femmes et au bout de 40 ans de carrière je vois qu’il y a un réel manque de considération aussi bien envers notre métier que les femmes enceintes. Trois professions sont reconnues comme médicales : les médecins, les dentistes et les sages-femmes. La plupart des gens ne savent pas que nous sommes considérés comme des médecins. À compétences limitées, certes, mais médecin tout de même.

Propos recueillis par Ana Rougier

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