Président de l’Institut du Monde Arabe, Jack Lang était ministre de l’Éducation nationale et maire de Blois lors du classement du Val de Loire au patrimoine mondial par l’UNESCO le 30 novembre 2000. Pour Magcentre, il a bien voulu évoquer cette page d’histoire.
Jack Lang. Photo IMA
Monsieur le Ministre, quel a été votre rôle dans la décision de classer notre fleuve au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre des paysages culturels ?
Jack Lang : Avec mes équipes de l’époque (dont Christophe Degruelle, mon directeur de cabinet), nous nous sommes mobilisés et avons agi avec détermination pour obtenir la reconnaissance mondiale de ce patrimoine exceptionnel. Je me souviens d’ailleurs avoir sollicité Michel Barnier, alors ministre de l’Environnement dans les années 95, pour obtenir son appui. Lorsque j’étais ministre de la Culture, je l’avais aidé dans la restauration des églises baroques de Savoie au moment des Jeux Olympiques d’Albertville. J’avais aussi adressé un courrier au directeur général de l’UNESCO de l’époque, Federico Mayor.
Que vous inspire le fleuve royal ?
J.L. : Beaucoup d’émotions, de souvenirs, de belles rencontres. Comment ne pas songer à Victor Hugo dont le grand-père habitait Blois qui écrivit à son propos que la ville apparaît comme un « amphithéâtre sur la Loire » ? Au-delà, c’est le caractère sauvage de son cours qui la définit le mieux. La majesté de ses îles aux grèves parsemées d’oiseaux, la rencontre de son sable et de la terre, le charme des villes et villages qui la bordent…. La Loire sauvage a un charme infini qu’aucun autre fleuve ne possède. Mis à part cela, le fleuve représente une part de notre civilisation européenne, de l’histoire de France, la Renaissance s’y est épanouit…
Qu’entendez-vous par cela …
J.L. : La Loire est le symbole d’un art de vivre ligérien qui fait l’attrait de cette région depuis des siècles ; je suis heureux que des millions de visiteurs découvrent ses merveilles, ses châteaux, ses jardins, son patrimoine religieux, sa gastronomie ou ses terroirs. J’ai d’ailleurs œuvré avec d’autres pour mettre en valeur ses vignobles comme ceux de Cheverny qui ont pu être classé en AOC en 1993. Je me souviens d’ailleurs bien à l’époque avoir saisi le ministre de l’agriculture, Jean-Pierre Soisson, pour qu’il aide à mettre en valeur le fameux cépage Romorantin ramené d’Italie par François Premier. Ce vignoble est aujourd’hui le support d’un œnotourisme de grande qualité. Dans le Val de Loire, le Loir-et-Cher est un département séduisant, au charme infini avec des femmes et des hommes plein d’initiatives et de ressources qui ont toujours su rebondir à travers les siècles. Je me réjouis que les élus blésois soient à la hauteur du classement de l’UNESCO.
Vous êtes président de l’Institut du monde arabe depuis 2013 et venez d’être reconduit pour trois ans en mars dernier. Vous avez fait de ce lieu un site emblématique de la culture à Paris et des liens qui nous unissent au monde arabo-musulman…
J.L. : J’aime porter les choses, c’est mon tempérament. Je suis heureux que l’IMA soit désormais reconnu comme un lieu d’art, de partage, de tolérance et d’ouverture. À partir du 27 janvier et jusqu’au 25 juillet 2021, nous accueillerons une nouvelle exposition évènement : “Divas, d’Oum Kalthoum à Dalida”. Le public pourra y découvrir le portrait des grandes femmes artistes arabes du XXe siècle qui ont participé à l’évolution de ces sociétés et qui restent aujourd’hui encore des références.
Propos recueillis par Jean-Luc Vezon