Mardi 22 juillet 2020, la proposition de loi destinée à mieux « protéger les victimes de violences conjugales » a été adoptée par le Parlement. Cette proposition de loi faisait suite aux travaux du Grenelle des violences conjugales tenu du 3 septembre au 25 novembre 2019. Après cette longue concertation, 30 mesures avaient été proposées. Certaines sont désormais traduites dans cette nouvelle loi.
Les brutalités sont subies essentiellement par les femmes et 81% des morts violentes au sein des couples, ou des ex-couples, sont des féminicides. DR
Lutter plus efficacement contre les violences faites aux femmes
Les brutalités sont subies essentiellement par les femmes et 81% des morts violentes au sein des couples, ou des ex-couples, sont des féminicides. Dans son intitulé la loi vise à « protéger les victimes de violences conjugales » mais semble oublier qu’il existe aussi des violences commises vis-à-vis d’hommes au sein de couples hétérosexuels ou de même sexe. Il aurait été sans doute plus juste de construire une « loi contre la violence exercée par un partenaire intime ». Quoiqu’il en soit, ce nouveau texte complète l’arsenal juridique afin de lutter plus efficacement contre le fléau des violences conjugales.
Levée du secret médical
La mesure 6 du Grenelle des violences conjugales proposait d’affranchir les médecins du secret médical. Malgré quelques craintes, le Conseil national de l’Ordre des médecins a décidé, en décembre 2019, de soutenir une évolution de l’article 226-14 du Code pénal qui régit le secret professionnel. La nouvelle loi a donc rendu possible la levée du secret médical lorsque les violences mettent la vie de la femme en danger et qu’elle se trouve sous la domination de leur auteur. Le professionnel de santé n’a pas besoin de l’accord de la victime et n’a pas l’obligation de faire le signalement.
Mieux protéger les enfants
Dans son article 11, la loi combat le visionnage d’images pornographiques par les mineurs. Sous la responsabilité du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) tout éditeur de site ayant un contenu pornographique devra prendre « toute mesure de nature à empêcher l’accès des mineurs au contenu incriminé ». Devant la multitude de sites à contenu sexuel, souvent installés à l’étranger, l’application d’une telle mesure risque d’être particulièrement difficile pour le CSA. Par ailleurs, les enfants seront écartés du parent violent. La loi permet la suspension du droit de visite et d’hébergement et suspend l’exercice de l’autorité parentale en cas de poursuite ou de condamnation pour crime vis-à-vis du conjoint. La loi veut, ainsi, mieux protéger les enfants.
Des mesures législatives complémentaires
La loi supprime une injustice. Elle décharge de leur obligation alimentaire les ascendants et les descendants de personnes condamnées pour un crime ou un délit commis par un parent sur l’autre parent et portant atteinte à l’intégrité de la personne.
Le harcèlement n’est pas oublié : le texte de loi prévoit des peines de dix ans d’emprisonnement et de 150000 euros d’amende dans les cas où le harcèlement moral au sein du couple conduit au suicide ou à sa tentative.
Dans les situations de conflits, de ruptures, de séparations et de divorces, il existait une procédure de médiation qui devait théoriquement permettre de mettre en place un accord entre les deux parties. Cette médiation, dans certains cas obligatoire, avait trop souvent des conséquences négatives sur les victimes de violences sous l’emprise de leur tortionnaire. Dans la nouvelle loi, en cas de violences conjugales, cette procédure est supprimée comme le souhaitaient de nombreuses associations de protection des femmes. Toutes ces mesures législatives complémentaires devraient mieux protéger les femmes avec leurs enfants.
Des espaces protecteurs à concevoir
Dans le cadre des droits de visites, plusieurs députés auraient souhaité que soit mis en place des espaces de rencontres spécifiques et neutres, protégeant à la fois la mère et les enfants. La loi n’y a pas pourvu. Il serait sans aucun doute très utile et aisé que les municipalités comblent ce souhait dans le cadre de leur politique sociale…
Jean-Paul Briand