Stéphane Margueritte est un personnage. Il vous accueille dans son univers, 3 rue du Clos Rozé à Orléans, avec un grand sourire, au milieu de ses pianos de toute forme, de toute couleur, de tout style. Et il commence par vous parler du monde qui l’entoure, débusquant failles et incohérences de la société actuelle, ponctuant ses propos de lumineux éclats de rires.
Stéphane Margueritte, “épicier du piano”, tient sa boutique au 3 rue du Clos Rozé à Orléans.©Anne-Cécile Chapuis
Stéphane Margueritte se définit, avec le clin d’œil dont il a le secret, comme « un épicier du piano » mais ses propos montrent au contraire un savoir d’envergure, qui se décline à l’échelle mondiale, avec la guerre des marques, l’intransigeance du marché, les rivalités des constructeurs, l’invasion du numérique…
Il parle aussi avec beaucoup de finesse de l’histoire de la pratique du piano, des pianistes, de la place que prend cet instrument dans la société d’hier et d’aujourd’hui. C’est un hédoniste, qui aime comparer le piano à « un bon vin », qui se bonifie avec l’âge mais peut révéler de bonnes ou mauvaises surprises.
En revanche, il est très pudique sur lui-même. De son parcours, l’on n’apprendra que peu de choses. Il a débuté comme accordeur à Paris, a appris le métier auprès de son cousin, et, à l’étroit dans les surfaces de la capitale, a choisi la région d’Orléans pour se rapprocher de sa famille. Installé à l’origine en 1978 rue Croix de bois, c’est en 1984 que l’atelier prend sa position actuelle 3 rue du clos Rozé.
Intérieur de la boutique Les Pianos Margueritte à Orléans. ©Anne-Cécile Chapuis
La boutique est spacieuse et accueillante. Autour des pianos, les murs blancs sont décorés de tableaux. Le propriétaire offre ses murs pour des expositions temporaires, créant ainsi des espaces de rencontre croisées lors des vernissages.
Stéphane Margueritte exerce son métier avec passion, ou plutôt ses métiers car ses activités sont multiples : Il vend et loue des pianos, ce qui suppose une fonction délicate de conseil adapté aux demandes les plus diverses voire les plus farfelues.
Il répare les pianos, et ceci fait appel à un doigté minutieux auprès d’un instrument complexe composé de nombreuses pièces, dont certaines, paradoxe de l’instrument, ne font que quelques millimètres. Il accorde les pianos, ce qui requiert une oreille exercée et infaillible.
L’on pourrait rajouter qu’il joue du piano, « le plus souvent debout » (sic) et bien qu’il s’en défende. Il est également expert auprès des tribunaux pour les évaluations des instruments lors de successions, séparations etc.
Son univers est un monde un peu à part dans lequel on est happé lorsque l’on franchit la porte de l’atelier du Clos Rozé. Les pianos sont là, par dizaines, rutilants et imposants.
Stéphane Marguritte restaure un pianola de la fin du XIXe siècle. ©Anne-Cécile Chapuis
Mais quand le regard s’égare dans les arrières boutiques, on découvre des inédits. Par exemple, un splendide pianola datant de la fin du XIXe siècle est en cours de restauration. C’est un instrument fabuleux qui associe le mécanisme du piano avec touches et marteaux, à une mécanique faite de soufflerie, chaînes et roues dentées qui actionnent une carte perforée…et le piano joue seul ! On peut juste régler le tempo et les nuances. Un prodige d’ingéniosité.
Plus loin, on aperçoit aussi un « piano-harmonium » qui attend que le réparateur lui donne une nouvelle jeunesse. En fond d’atelier, on entre dans le « ventre » de l’instrument, avec des rayonnages de cordes, des mécanismes, des claviers… sur lesquels Stéphane Margueritte règne un peu comme un Docteur Faust ou un Gepetto ! Allez le rencontrer, vous en sortirez transformés !
Anne-Cécile Chapuis